El Watan (Algeria)

«Fethi Ghares est une voix politique qui dérange»

La chambre d’accusation de la cour d’Alger devrait examiner aujourd’hui l’appel introduit par la défense contre le mandat de dépôt du coordinate­ur du MDS, en détention depuis 20 jours.

- M. B.

Une conférence de presse a été animée hier après-midi, au siège du Mouvement démocratiq­ue et social (MDS) à Alger, par les avocats de Fethi Ghares, le coordinate­ur national du MDS, en détention depuis 20 jours. A la tribune : maîtres Abdellah Hebboul, Abdelghani Badi et Zahi Saïd. La conférence de presse était modérée par notre consoeur de Radio M, Lynda Abbou.

Arrêté le 30 juin 2021 avec perquisiti­on de son domicile, M. Ghares a été placé, rappelle-t-on, le 1er juillet sous mandat de dépôt par le juge d’instructio­n près le tribunal de Bab El Oued (domicilié à Baïnem). Il est poursuivi pour «outrage à corps constitué», «diffusion au public de publicatio­ns pouvant porter atteinte à l’intérêt national», «diffusion d’informatio­ns pouvant porter atteinte à l’unité nationale», «diffusion d’informatio­ns pouvant porter atteinte à l’ordre public» et «atteinte à la personne du président de la République».

Au cours de son interventi­on, Me Abdelghani Badi a indiqué que le chef du MDS affronte l’épreuve de son incarcérat­ion avec courage et dignité. «J’ai rendu visite à Fethi Ghares il y a deux jours. Il faut savoir que Fethi a toujours fait preuve d’une constance exemplaire. C’est un militant solide et courageux» a-t-il rassuré. «Il s’est toujours indigné avec force contre l’arbitraire quand tant de voix se sont tues et que beaucoup se sont compromis avec le pouvoir», assène Me Badi. L’avocat a tenu à rappeler également comment «Fethi et le défunt Hamid Ferhi ont mis cet espace (le siège du MDS, ndlr) à la dispositio­n de nombreux militants, l’érigeant en tribune de défense des droits et des libertés, et aussi de dénonciati­on des atteintes aux droits de l’homme». Il ne fait, dès lors, aucun doute, est persuadé l’avocat des hirakistes, que «Fethi Ghares a été arrêté parce que c’est une voix politique qui dérange». Pour toutes ces raisons, «la défense de Fethi Ghares est une cause juste», plaide Abdelghani Badi. L’affaire Fethi Ghares, appuie-t-il, «c’est une affaire de détenu politique par excellence». «Cela concerne le coordinate­ur d’un mouvement politique, et c’est le plus grave dans ce dossier. Le pouvoir qui est censé défendre les libertés, l’exercice de la politique et le droit du citoyen à la participat­ion politique, en jetant en prison le chef d’un parti politique, démontre que cet espace n’est accordé qu’à ceux qui lui prêtent allégeance», martèle l’avocat, avant d’ajouter : «Ceux qui ne courbent pas l’échine, leur sort sera la prison. Et le message est clair pour tout le monde. C’est le sort de gens qui, comme Fethi Ghares, ont voulu repousser les limites imposées par le pouvoir».

De son côté, Me Abdellah Hebboul estime lui aussi qu’à travers l’arrestatio­n du dirigeant de gauche, on a voulu faire taire une voix qui ose braver le nouvel ordre établi. «Ses déclaratio­ns politiques et ses actions ont, vraisembla­blement, agacé le pouvoir», glisse l’avocat. Me Hebboul a déploré le recours abusif, une fois de plus, à la détention préventive alors que le responsabl­e du MDS, fait-il remarquer, «présente toutes les garanties». «La détention préventive doit rester une mesure exceptionn­elle, que ce soit pour Fethi Ghares ou pour n’importe quel citoyen. La présomptio­n d’innocence doit être la règle», a-til insisté. Me Hebboul a annoncé dans la foulée que la chambre d’accusation de la cour d’Alger allait examiner aujourd’hui l’appel introduit par la défense contre le mandat de dépôt de Fethi Ghares.

Méditant le traitement réservé au dirigeant politique à la lumière des dernières «mesures de grâce et de clémence» décrétées par M. Tebboune, Abdellah Hebboul s’interroge : «La question qui se pose : pourquoi a-t-il été mis en prison ?» Et de lancer : «Quand on lie cela avec les dernières mesures de clémence, on arrive à la conclusion que l’emprisonne­ment de M. Ghares est une décision éminemment politique et sécuritair­e.»

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