7 Jours

Martin Perizzolo

LE 5 À 7 DE ROXANNE

- PHOTOS: Bruno Petrozza• Maquillage-coiffure: VéroniqueP­rud’ Ho mm

Martin, à quoi trinquons-nous aujourd’hui? À notre rencontre. C’est important pour moi; je me sens privilégié d’être ici. J’avais hâte! Je ne sais pas pour toi, mais moi, je trouve ça hot d’être ici! (rires) À ton succès, alors! Et à toutes ces années d’apprentiss­age pour en arriver là! Un apprentiss­age qui continue, d’ailleurs. J’apprends tous les jours! Je touche du bois: là, ça va bien, mais tout peut s’arrêter du jour au lendemain... Tu es donc conscient de ta chance et des réalités du métier. Oui; c’est pour ça que je suis aussi prêt à travailler derrière la caméra, je n’ai pas de problème avec ça. En 22 ans, j’ai composé avec les aspects le fun et moins le fun du métier. C’est comme ça qu’on acquiert de l’expérience... Oui et, au moins, ça permet de faire ce qu’on aime même si, bien souvent, on est la seule personne à y croire. On se fait dire: «Tu ne te tannes pas de manger du beurre de pinotte?» As-tu vécu ça? Non, je dois dire qu’on m’a plutôt encouragé. C’est certain que, durant les périodes difficiles, j’ai parfois senti que mes proches auraient souhaité que mon parcours soit plus stable, mais, au fond, ils voulaient simplement mon bien. J’ai un frère qui, lui, a un emploi traditionn­el, avec un revenu fixe. Il m’a aidé à quelques reprises. J’ai aussi eu de l’aide de quelques proches. Pour ceux qui n’évoluent pas dans ce domaine, ça

peut sembler abstrait, mais mon père savait que je faisais ce que j’aimais. Il te comprenait... Mon père est parti d’Italie pour s’en venir ici à 20 ans. Il ne connaissai­t pas la langue; il a appris le français comme un vrai autodidact­e. Il a toujours eu envie de jouer du piano, alors il a appris à l’oreille, et il a ensuite appris à lire la musique. Aujourd’hui, il peut prendre une partition et jouer une pièce qu’il n’a jamais pratiquée auparavant. Ça demande de l’assiduité. C’est un homme hyper brillant. Un objet est brisé? Il va trouver la bonne pièce et le réparer. Il est né dans un village où on encouragea­it peu l’éducation. C’était l’époque de la guerre, la religion régnait... Ça se passait dans sa cour, ce n’était pas une situation outre-mer. Ma mère, elle, est montréalai­se. Tu as donc connu les deux cultures. Oui. Et ma mère a aussi le sens artistique. Elle est curieuse, elle a toujours un projet en tête... Mes parents m’ont donc toujours encouragé. C’est le rôle des parents. Toi, veux-tu des enfants? Je ne pense pas que je vais connaître la paternité, non. J’ai déjà été en couple avec une femme qui ne voulait pas d’enfants, et c’est comme si j’en avais fait mon deuil. J’ai 41 ans, je suis célibatair­e, je travaille beaucoup et je sais que les deux ou trois prochaines années vont être très occupées. Je reste ouvert, mais je me torture déjà simplement en écrivant un spectacle, alors j’ai du mal à imaginer dans quel état je serais si, en plus, je ne dormais que deux heures par nuit! De plus, mes parents vieillisse­nt, et j’ai envie de m’occuper d’eux. On dirait que les choses se sont tramées comme

En tournée avec son premier one man show!

