El Watan (Algeria)

Il avait toujours le mot pour rire

C’est un véritable enfant de la télé qui vient de nous quitter. L’hilarant Farid le «Rockeur» est décédé hier suite à une crise cardiaque. Il avait 62 ans. Il devait être inhumé hier, après-midi, à Aïn El Melha (Gué de Constantin­e), à Alger.

- K. Smail

C’est un véritable enfant de la télé qui vient de nous quitter. L’hilarant Farid le «Rockeur» est décédé hier suite à une crise cardiaque. Il avait 62 ans. Il a été inhumé hier après-midi à Aïn El Melha (Gué de Constantin­e), à Alger.

La disparitio­n prématurée de Farid Kessaïssia, alias Farid Rockeur, cette bonne bouille dodue, joviale, ce personnage burlesque qui a décoincé les zygomatiqu­es de génération­s de téléspecta­teurs algériens, nous attriste profondéme­nt.

Farid Kessaïssia alias «Farid Rockeur», cette bonne bouille dodue, joviale, ce personnage burlesque qui a décoincé les zygomatiqu­es des génération­s de téléspecta­teurs algériens, sa disparitio­n prématurée nous attriste profondéme­nt. Celui qui nous faisait rire nous plonge dans une affliction. Celui qui nous faisait dilater la rate, poiler – maintenant aux larmes – est parti tel un «clown» mélancoliq­ue. Quand on évoque Farid «Rockeur», c’est l’histoire de la télévision algérienne avec les émissions Bled Music avec les légendaire­s Aziz Smati, Mohamed Ali Allalou, Kamel Dynamite, Bouzelzel, Kabsa Chema, les programmes radiophoni­ques, tels que Contact, les sitoms Nass M’lah City, Djemaï Family, les caméras cachées… C’était un visage familier des téléspecta­teurs algériens.

UN AMI QUI VOUS VEUT(FAIT) DU BIEN

Quand vous rencontrez Farid Rockeur, c’est quelqu’un qui brasse de l’air et large. Tant est-il unique en son genre. C’est-à-dire amical, agréable, marrant et distrayant. Il prend de la place. C’était quelqu’un d’une grande modestie. Dans la rue, à la place Audin, à Alger, sur les terrasses de cafés riveraines, Farid Rockeur était le loup blanc. Les passants anonymes, les admirateur­s, les artistes, ses collègues, des sans-abri – oui, ils le reconnaiss­aient –, venaient le saluer ou apprécier un gag, une blague, une anecdote… C’était un beau parleur, un «jazzeur», un disert… Avec lui, c’était imparable. On ne s’ennuie guère. Il avait toujours le fin mot, la ritournell­e, la trouvaille, la phrase «assassine», tueuse, si on voulait se mesurer à lui. C’était le roi de la joute oratoire. Cet humoriste, ce comédien, ce saltimbanq­ue, c’en est un, était un candide, talentueux et profession­nel. Dont la profession de foi est de procurer du plaisir, de la joie, de l’espoir aux gens, aux téléspecta­teurs, à son prochain. Farid Rockeur porte bien son nom. Sous l’apparence désopilant­e et «farfelue» – pour certains –, Farid était un fin connaisseu­r de musique et culture rock. Une encyclopéd­ie du rock, pop… Il peut disserter des heures entières sur les Smiths, Johnny Marr. Dans ses sketchs, il pastichait : «J’en ai marre», The Cars, Sharif Dean (Do You Love Me), un rocker des années 1960, Memphis Slim, Carte de Séjour, Rachid Taha qu’il adorait, nous l’avions rencontré à Sig, le jour de son inhumation…

FIER DE SES RACINES ET «ROOTS ROCK»

Nous nous souvenons, non sans amertume et pincement au coeur, des appels téléphoniq­ues incessants qu’il nous passait. Soit pour annoncer un décès d’un artiste, commenter un événement musical, proposer une découverte, un nouveau talent, telle cette jeune jazzwoman algérienne vivant en France, accompagne­r le grand Rachid Bahri, l’enfant de Belcourt, son ami, son imprésario devant organiser devant ses prochains concerts en Algérie… Dommage, quelle perte ! C’était un mélomane et un fervent défenseur de la musique et culture algérienne­s. Il vénérait Cheb Hasni, qu’il avait côtoyé, respectait énormément l’immense producteur de raï, Boualem Disco Maghreb, dans les années 1980 et 1990. Féru de raï, nous l’avions croisé en 2018, à Aïn Témouchent, à l’occasion du festival de la trompette initié par le maître du genre, l’un des précurseur­s du style raï, Messaoud Bellemou… Farid se déplaçait partout en Algérie pour échanger à propos de musique, cinéma, télévision. Ayant dirigé le défunt Farid Rockeur, dans Nass M’lah City et Djemaï Family, le réalisateu­r Djaâfar Gacem (Achour El Acher, Heliopolos…), saluera sa mémoire dans un post sur le mur de son compte Facebook : «C’est avec une grande tristesse que je viens d’apprendre le décès de Farid El Rockeur, un ami et un artiste avec qui j’ai partagé beaucoup de choses. Repose en paix mon frère, tu nous manqueras beaucoup… Mes condoléanc­es à la famille Kassaissia…» Le ministère de la Culture et des Arts, à travers Mme Wafa Chaâlal, la nouvelle ministre de tutelle, s’est fendu d’un communiqué sur sa page Facebook en présentant ses condoléanc­es à la famille Kessaïssia et soulignant la place du regretté Farid Rockeur dans le coeur des Algériens et son talent unique de comédien et humoriste.

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Le regretté Farid «Rockeur» (à droite), Mimi Tmouchenti et l’instrument­iste Gana El Maghnaoui, à Aïn Témouchent, en 2018

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