LA CHALEUR DES MAMMIFÈRES
De Biz
Le rappeur de Loco Locass publie sa cinquième oeuvre, un roman à la fois dur et touchant sur l’univers de la grève étudiante de 2012.
Comment est née cette idée de dresser le portrait du monde universitaire?
En 2012, la grève étudiante m’a beaucoup impressionné. Quand on écrit des livres, on écrit sur ce qui nous marque. Je savais que j’avais quelque chose à dire sur cette période. Je me suis souvent fait apostropher: «Qu’est-ce qui en reste? Tout ça pour ça?» Il ne reste pas rien. Il reste une génération extraordinaire. Je voulais témoigner, dire aux jeunes: «Vous n’avez pas fait ça pour rien: vous avez changé les perceptions.» Mais j’ai attendu parce que je ne voulais pas témoigner à chaud. Je voulais réfléchir. Cinq ans, ça donne un bon recul.
C’est un personnage très cynique que vous avez créé, et pourtant il est attachant...
Ç’a été un défi de le rendre attachant, car c’est lui qui porte l’histoire. La vie de ce prof d’université part à vau-l’eau. Cynique lui-même, il étudie le cynisme. J’avais le goût d’une histoire qui finit bien pour une fois. Peser sur le piton du malheur... je connais le ressort. J’ai essayé de donner de l’espoir, de raconter ce que j’ai vu, comme ces élèves en soins infirmiers qui soignaient les blessés ou ces étudiants, futurs avocats, qui donnaient des conseils. Ils incarnaient la finalité de l’université! Ils étaient dans la rue et partageaient leurs connaissances.
Vous rendez parfaitement l’univers des professeurs. Comment avez-vous fait?
Mes parents sont profs au cégep. Je sais ce qu’est la vocation, mais je connais aussi les travers de ce métier. Les profs sont profondément humains. Et puis, j’ai étudié cinq ans à l’université, j’ai donc pu observer ce monde-là de l’intérieur. L’université m’a beaucoup marqué. Sur le plan romanesque, on ne connaît pas ce milieu tant que ça. C’est intéressant. Les vieux côtoient les jeunes au quotidien; ils sont forcément eux-mêmes imprégnés des idées nouvelles par osmose. Je suis assez curieux de voir ce que les principaux intéressés vont en penser.