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OÙ SONT PASSÉS NOS BÉBÉS ?

Lange Zeit war man in Frankreich stolz auf die hohen Geburtenra­ten im Land. Aber 2017 bekamen die Französinn­en im Durchschni­tt nur noch 1,88 Kinder. Das Ende einer Ausnahme?

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Wie stolz war Frankreich auf die hohen Geburtenra­ten im Land. Jetzt sinken sie. Was ist geschehen?

CC’est décidé : Julien et Laura n’auront qu’un enfant. Tous les deux n’ont encore que 28 ans mais, à les entendre, leur décision est « ferme et définitive ». Lui, technicien en informatiq­ue, n’a eu ni frère ni soeur et, dit-il, « n’en a jamais souffert ». Elle, diplômée en droit, est issue d’une fratrie de quatre, mais n’a aucune envie de reproduire le modèle familial. « Avant de devenir mère, je dois d’abord trouver un poste stable. Après, j’ai envie de vivre à Paris, où les loyers sont tels que nous ne pourrions pas le faire avec une famille nombreuse. »

25 ans de retard

Un cas isolé? Peut-être pas. Depuis quelque temps, le nombre des naissances enregistrées en France montre de sérieux signes de faiblesse. En 2017, il a baissé pour la troisième année consécutive, avec seulement 767 000 nourrisson­s, outre-mer compris. Loin, très loin de la glorieuse année 1971 où l’on avait frôlé la barre des 900 000 pour la seule métropole. Plus inquiétant : le « solde naturel » (le total des naissances moins les décès) en 2017 a atteint son plus bas niveau depuis… 1945. Et la dégringolade a continué en 2018. Selon les derniers chiffres de l’insee, seuls 285 600 bambins ont vu le jour entre les mois de janvier et de mai, soit 11 % de moins qu’en 2014.

Si cette pénurie se confirme, comment redevenir la première puissance démographiqu­e en Europe, devant l’allemagne, comme cela était prévu ? Comment jouer les premiers rôles dans l’économie de demain ? Et, bien sûr, comment financer les pensions d’un pays vieillissa­nt ? Le Conseil d’orientatio­n des retraites vient de donner l’alerte. Longtemps, ses prévisions ont été fondées sur le maintien d’une fécondité de 1,95 enfant par femme. Les derniers chiffres, nettement plus faibles, représentent une menace majeure pour notre système de retraite par répartition. « Quand on oublie la démographie, on découvre les problèmes avec 25 ans de retard », prévenait jadis Alfred Sauvy, sociologue et démographe reconnu.

Reste à comprendre les causes de cette récente inflexion. «La crise de

2008 a entraîné un recul de la fécondité dans tous les pays européens. La France connaît simplement le même phénomène avec retard, car, chez nous, les politiques familiales et sociales ont joué un rôle d’amortisseu­r », tente de rassurer Laurent Toulemon, démographe de l’institut national des études démographiqu­es (Ined). Une analyse qui ne fait pas l’unanimité.

La faute au président ?

Ces statistiqu­es ne traduiraie­nt-elles pas plutôt un changement des mentalités ? Comme Julien et Laura, certains jeunes couples se seraient en effet forgé une conviction : pour élever des enfants dans des conditions optimales, mieux vaudrait en avoir moins. Une petite minorité, plus radicale encore, a même décidé de renoncer à toute progéniture, pour des raisons écologiques entre autres. À ses yeux, la planète va suffisamme­nt mal pour ne pas la surcharger d’êtres humains supplémentaires. Un mouvement qui, à ce jour, reste toutefois marginal. « Depuis des années, le nombre d’enfants désirés reste stable et se situe autour de 2,4 par femme », relativise l’union nationale des associatio­ns familiales (Unaf).

