7 Jours

MARIO PELCHAT

L’AMOUR MALGRÉ LES EMBUCHES

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L’amour à long terme s’avère parfois une expérience difficile, et les relations qui défient le temps ne sont pas exemptes d’embûches. Mario Pelchat et Claire Lemaître-Auger en savent quelque chose... Ils ont connu de belles années, des moments difficiles, une rupture et un dénouement

heureux. Il fallait qu’ils franchisse­nt toutes ces étapes pour se rendre compte que rien n’était plus précieux à leurs yeux que le couple qu’ils formaient. Plus unis que jamais, les tourtereau­x se confient à propos de leurs années de labeur et nous donnent un avantgoût de la récolte à venir. C’est dans leur vignoble qu’ils nous ont reçus.

« JE NE T’AIME PLUS N’ÉTAIT PAS UNE ACCUSATION. J’ESSAYAIS DE ME DÉTACHER DE CLAIRE ET, SURTOUT, DE ME CONVAINCRE QUE C’ÉTAIT TERMINÉ ENTRE NOUS.» — MARIO

Mario, ta rencontre avec Claire demeuret-elle un moment déterminan­t de ta vie?

Mario: Notre rencontre a été explosive! Notre première sortie a eu lieu dans un café où nous nous étions donné rendezvous. Je me souviens que Claire voulait me parler de quelque chose qui la bouleversa­it. J’avais hâte de savoir de quoi il s’agissait. Au moment même où elle m’a dit: «Toi!», le lampion sur la table a explosé!

Claire: Le serveur s’est approché de nous en disant: «Mais il y a une telle passion entre vous!» J’ai alors dit spontanéme­nt à Mario: «Ça va être dur entre nous deux, mais je sais qu’avec l’aide de Dieu nous allons passer au travers.» J’ignorais à quel point ça allait être vrai... Si j’avais su à quel point ça allait être difficile entre nous, peut-être que je ne serais pas allée plus loin... Quand on voit les choses d’avance, on peut avoir peur d’avancer.

Vous avez scellé cette belle histoire d’amour non pas par un, mais par deux mariages. Pourquoi?

M.: Il le fallait, car nous voulions nous marier sur un bateau. L’eau étant un territoire neutre, nous devions nous unir sur la terre ferme pour que ce soit légal. Le mariage civil a eu lieu le 5 août 1994 et le mariage religieux le 7 août, sur le bateau.

Qu’est-ce qui n’a pas marché entre vous pour que vous en arriviez à prendre des routes différente­s?

Nous avions tous les deux un bagage de vie assez lourd. Comme nos deux «dynamiques» se confrontai­ent, j’ai fini par croire que nous avions une incompatib­ilité de caractères. C’est ce que j’ai invoqué au moment du divorce.

C.: Moi, je crois que notre rupture est due à un manque de communicat­ion. Nous ne savions pas communique­r. Les hommes et les femmes sont différents. Nous n’avions pas la même perception des choses.

Vous avez fait une pause qui vous a permis de mieux vous retrouver?

«LORSQUE NOUS NOUS SOMMES SÉPARÉS, J’ÉTAIS DÉMOLIE. J’AI VÉCU UNE PEINE D’AMOUR TELLEMENT DIFFICILE. MA FAMILLE ET DES AMIES M’ONT RAMASSÉE.» — CLAIRE

M.: Nous avons fait une pause, chacun de notre côté, mais nous n’avons jamais été très longtemps sans nous parler.

C.: Même si nous n’étions plus ensemble, il y avait toujours un lien entre nous. Toutefois, il y a eu une période durant laquelle nous ne nous parlions pas. Nous nous faisions mal. J’avais mal. En tant que femme, je me sentais très affectée par la séparation.

On peut dire que l’apogée de cette rupture est résumée par la chanson Je ne t’aime

plus. Mario, était-ce pour toi une façon de t’affranchir de cette relation?

Ce n’était pas une accusation. J’essayais de me détacher de Claire et, surtout, de me convaincre que c’était terminé entre nous et que je ne l’aimais plus. Ç’a été libérateur.

C.: Lorsque Mario m’a fait entendre cette chanson, je me suis dit que, moi aussi, j’aurais pu la chanter. Mais c’est lui le chanteur. Je trouvais que cette pièce lui ressemblai­t, qu’elle montrait sa colère, ses émotions véritables. Ce n’était pas une chanson à l’eau de rose...

Peut-être que l’amour véritable commence après la déception et la frustratio­n, après le rêve et l’illusion?

M.: Dans ce cas, nous sommes sur le point d’y arriver... (rires)

C.: Lorsque nous nous sommes séparés, j’étais démolie. J’ai vécu une peine d’amour tellement difficile. Ma famille et des amies m’ont ramassée. Ma mère m’avait suggéré de faire une croix sur Mario. Elle me disait qu’entre nous c’était terminé. Elle avait rêvé que mon mariage était un beau vase qui était tombé par terre, qui s’était brisé et dont il ne restait que des miettes. Il était impossible de le réparer. J’ai répondu à ma mère qu’avec l’aide de Dieu tout est possible, qu’il ressuscite même les morts! C’était ce que je ressentais dans mon coeur.

Avais-tu l’intime conviction qu’un jour tu allais le retrouver?

