PERSONNALITÉ
La voix des interprètes afghans Sie ist Anwältin und kämpft für das Recht afghanischer Dolmetscher. Ihnen hatte die französische Armee während ihres Aufenthalts im Land zahlreiche Versprechungen gemacht hatte.
Caroline Decroix
La grande muette –tel est le surnom donné à l’armée française – porte décidément bien son nom. Caroline Decroix se bat depuis des années contre le silence de l’armée française dans l’affaire de l’absence de protection des interprètes afghans. Mais quelle est cette histoire scandaleuse, étouffée par l’état français ?
C’est un court article dans La Croix qui, en 2015, retient l’attention de cette avocate. « Je suis restée scotchée dessus pendant dix minutes, expliquera-t-elle en 2019 dans les colonnes du même journal. Lire que ces interprètes menacés n’avaient même pas accès à l’ambassade à Kaboul alors qu’ils avaient bossé pour l’armée, ça m’a hérissé les poils sur les bras. »
Quatre ans après avoir lu cet article, elle témoignait à son tour, en tant que vice-présidente de l’associaton des anciens interprètes afghans de l’armée française, et comme fondatrice d’un collectif d’avocats bénévoles pour les défendre. En plus de son activité dans son propre cabinet d’avocate, cette travailleuse acharnée a mis bénévolement ses compétences de juriste au service d’hommes victimes d’une « injustice criante » : entre 2001 et 2014, l’armée française a employé plus de 700 interprètes afghans pour les besoins de ses interventions militaires en Afghanistan. Des hommes à qui elle promet la libération prochaine de leur pays, qui serait en partie possible grâce à leur contribution. Mais en 2014, l’armée française quitte le pays dans une situation instable. C’est le début du cauchemar pour les collaborateurs afghans qui, considérés comme des traîtres par les talibans, sont menacés dans leur propre pays. En danger de mort, les interprètes font des demandes de droit d’asile en France... qui restent sans réponses. Craignant de voir des arrivées massives de collaborateurs d’autres pays, l’état rechigne à accepter ces dossiers dans l’urgence. Seuls 173 interprètes afghans ont reçu un visa.
Caroline Decroix, qui élève seule ses trois filles, ne compte pas ses heures. Pourtant, la défense de ces hommes, « c’est une lutte qu’elle n’abandonnera jamais ». Depuis toujours, la jeune femme a le combat chevillé au corps : « Je n’ai pas choisi mon métier par hasard, explique-t-elle encore à La Croix. Dans la cour de l’école, j’étais déjà l’avocate des exclus. »
« L’état français ne veut pas aider les gens qui l’ont servi. Il veut les utiliser. »