Les Proud Boys nous montrent une nouvelle image du terrorisme
Ça y est : les Proud Boys sont officiellement considérés comme un groupe terroriste par le gouvernement canadien. Ce regroupement, d’allégeance néofasciste d’après Ottawa, fait la démonstration que l’image pleine de clichés qui circule sur les terroristes est loin d’être la seule qui correspond à la réalité. Voici quelques notions que nous rappelle cette affaire.
PAS DE COULEUR DE PEAU
C’est évident, mais il faut le dire quand même : les terroristes peuvent avoir n’importe quelle couleur de peau.
« Il n’y a pas de visage typique du terroriste : le terrorisme, c’est un mode d’action. Ce n’est pas quelque chose de culturel, de régional ou de religieux. Toutes les idéologies peuvent donner naissance à des groupes qui utilisent le terrorisme », explique Louis Audet Gosselin, l’un des directeurs du Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence (CPRMV).
Mais alors, pourquoi est-ce que la majorité des entités terroristes sur la liste canadienne sont de confession musulmane ? Entre autres parce qu’en ce moment, la mouvance djihadiste est très active à travers le monde et que le climat politique instable du Proche-orient favorise le recours à la violence pour obtenir gain de cause, nous a expliqué Rachad Antonius, professeur associé de sociologie à L’UQAM et expert sur le Proche-orient.
PLUS D’ENTITÉS BLANCHES
Le nombre d’entités terroristes principalement blanches a augmenté en flèche sur la liste canadienne au cours des deux dernières années. Sur les 73 groupes qui sont sur la liste, il y a six groupes principalement blancs, et ils ont tous été ajoutés au cours des deux dernières années. En 2019, deux organisations néonazies y ont fait leur entrée : Combat 18 et Blood & Honour.
Les Proud Boys viennent d’y être ajoutés et sont généralement considérés par les agences américaines de lutte contre le terrorisme comme des suprémacistes blancs, même si leur leader actuel est d’origine cubaine.
« Ça vient confirmer l’essor, au cours de la dernière décennie, de groupes extrémistes violents suprémacistes », indique David Morin, titulaire de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violents.
Rachad Antonius souligne que les positions politiques adoptées par les gouvernements peuvent avoir une influence sur l’essor de ces mouvements. Les nombreuses mentions des Proud Boys dans les discours de Donald Trump ont pu donner un sentiment de légitimité au regroupement extrémiste, donne-t-il en exemple.
ÊTRE CLASSÉ COMME TERRORISTE
Être désigné comme groupe terroriste, ce n’est pas banal. En gros, pour correspondre à la définition du Code criminel, il faut mener (ou avoir comme objectif) des « activités terroristes », c’est-à-dire des actes : √ Commis au nom d’un but ou d’une cause de nature idéologique, politique ou religieuse ; √ Ayant pour but d’intimider ou de contraindre une partie de la population ou un gouvernement ;
√ Qui causent des blessures graves à une personne ou la mort de celle-ci, qui mettent des vies en danger ou qui compromettent gravement la santé ou la sécurité de gens.
C’est pourquoi il faut parfois attendre longtemps avant de voir un groupe comme les Proud Boys être ajouté à cette liste.
« [Avant] on pouvait les qualifier de groupes haineux – c’est très grave pour la société, mais ils ne posaient pas de menaces à l’état. Maintenant, ils commencent à poser des menaces, donc ça justifie tout à fait qu’on les classe comme terroristes », explique Rachad Antonius.