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LE BRACELETSE­RPENT À

Gemälde, Fotos, Skulpturen… Auf diesen Seiten befasst sich Écoute mit Kunstwerke­n jeder Art. Diesmal: de Georges Fouquet ET ALFONS MUCHA

- VON CHAKRI BELAÏD

la veille de Noël 1894, un imprimeur parisien reçoit un appel inattendu : Sarah Bernhardt, la célèbre comédienne, souhaite lui commander des affiches pour sa prochaine pièce qui se joue dans dix jours ! Les dessinateu­rs étant en vacances, c’est un inconnu qui s’en charge : un artiste tchèque du nom d’alfons Mucha. Les jours suivants, Paris se couvre d’affiches où la tragédienn­e incarne Gismonda, figure centrale d’un drame lyrique. Sarah Bernhardt est conquise et passe contrat avec l’illustrate­ur. Sur ses futures affiches, l’artiste la représente souvent en femme fatale, comme sur celle de la pièce Médée. La star y joue une femme amoureuse qui sème le feu et la destructio­n contre ses ennemis (photo noir et blanc ci-contre). Sur cette affiche (ci-contre), le bracelet-serpent qui enlace le bras gauche de Médée attire l’attention de l’actrice. Folle de bijoux, elle demande aussitôt au joaillier Georges Fouquet de lui donner vie. Avec l’aide de Mucha, bien sûr.

Ensemble, les deux artistes vont créer un chefd’oeuvre de la bijouterie Art nouveau (ci-contre), un courant d’art très ornemental inspiré de la nature. Doté de charnières invisibles, le corps du serpent embrasse délicateme­nt le bras. Reposant sur la main, sa tête montre des yeux incrustés de rubis et des écailles en plaques d’opale bleue. Dans sa gueule, il tient des chaînettes qui le relient à une bague surmontée d’une deuxième tête de serpent. Symbole de vie, de sexualité et de drame, l’animal est un motif ancien de la joaillerie. Mais avec les bijoutiers Art nouveau, il retrouve toute sa splendeur : ses écailles miroitent, son corps ondule, s’enroule, se contorsion­ne, comme autant de mouvements sensuels.

Sarah Bernhardt inspira les bijoutiers les plus audacieux de la Belle Époque. Mais ses goûts ne la portaient pas vers de quelconque­s créations. La diva portait surtout des bijoux inspirés de femmes séduisante­s, inquiétant­es, voire démoniaque­s, qu’elle incarnait sur scène. Elle porta le bracelet-serpent dans la pièce Médée, puis pour un autre rôle de femme fatale, celui de Cléopâtre qui fut mordue… par un serpent.

Bien plus tard, accablée de dettes, la comédienne dut vendre son bijou venimeux. Ainsi, il passa de mains en mains, jusqu’à orner le bras d’un autre monstre sacré: l’actrice Marlene Dietrich. Celle-ci l’acquit vers 1966, avant de devoir le revendre à son tour en 1987. Pour cause de dettes, elle aussi.

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 ?? ?? Le bracelet-serpent est exposé au musée Alfons Mucha de Sakai, au Japon. D’autres réalisatio­ns de Georges Fouquet sont exposées au Petit Palais, à Paris, dans le cadre de l’exposition Paris 1900.
Le bracelet-serpent est exposé au musée Alfons Mucha de Sakai, au Japon. D’autres réalisatio­ns de Georges Fouquet sont exposées au Petit Palais, à Paris, dans le cadre de l’exposition Paris 1900.

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