En flammes
Vom Feueralarm bis zum Eintreffen der Feuerwehr verging kaum Zeit. Aber die Katastrophe war nicht aufzuhalten.
Le lundi 15 avril 2019 aurait pu être un jour tout à fait normal dans la longue vie de Notredame… Des 15 avril, elle en a déjà connu beaucoup ; et celui-là s’annonce tranquille. Il fait beau. Les touristes sont au rendez-vous – près de 30 000 la visitent chaque jour –, s’émerveillent de sa façade, de ses tours, de ses vitraux, de ses voûtes et de sa nef. Dans les rues adjacentes, les magasins de souvenirs où l’on peut se procurer t-shirts, affiches, maquettes de la cathédrale et colifichets ne désemplissent pas. La vue d’un gigantesque échafaudage autour de la flèche de Viollet-le-duc, objet d’importants travaux de restauration, gêne malgré tout un peu l’oeil. Les travaux doivent durer trois ans. Le 11 avril, les statues des 12 apôtres et des quatre évangélistes qui l’entourent ont été enlevées pour être restaurées.
De la fumée sous la charpente
La cathédrale n’est pas un musée : c’est un lieu de culte. Trois messes y sont célébrées chaque jour. À 17 h 45 débutent les vêpres. Les touristes se mêlent aux quelques fidèles qui assistent à l’office. La voix du prêtre, qui entame le sermon, couvre les murmures et les pas feutrés des visiteurs. Rien ne semble annoncer le drame à venir… Pourtant, à 18 h 20, des capteurs placés sous la toiture de la cathédrale ont détecté un point de chaleur anormal. Une alarme se déclenche aussitôt. Il s’agit le plus souvent de fausses alertes. Mais la messe est suspendue, comme le veut le règlement. Les touristes et les fidèles sont invités à sortir rapidement de l’édifice. Un employé de la sécurité est envoyé dans la toiture pour une ronde de routine. Il aperçoit de la fumée au milieu de la charpente et, déjà, quelques flammes. Cette fumée, la maire de Paris, Anne Hidalgo, la distingue aussi de son bureau – l’hôtel de Ville n’est qu’à quelques centaines de mètres de Notredame. Elle fait immédiatement appeler les pompiers par sa secrétaire. Prévenus par le service de sécurité de Notre-dame, ils sont déjà en route. La caserne est tout près : quelques minutes seulement après avoir été alertés, ils sont déjà sur les lieux.
Les touristes massés sur le parvis de la cathédrale ont les yeux rivés sur la toiture de Notre-dame. L’incendie évolue très vite. La flèche est encerclée de flammes rougeoyantes et d’une épaisse fumée noire doublée d’un nuage jaune menaçant dû aux émanations du plomb en fusion.
Aussitôt arrivés, les pompiers se ruent vers l’escalier en colimaçon de la tour nord d’où ils pensent pouvoir atteindre le coeur de l’incendie avec leurs lances à eau. Mais en vérité, c’est une vision d’enfer qui les attend : la totalité du toit est en feu ; la couverture en plomb de la toiture est en train de fondre ; les poutres tombent les unes après les autres dans la nef dans un fracas terrible. Les soldats du feu réalisent vite qu’il faudra beaucoup plus d’hommes et de moyens pour avoir une chance de limiter l’embrasement de la cathédrale.
Le feu est maintenant déclaré depuis une heure, et il a déjà consumé 1000 mètres carrés de la charpente. La chaleur est effroyable : 300 degrés ! Jusqu’à 700 degrés au coeur de la fournaise… Et soudain, la flèche s’effondre. La foule atterrée la voit se plier et plonger à pic à l’intérieur de la cathédrale. Ces images font le tour du monde en direct. La « vieille dame » est en train de céder. Les pompiers qui se
trouvent encore dans la tour nord sont pressés de quitter au plus vite les lieux. Mais l’effondrement de la pointe a provoqué un immense effet de souffle qui referme les portes sur eux, les bloquant à l’intérieur de l’édifice. Une équipe de secours est envoyée pour les délivrer. On est passé à côté du pire.
