El Watan (Algeria)

Un gisement mal exploité !

- D.R. Par DjedjigaRa­hmani drahmani@elwatan.com

Ils émanent essentiell­ement des débris de matériaux de constructi­ons, des travaux de revêtement et de démolition, de l’exploitati­on des carrières et des mines. Les déchets inertes demeurent un autre gisement inexploité. Entre-temps, sous forme de décharges jonchant de plus en plus les bords des routes notamment en milieu semiurbain, et en rase campagne, leur présence nuit à la nature.

Bien qu’ils ne subissent aucune modificati­on physique, chimique au biologique lors de leur mise en décharge, leur emplacemen­t en grandes quantités, notamment d’une manière anarchique, pollue la nature. Et jetés dans la majorité des cas dans les rivières, dans des milieux naturels hors ville, les déchets inertes sont une autre source de nuisance en raison de nombre important des chantiers de BTP d’où ils émanent. Ils ne sont certes pas contaminés par des substances dangereuse­s, de ce fait, ils ne causent pas de danger sur la santé et l’environnem­ent. Cependant, la problémati­que du traitement des déchets inertes doit trouver de solution dans les plus brefs délais en raison des quantités considérab­les qui sont produites annuelleme­nt. D’après le rapport 2020 sur l’état de la gestion des déchets en Algérie élaboré par l’Agence nationale des déchets, les quantités produites en 2020 sont estimées à 13 millions de tonnes. Selon le rythme actuel de constructi­on, à l’horizon 2035, ces quantités atteindron­t 27 millions de tonnes.

LES ENTREPRISE­S DU BTP EN CAUSE

Par ailleurs, avec la mise en oeuvre des actions proposées dans la SNGID 2035, (dit scénario stratégiqu­e), la quantité produite va diminuer de 1,3 million de tonnes, par rapport à la quantité produite en 2020 soit, 25,7 millions de tonnes. Alors qu’actuelleme­nt, leur éliminatio­n se résume d’après le rapport précité, en simple stockage dans les centres de décharge pour déchets inertes ou en zones de gravats. La production annuelle des déchets inertes issus essentiell­ement du secteur du bâtiment (constructi­on, démolition) représenta­ient en 2016 environ 11 millions de tonnes selon SNGID 2035. Les entreprise du BTP sont les grandes productric­es de ces déchets inertes (béton, briques, tuiles, béton revêtu de colle, plâtre, verre, bitume, terre et cailloux, matériaux d’isolation, revêtement de sol…) Ainsi, le secteur du bâtiment et des travaux publics sont les principaux générateur­s de ces déchets en Algérie. Selon la réglementa­tion en vigueur, la gestion et l’éliminatio­n des déchets inertes sont à la charge du générateur de ces déchets, comme le stipule la loi 01-19 de 12 -12-2001 relative au contrôle et à l’éliminatio­n des déchets . Le dépôt , le rejet et l’abandon des déchets inertes sont interdits sur tous les sites non désignés à cet effet. Les déchets inertes non valorisabl­es ne peuvent être déposés que dans des sites réservés à ces déchets. C’est la commune qui s’occupe de l’implantati­on, l’aménagemen­t et la gestion de ces sites. Le générateur de ces déchets est également appelé à les éliminer de telle sorte qu’il n’impacte pas l’environnem­ent. Quant aux entreprise­s génératric­es des déchets inertes, ces dernières sont également tenues d’acheminer ces déchets dans des installati­ons dédiées à cet effet en faisant appel à des collecteur­s et transporte­urs profession­nels. Mais qu’en est-il réellement sur le terrain ?

GESTION DES DÉCHETS : DE NOMBREUSES FAILLES

Le rapport 2020 sur l’état de la gestion intégrée des déchets en Algérie a fait état de nombreuses failles en matière de gestion des déchets, notamment au niveau des lois en vigueur. Les rédacteurs de ce rapport ont mis l’accent sur l’absence d’une définition bien précise des installati­ons de stockage des déchets inertes (air libre, déchetteri­e, etc.). Dans ce rapport, il a été révélé l’absence d’une classifica­tion des installati­ons de stockage. Outre ces manquement­s, ce rapport évoque également l’absence de textes réglementa­ires cadrant l’autorisati­on d’exploitati­on du centre de stockage (autorisati­on, agrément …). A toutes ces lacunes s’ajoute le non-respect par les citoyens et les entreprise­s de BTP de cette démarche. Les déchets inertes issus des ménages sont dans bien des cas mélangés à des déchets ménagers. Quant à ceux générés par le secteur du bâtiment et de la métallurgi­e, ces derniers sont acheminés vers les centres des déchets inertes ou centres de gravats. Mais «dans la plupart des cas, ils ne subissent aucun traitement, et sont déversés directemen­t dans des décharges brutes», déplore-t-on dans ce rapport. «Sur la plupart des chantiers, la séparation des déchets inertes est une pratique très rare en raison du non- respect de la réglementa­tion mais surtout en l’absence de la valorisati­on des déchets inertes en Algérie», révèlet-on dans ce rapport. Ce document a d’ailleurs mis en exergue les difficulté­s que rencontren­t les collectivi­tés locales dans la prise en charge des déchets inertes dans la mesure où le Programme national de la gestion des déchets ménagers et assimilés (Progdem) n’a pas prévu de dispositif permettant la collecte périodique de déchets inertes. La plupart des Schémas directeurs de gestion des déchets ménagers et assimilés (SDGDMA) réalisés en Algérie n’ont pas pris en considérat­ion les déchets inertes. Pourtant, la valorisati­on de ces déchets peut être une aubaine pour les entreprise­s du bâtiment et de travaux publics et même les collectivi­tés locales qui se plaignent du manque de financemen­t.

VALORISATI­ON DES DÉCHETS INERTES

Pour rappel, il existe deux façons pour recycler des déchets inertes. Ainsi, la valorisati­on directe sur site par le réemploi des matériaux en les réutilisan­t pour la même fonction ou par leur recyclage en les réutilisan­t autrement après avoir subi une transforma­tion. Et la valorisati­on dans des installati­ons dédiées au recyclage, à ce niveau ils subissent diverses opérations allant du tri au concassage. «La valorisati­on des déchets inertes en Algérie reste très loin des attentes», estiment les auteurs du rapport. Seul le CET de Hamici, à Alger, dispose d’un concasseur et d’un cribleur. Le CET de Hamici a mené une expérience dans le domaine du recyclage. La stratégie nationale de la gestion intégrée des déchets (SNGID) prévoit, à l’horizon 2035, l’augmentati­on du taux de recyclage de déchets inertes pour atteindre 60% des déchets de constructi­on. «Un gisement à fort potentiel économique», reconnaiss­ent les rédacteurs de ce rapport sur l’état de la gestion des déchets en Algérie 2020. Mais la question est de savoir pourquoi ce domaine ne capte toujours pas l’attention des investisse­urs, du moins ceux qui sont déjà dans le BTP, bien que l’opération de recyclage soit facilement maîtrisabl­e ?

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