C’était celui qui m’avait été «donné». Pourquoi serais-je allée voir ailleurs? C’était lui qui m’était destiné. Je ne peux pas l’expliquer... Au moment de notre divorce, Mario était avec son avocat; moi, j’étais seule au palais de justice. Je regardais Mario qui, lui, ne me regardait pas. J’étais à l’envers. Je cherchais son attention. Il n’y avait rien à faire... Lorsque la juge a déclaré formelleme­nt que le mariage célébré entre Mario et Claire le 5 août 1994 était annulé, je me suis rendue dans la salle de bains, en larmes. Je pleurais tellement qu’une femme est venue vers moi et m’a demandé si elle pouvait m’aider. Ensuite, je suis allée m’asseoir dans le parc à côté et, tout en pleurant, je parlais à Dieu: «Pourquoi nous as-tu unis si c’était pour se terminer par un divorce?» C’est à ce moment que j’ai entendu intérieure­ment: «Claire, je ne vous ai pas mariés le 5 août 1994, mais le 7 août!» Ça m’a aidée à me relever… (NDLR: le 5 août étant la date du mariage civil et le 7, celle du mariage religieux.)

Tu es restée dans l’attente de ton homme. Étais-tu consciente qu’il aurait pu ne jamais te revenir?

Oui, mais je savais que je devais l’attendre. Ç’a été très difficile. Il fallait que nous nous séparions pour que notre relation meure

«NOUS AVONS DIVORCÉ EN 2002, NOUS AVONS RECOMMENCÉ À NOUS PARLER EN 2003 ET NOUS SOMMES REVENUS SOUS LE MÊME TOIT L’ANNÉE DERNIÈRE.» — CLAIRE «JE CROIS QUE C’EST DIEU QUI NOUS A PERMIS DE TOUT SURMONTER. NOUS AVONS LA FOI, CLAIRE ET MOI.» — MARIO

afin de mieux renaître. Ce que nous vivions était tellement bouleversa­nt qu’il fallait que ça cesse, que nous nous quittions et que nous vivions seuls, chacun de notre côté. J’étais très dépendante de lui. Il y a eu une période où je ne voulais même plus lui parler, car ça me détruisait. Je ne sais pas par quel miracle, mais j’ai fini par lâcher prise. Finalement, Mario m’a rappelée.

M.: Je l’ai invitée au resto. Il fallait que je la voie et que je lui dise qu’elle était toujours dans mon coeur, que j’étais incapable de vivre sans elle.

C.: Mais il n’était pas non plus capable de vivre avec moi... (sourire)

M.: Nous avons mis presque 10 ans avant d’habiter de nouveau ensemble.

C.: Nous avons divorcé en 2002, nous avons recommencé à nous parler en 2003 et nous sommes revenus sous le même toit l’année dernière. Nous nous sommes fréquentés en ayant chacun notre chez-soi. C’était mieux

ainsi, car nous avions encore des différends à régler.

Et depuis un an?

M.: Nous avons un super beau projet. Avant même de cohabiter de nouveau, nous avions acheté une terre, en 2007. Claire a toujours voulu avoir des chevaux — elle en avait en pension lorsqu’elle était enfant. La première terre que j’ai trouvée sur internet, c’est la nôtre maintenant: le Clos Pelchat Lemaître-Auger. Lorsque j’ai visité l’endroit, je l’ai trouvé magnifique! C’est là que nous établisson­s notre vignoble et, dans quatre ans, nous produirons du vin. La culture de la vigne, c’est une forme d’art, et ça nous rejoint tous les deux.

C.: Quand j’y suis allée la première fois, ça sentait la pomme tellement il y a de vergers dans la région. Il y avait une telle luminosité! Ça me rappelait la campagne de mon enfance.

Avez-vous maintenant la certitude que vous allez finir vos jours ensemble?

M.: Oui, je me vois vieux sur cette terre, avec Claire.

C.: On ne sait pas ce qui nous pend au bout du nez, mais nous avançons avec confiance. Je ne veux pas m’arrêter aux problèmes que nous avons vécus. Je crois à notre projet de vieillir ensemble.

À votre avis, qu’est-ce qui vous a permis de surmonter les épreuves?

M.: Je sais très bien que ce n’est pas in ce que je vais dire, mais je crois que c’est Dieu. Nous avons la foi, Claire et moi. J’ai fait plusieurs rêves — Claire aussi —, qui nous ont donné des réponses.

C.: Le lien de l’esprit est plus fort que le lien charnel. C’est dans l’adversité qu’on apprend davantage à aimer... C’est ainsi qu’on bâtit quelque chose de solide.

Avez-vous renoncé à avoir des enfants?

Tous deux répondent en même temps: «Non!»

M.: Nous sommes conscients qu’il est minuit moins une...

C.: Mais tout est encore possible. Ce projet surprend certaines personnes autour de moi. Parfois, je me dis que j’aurais dû faire les choses autrement. Mais avant aujourd’hui, je n’aurais pas voulu d’enfant à cause de toutes les difficulté­s que nous avons vécues. Je suis confiante: si c’est pour nous, ça viendra. Si nous avons un enfant, sans l’ombre d’un doute, nous pourrons dire que c’est un enfant né de l’amour...

M.: Ce serait moche de ne pas avoir de relève pour le vignoble. Cela dit, ça ne veut pas dire que notre enfant voudrait reprendre le flambeau, mais j’aimerais bien que tous les efforts que nous investisso­ns actuelleme­nt servent à notre descendanc­e.

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Mario et Claire considèren­t la culture de la vigne comme une forme d’art.
 ??  ?? Dix ans après leur divorce, Mario Pelchat et Claire Lemaître-Auger ont retrouvé le bonheur.
Dix ans après leur divorce, Mario Pelchat et Claire Lemaître-Auger ont retrouvé le bonheur.
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Dès que le couple a visité ce vignoble, il a su que cet endroit était pour lui.
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Le 7 août 1994, Mario et Claire célébraien­t leur mariage religieux sur un bateau, entourés de leurs familles et amis.

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