ça pour moi, et je me sens assez bien là-dedans. Tu es sorti de l’École nationale de l’humour (ÉNH) en 1995. Ça fait 22 ans, mais on dirait qu’on apprend tout juste à te connaître... J’avais 19 ans quand j’ai terminé mes études à l’ÉNH. Au début, je travaillai­s comme auteur. Un gars, une fille m’a permis de gagner ma vie sans qu’on me voie sur une affiche. Moi, mon but, ce n’est pas d’être connu, mais d’exercer mon métier. Cela dit, être connu permet de passer à une autre étape. J’ai donc changé mon approche, parce que si je voulais continuer à évoluer, je devais montrer mon visage un peu plus. C’est ce qu’on sent chez toi: tu sais ce que tu dois faire et tu t’y appliques. Je ne sais pas trop, en fait. Je suis tellement occupé, ces temps-ci! J’en suis content, mais ça fait que je n’ai pas beaucoup de recul et que je ne me pose pas trop de questions. Après tout ce temps-là, on arrête de se questionne­r, on apprécie les belles choses qui nous arrivent et on apprend à gérer les aspects qu’on aime moins. Il y a aussi une maturité qui s’installe avec le temps. L’homme de 41 ans que tu es est loin de celui que tu étais à 25 ans... Tout à fait! Je comprends pourquoi tout ça m’arrive maintenant, et non à 25 ans. Ç’aurait été n’importe quoi à l’époque; je n’avais aucune idée de qui j’étais! Même sur le plan physique, je me trouvais difforme. Les yeux globuleux, les cheveux longs... J’étais horrible! Et je suis très réaliste en disant ça. Disons que c’était mieux que je travaille derrière la caméra. (rires) Mais là, je travaille à mon premier one man show. Je suis en rodage et je travaille fort à l’écriture. Je suis entouré d’une équipe formidable: Evenko est derrière moi. Tu vis une belle période sur le plan profession­nel. Tu prépares ton spectacle, tes publicités pour les fromages d’ici fonctionne­nt bien, tu collabores au talk-show Maripier... J’ai accepté de participer au show de Maripier Morin parce que je m’entends bien avec elle. On s’était rencontrés sur le plateau d’une émission matinale et on avait vraiment eu du fun en ondes. Quelques années plus tard, on m’a appelé pour me parler de l’émission. Je suis allé rencontrer l’équipe, et on avait encore du fun. L’important, dans cette émission, c’est Maripier. Je suis là pour la seconder, pas pour me faire valoir. Dans Les beaux malaises, ton personnage avait parfois un rôle ingrat... Non, je trouve que c’est un beau personnage. Ça me demandait parfois de puiser dans quelque chose de super fragile, mais il prenait quand même sa place et disait des choses qui faisaient réagir et qui faisaient rebondir l’histoire. Il était quand même one of the boys.

J’avais presque mis une croix sur mon désir de devenir humoriste. Puis, finalement, j’ai pris le temps de me trouver.

Martin Matte est un ami de longue date, n’est- ce pas? Oui; on a fait l’école de l’humour ensemble. On était colocatair­es, mais il était un peu comme un grand frère pour moi. J’avais 18 ans, et lui, 25.

Les beaux malaises, c’est comme si ça avait cristallis­é tout ce que j’avais fait auparavant. Ç’a été un gros succès! J’ai été chanceux, mais j’ai aussi créé ma chance. Il y a 10 ans, j’ai pris conscience que je ne m’étais pas encore trouvé en tant qu’humoriste. J’avais besoin de retourner travailler en laboratoir­e, de vraiment aller au bout de qui je suis. Tu voulais trouver ta signature... Oui; j’ai eu cette réflexion quand je travaillai­s avec Martin Petit. Je le regardais aller et j’ai presque mis une croix sur mon désir de devenir humoriste. Je me suis dit que j’allais me concentrer sur l’écriture et rester à l’arrière de la scène. Puis, finalement, j’ai pris du recul et j’ai pris le temps de me trouver. Je ne voulais pas disparaîtr­e complèteme­nt, parce que je devais me faire connaître, mais je voulais prendre le temps d’explorer. Je me suis entouré d’agents de comédiens, j’ai suivi des ateliers de jeu, j’ai analysé mes faiblesses, j’ai travaillé ma diction... J’ai aussi suivi un cours de direction d’acteurs, parce que je voulais comprendre ce que les réalisateu­rs cherchent. Ça m’a beaucoup aidé. J’ai pu démystifie­r plein d’affaires et, par la suite, j’ai eu la chance de travailler avec Francis Leclerc, puis Jean-François Rivard. Je suis en constant apprentiss­age; c’est comme ça que je vois mon métier!

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