Alors? Alors, sur le banc des accusés figure en bonne place un certain... François Hollande. Pendant son quinquenna­t, l’ancien chef de l’état a en effet radicaleme­nt réorienté la politique familiale française. Alors que, traditionn­ellement, les aides étaient les mêmes pour tous, il les a fortement réduites, notamment au détriment des ménages « aisés », modulant les allocation­s selon les revenus, diminuant les aides à la garde d’enfants, rognant la prime de naissance, rabotant à deux reprises le quotient familial qui prend en compte le nombre d’enfants dans le calcul de l’impôt sur le revenu... Cela fait beaucoup. Trop ? C’est l’opinion de Stéphanie, infirmière libérale, et de Frédéric, technicien supérieur. Ce couple de quadragénaires de la région parisienne, parents de trois enfants âgés de 5 à 14 ans, a vécu la période douloureus­ement : « C’est simple, les aides que nous percevions ont baissé de 50 %, tandis que notre impôt sur le revenu a augmenté du même pourcentag­e. Si nous avions su ce qui nous attendait financière­ment, il n’est pas certain que nous aurions donné naissance à Théo, notre petit dernier.» Avis partagé par nombre d’élus, notamment à droite. « François Hollande aura réussi à inverser une seule courbe : celle de la natalité ! », se moque ainsi Bruno Retailleau, sénateur Les Républicains (parti de la droite conservatr­ice). Une attaque de bonne guerre, même si, en toute rigueur, il est scientifiq­uement impossible d’établir un lien entre un changement législatif et des variations à court terme de la natalité. En 1983, par exemple, malgré une hausse de 25 % des allocation­s familiales, le taux de fécondité avait… chuté. Et puis, on l’a dit, la baisse a été générale en Europe après la crise de 2008. Difficile d’imputer les mauvais chiffres de la Grèce ou de la Norvège à l’action délétère de l’ancien président français.

Des enfants, oui, mais plus tard

Cela ne veut pas dire que la question ne se pose pas. « Un lien direct entre les mesures Hollande et les statistiqu­es récentes ne peut être formelleme­nt établi mais, en matière démographiqu­e, l’aspect symbolique joue un rôle important », remarque Laurent Toulemon. Et d’ajouter : « En France, depuis des décennies, l’idée dominante était que l’état prenait à sa charge une partie du fardeau financier représenté par l’arrivée d’un enfant. Les coups de canif successifs ont affaibli ce discours. Tout le monde a pu se dire :

“Aujourd’hui, ce sont les riches, mais demain ? “» Une analyse corroborée par l’unaf : « La révision à la baisse de la politique familiale a retiré au moins 3,5 milliards d’euros par an aux familles. Cela a certaineme­nt contribué à la baisse de la natalité. De plus, l’offre d’accueil de la petite enfance s’est elle aussi dégradée. En Europe, la France est passée de la 2e à la 18e place, entre 2007 et 2016, quand il s’agit d’évaluer la capacité de concilier vie familiale et vie profession­nelle. Tout cela a assombri le climat d’ensemble.» Pour sa défense, Hollande peut bien rappeler que le changement de météo avait commencé quand Nicolas Sarkozy avait décalé l’âge de versement des allocation­s familiales. Il n’empêche : c’est bien sous son quinquenna­t que les discrets nuages sont devenus d’inquiétants orages.

La démographie a pourtant longtemps été l’un des points forts de notre pays, champion d’europe incontesté de la natalité, avec la très catholique Irlande, depuis des décennies. Une réussite due à notre vigoureuse politique nataliste, bien sûr, mais aussi à l’apport de l’immigratio­n et à un environnem­ent culturel beaucoup plus favorable au travail des femmes que dans d’autres nations d’europe. Les statistiqu­es enregistrées depuis quatre ans marqueraie­nt-elles la fin de l’exception française et l’entrée dans un «hiver démographiqu­e», comme l’annonce déjà l’essayiste Nicolas Baverez ? Il est trop tôt pour en être certain, en raison d’un phénomène majeur : le décalage de l’âge auquel les femmes donnent naissance à un enfant. Entre la généralisation des études supérieures, l’insertion de plus en plus difficile sur le marché du travail, et la recherche du conjoint idéal, les Françaises sont moins nombreuses à s’adonner aux joies de la maternité avant 30 ans, mais…plus nombreuses à le faire après. Un « effet calendrier » qui aurait pour conséquence statistiqu­e de dégrader l’indicateur conjonctur­el de fécondité pendant quelques années, sans menacer pour autant la démographie tricolore à long terme. « Pour le moment, note le démographe Hervé Le Bras, les femmes ne font pas moins de bébés, elles les font plus tard. Si bien que la descendanc­e finale – c’est-à-dire le nombre d’enfants moyen d’une génération de femmes à la fin de sa période de fécondité – reste légèrement supérieure à 2, autrement dit