Des images glaçantes
Il est presque 20 heures. Une tente de commandement a été sommairement installée sur le parvis de la cathédrale. C’est maintenant au tour d’un pompier à la mission particulière d’entrer en scène : le dessinateur opérationnel. Son rôle consiste à réaliser des croquis du sinistre en trois dimensions. Selon l’architecture du bâtiment en question et la direction du vent, ses dessins permettent d’imaginer la progression du feu. Dans le cas précis de Notre-dame, l’intervention du pompierdessinateur sera cruciale pour sauver l’édifice. Les pompiers changent complètement de stratégie pour se concentrer principalement sur le sauvetage de la tour nord. Si elle brûle, tout le bâtiment risque de s’écrouler.
À l’élysée, Emmanuel Macron vient de finir d’enregistrer un discours dans lequel il doit annoncer des mesures censées calmer le mouvement des Gilets jaunes. Sa diffusion est prévue dans les journaux télévisés de 20 heures. C’est-à-dire dans quelques minutes. Le président l’annule et décide de se rendre sans attendre à Notredame. Il y est accueilli par le général Gallet, qui commande les opérations. Le général lui fait un point complet de la situation. Il est très pessimiste. Les moyens déployés sont insuffisants. Une centaine de lances d’incendie seraient nécessaires pour avoir une chance d’éteindre ce feu monstrueux qui ne cesse de progresser. Mais seules une vingtaine sont en action.
À l’intérieur de Notre-dame se trouvent des oeuvres d’art importantes et de précieuses reliques, dont la plus révérée par les chrétiens : la Sainte Couronne que le Christ aurait portée sur le chemin de croix et lors de sa crucifixion. D’une valeur inestimable, plus spirituelle que matérielle, elle est à l’abri dans un coffrefort garanti contre le feu, lui-même placé dans un meuble blindé en verre rouge. Le père Jean-marc Fournier, aumônier des sapeurs-pompiers de Paris, se porte volontaire pour cette mission périlleuse. Car le coffre se trouve derrière le choeur, à l’endroit le plus dangereux de la cathédrale.
Un drone de la police est envoyé en repérage au-dessus de l’incendie. Les images que ses caméras thermiques envoient sont glaçantes. La totalité de la charpente s’est écroulée et les deux beffrois menacent de s’effondrer malgré le combat sans merci que les pompiers mènent contre le feu. Au milieu du vacarme de l’incendie, des chutes d’objets et des sirènes de pompiers, s’élève soudain le son des cloches de toutes les églises de Paris. Assemblés à l’extérieur de la cathédrale, des fidèles entonnent un ave Maria.
À 23 heures, enfin…
Il est 20 h 30 quand les premières oeuvres sont évacuées. Mais pour la Couronne, il faut encore patienter. Le coffre qui la contient s’ouvre avec un code. Or, le père Fournier ne le connaît pas. C’est un sacristain qui finira par l’envoyer par texto… Toutes les reliques seront finalement sauvées : la Sainte Couronne, un morceau de la Croix, ainsi qu’un clou qui aurait servi à crucifier le Christ, et la tunique de Saint Louis.
Peu avant 23 heures, le général Gallet annonce que les «deux tours de Notredame sont sauvées » et que sa structure est « sauvée et préservée dans sa globalité ».
Mais le spectacle de la cathédrale dévastée par le feu est insoutenable. Le président Macron, de nouveau sur place, s’avance à l’intérieur du bâtiment. Personne ne s’exprime. Le premier ministre, Édouard Philippe, qui l’accompagne, est ému aux larmes.
Les pompiers ne quitteront définitivement les lieux qu’à 10 heures le lendemain matin, après avoir lutté pendant quinze heures pour sauver l’un des joyaux de l’architecture mondiale.