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PHILIPPE VILLENEUVE Architecte en chef de Notre-dame

« Je pense Notre-dame, matin, midi et soir. C’est obsessionn­el. »

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À7 ans, Philippe Villeneuve reçoit en cadeau un livre illustré sur les cathédrale­s. Un véritable coup de foudre qui va déterminer toute son existence. Plus tard, à 16 ans, il se lance dans la réalisatio­n d’une maquette de Notredame en balsa. Un travail d’une précision inouïe qui l’occupera pendant deux ans. Architecte en chef des monuments historique­s depuis 1997, il devient, en 2013, à l’âge de 50 ans, architecte en chef de la restaurati­on de Notre-dame. La force du destin…

À ce poste, Villeneuve va encore approfondi­r la connaissan­ce qu’il a de l’édifice. Une connaissan­ce qui a quelque chose de fusionnel. « Quand j’entre dans la nef, j’ai l’impression de me dilater et d’épouser les parois de pierre. » En vérité, Villeneuve a bel et bien épousé la belle dame de pierre intemporel­le : ne s’est-il pas fait tatouer une rosace à la place du coeur ? Lui-même confesse un côté un peu illuminé quand il s’agit de « sa » cathédrale. Puis, le 15 avril 2019, tout bascule. La cathédrale brûle.

Il est anéanti. Il dit même entrer dans une sorte de coma où tout devient irréel. Ses proches collaborat­eurs pensent qu’il ne se relèvera pas. Les premiers instants, il ressent en effet une souffrance épouvantab­le. Il a le sentiment de vivre un cauchemar éveillé. Mais très rapidement, c’est le sentiment d’être désormais investi d’une mission sacrée qui prend le dessus sur l’accablemen­t : « Je me suis aperçu que le 15 avril, j’avais rencontré mon destin. Que tout ce que j’avais fait avant, c’était pour ça. »

Le lendemain, tandis qu’il erre parmi les décombres calcinés, il tombe sur la girouette en forme de coq que Viollet-le-duc avait placée au sommet de la flèche, et la ramasse. Elle aurait dû fondre dans la fournaise, mais elle est presque intacte.

Un miracle. Villeneuve le sent comme un appel symbolique à poursuivre sa tâche jusqu’à replacer le coq sur la nouvelle flèche.

Quand certains s’étonnent qu’il ne donne pas sa démission après l’incendie – en tant qu’architecte, il est judiciaire­ment responsabl­e de tout ce qui peut se passer dans la cathédrale –, Philippe Villeneuve rétorque qu’il n’y a pas songé une seconde. Il ne pense qu’à sauver Notre-dame. Et qui d’autre que lui pourrait mener à bien ce travail colossal de restaurati­on ? Il est d’ailleurs rapidement confirmé dans cette mission par le ministère de la Culture.

Depuis, Villeneuve donne 100 % de son temps et de son énergie à la cathédrale, devenue pour lui « le monument universel ». Et selon lui, ce monument ne peut être refait qu’à l’identique. En respectant les bâtisseurs qui l’ont précédé : Maurice de Sully, homme d’église à l’origine de la constructi­on de la cathédrale, et Violletle-duc pour lequel il a une admiration sans borne.

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