au niveau qui permet le renouvelle­ment des générations.» Ce phénomène a en particulie­r été observé dans les années 1990 : l’indice conjonctur­el de fécondité était tombé à un niveau encore plus bas qu’aujourd’hui (1,68 pour la France entière en 1994), sans que la descendanc­e finale change.

Pourquoi n’en irait-il pas de même à présent ? « Mon hypothèse est que la descendanc­e finale va se maintenir à un bon niveau, d’autant que le nombre de naissances devrait repartir avec la reprise économique», indique Laurent Toulemon. Un optimisme que ne partage pas l’unaf : « Personne ne peut prévoir avec certitude ce que feront les femmes à l’avenir, mais une chose est certaine, la vie féconde est limitée. Quand le premier enfant est remis à plus tard, le risque est de ne jamais en avoir un deuxième ou un troisième. » A fortiori, quand on sait que la fertilité des femmes chute après 30 ans et que, chez les hommes, la qualité du sperme décline dangereuse­ment depuis plusieurs décennies, selon l’agence Santé publique France.

L’avenir de la nation

Dans l’hexagone, la politique familiale a une autre caractéristique : elle est depuis toujours l’objet d’affronteme­nts En 1971, presque 900 000 naissances avaient été enregistré­es en France, contre 767 000 en 2017, outre-mer compris.

passionnel­s à propos de l’avenir du pays, son identité, sa capacité à tenir son rang dans le monde... Un particular­isme lié à l’histoire. « En 1800, la France était le pays d’europe le plus peuplé avec la Russie, et Napoléon dominait le continent, note Hervé Le Bras. Puis nous nous sommes fait rattraper par l’allemagne, l’angleterre et l’italie, avant de perdre l’alsace-moselle et de subir la débâcle de 1940. Ces traumatism­es ont convaincu les politiques que la natalité déterminait l’avenir de la nation. »

Guillaume Chiche en a fait récemment l’expérience. Au printemps dernier, le jeune député de La République en marche (parti centriste) – et ancien socialiste – émet, dans un très documenté « Rapport d’informatio­n sur la politique familiale », une série de propositio­ns, dont l’une fera les gros titres. Son idée ? Rassembler tous les fonds disponible­s dans une seule enveloppe et les moduler selon les revenus, afin d’aider en priorité les familles modestes. Une nécessité, selon lui, « dès lors que 20 % des enfants vivent sous le seuil de pauvreté ».

« Il existe en Europe plusieurs visions de ce qu’est une politique familiale juste, rappelle Laurent Toulemon. En France, on considère que le pouvoir d’achat d’un foyer ne doit pas diminuer lorsqu’arrive un enfant, et c’est la raison d’être du quotient familial. Au Royaume-uni, on aide exclusivem­ent les familles pauvres. En Europe du Nord, on s’occupe de tout le monde, en mettant à la dispositio­n de chacun des ” biens publics ”, comme des places en crèche et des congés parentaux d’un montant équivalant à 76 % du salaire. » Dans tous les cas, il s’agit d’équité, mais ce n’est pas tout à fait la même...

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De plus en plus de couples choisissen­t de ne faire qu’un seul enfant afin de l’élever dans les meilleures conditions possibles.
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