7 Jours

Émile Proulx-Cloutier UNE ANNÉE INTENSE

«Ç’a été une année intense, tumultueus­e»

- PAR STEVE MARTIN • PHOTOS: BRUNO PETROZZA

Dans le film de Jean-François Asselin, le comédien, musicien et père trentenair­e incarne le rôle de Frédéric, un architecte qui voit sa vie profondéme­nt transformé­e à la suite d’une série d’événements et d’une rencontre qui va le mener au bord du précipice. Une fable moderne servant de prétexte à une discussion sur la nature de la transforma­tion et sur l’impact des autres sur nos vies.

«J ’ai l ’impression qu’on est en train de se libérer d ’un carcan, qu’on arrête de se taire pour plaire.»

Émile, tu fais la promotion du film, tu joues dans Boomerang et Faits divers, tu sors un nouveau disque, tu as une famille... As-tu le temps de dormir? Oui! En fait, les tournages sont terminés, et l’album est fini. Donc, à la rigueur, promouvoir le film, c’est le bout le plus simple. Mais c’est vrai que ç’a été une année intense, tumultueus­e. Enfin, je dis «année», mais je ne sais pas à quel moment tout ça a commencé! En plus, j’ai fait un show au TNM, j’ai tourné dans le film La Bolduc, j’ai joué dans Blue Moon, Plan B... Disons que ç’a demandé un certain sens de l’organisati­on. Ç’a été un défi sur le plan de la gestion de l’énergie et du stress, mais il n’y a pas un projet dans le lot dont je ne suis pas fier. Cela dit, pour être franc, c’est vrai que j’aurais préféré que ça se fasse sur une plus longue période! Tu as dit que le personnage de Nous sommes les autres ne te ressemblai­t pas, mais vous avez quelque chose en commun: c’est un créatif, un gars qui fait naître des choses à partir de rien. C’est vrai. C’est aussi un être qui est chargé de doutes au départ. C’est quelque chose que j’aime beaucoup du travail de Jean-François. Il dessine des personnage­s très humains, chargés de défauts, et il le fait avec courage: il met de ses propres démons dans ces personnage­s-là et il l’admet. Et moi, je peux y retrouver des miens aussi, donc nous nous comprenons et nous nous complétons bien. Tu joues un homme qui a vécu une dépression et qui tente de se remettre en selle, mais le défi semble parfois trop grand pour lui.

Oui, et sa façon d’affronter le défi va peut-être le mener à l’autodestru­ction. Mais est-ce qu’il ne ressemble pas à tout le monde à plein d’égards? Est-ce qu’on ne se transforme pas tous par désir de plaire, de manière plus ou moins bien réussie? Ce qu’on achète, ce qu’on porte, les gens avec qui on se tient, est-ce qu’on choisit vraiment en fonction de nos propres désirs ou en fonction des attentes des autres? Si ce n’était pas de notre désir de plaire, peut-être serait-on différents, peutêtre ferait-on de la moto et porteraito­n des tatouages. Ça se peut!

En effet! Sinon, est-ce que, comme Frédéric, tu as de l’intérêt pour le dessin et l’architectu­re?

Je ne dessine pas mais, oui, j’ai de l’intérêt pour l’architectu­re. Ce n’était pas le cas avant. C’est un art grave! Un mauvais film, tu ne le regardes pas, et c’est tout; un édifice raté, tu es pris avec pour 100 ans!

La trame du film tourne autour de l’influence qu’exerce le personnage de Pascale Bussières sur le tien et celui de Jean-Michel Anctil. As-tu déjà toimême vécu une relation où quelqu’un t’a amené à te transforme­r?

Pas au même degré, mais je pense que ça nous arrive tous constammen­t. Il y a des personnes qui, comme je l’ai probableme­nt fait, peut-être sans le vouloir, exigent des choses des autres sans mesurer à quel point elles veulent qu’ils se transforme­nt pour elles. Nous sommes les autres, c’est une fable, mais ça décrit surtout les rapports humains, les rapports sociaux.

Tu as eu la chance, une fois de plus, de tourner avec ton père, Raymond Cloutier. Comment as-tu vécu l’expérience cette fois?

Nous avons souvent eu l’occasion de tourner ensemble. Ça s’est très bien passé. Ç’a été simple, facile... Mon père est un très bon acteur et c’est un gars qui a tellement de métier. Ce n’est pas compliqué pour lui de mettre la rondelle dans le but. Il sait y faire, donc c’était chouette!

Tu lances un nouvel album ce mois-ci. Quel est le thème, le fil conducteur qui t’a inspiré tes nouvelles chansons?

Certaines chansons sont inspirées de ce qui me submerge dans la vie ou, parfois, de ce qui me soulève, ou les deux.

Alors, présenteme­nt, qu’est-ce qui te soulève et te submerge?

C’est drôle, mais c’est la même chose. En ce moment, c’est sûr que, par rapport à mon métier, j’ai l’immense chance de travailler sur des projets vraiment électrisan­ts, et ça me donne des ailes. En même temps, la charge de travail, elle, me donne parfois l’impression que je ne me rendrai pas au bout! Par ailleurs, et ma vie privée n’a rien à y voir, je dirais que la déferlante de témoignage­s sur les réseaux sociaux ces dernières semaines est quelque chose qui m’a troublé.

Tu parles du mouvement #moiaussi?

Oui. Il y a un trop-plein tout d’un coup, qui jaillit de partout, et il ne faut pas juste en prendre acte. Je pense qu’il faut se laisser happer par cette vague-là, par sa violence. Il faut ressentir à quel point elle vient de loin. Ça dure depuis des décennies, des siècles même. Et en même temps, je suis persuadé que ça va finir par nous soulever, par faire de nous des gens meilleurs. Nous allons devoir élever notre conversati­on sur l’amour, sur

« Je suis quelqu’un de pudique.»

le désir, et élever nos rapports. Ça va nous demander de faire preuve de plus d’estime et de respect envers les autres. Ça ne se fera pas sans trouble ni sans vertige mais, en même temps, quand je vois la force du mouvement, je me dis: «Quelle puissance!» On en revient au thème de la transforma­tion, collective cette fois.

Oui, mais c’est une bonne transforma­tion! J’ai l’impression qu’on est en train de se libérer d’un carcan, qu’on arrête de se taire pour plaire. Dans ton premier album, tu ne parlais pas de ta personne: tu racontais plutôt des histoires concernant des personnage­s. Était-ce par pudeur? Avais-tu peur de trop en dire sur toi? Je suis quelqu’un de pudique, oui. Par contre, je pense que je vais plus loin dans le second disque. Il y a encore des histoires, mais aussi des coups de gueule, des chansons qui sont de l’ordre de l’opinion brute, une espèce d’élan, un regard franc sur le monde. Et il y a des confession­s aussi, un peu plus que sur le premier. Et pour la première série de disques sur iTunes, autant physiques que numériques, on va inclure un deuxième album, soit un enregistre­ment live du premier spectacle. Donc, il y aura aussi des chansons inédites, des chansons réarrangée­s et des monologues.

Nous sommes les autres, en salle dès le 10 novembre.

Boomerang, lundi 19 h 30, à TVA. Faits divers, lundi 20 h, à Radio-Canada.

Pour plus d’informatio­ns sur son nouveau disque et ses spectacles à venir: emileproul­xcloutier.com.

« J ’ai l ’immense chance de travailler sur des projets vraiment électrisan­ts, et ça me donne des ailes.»

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 ??  ?? Aux côtés de James Hyndman et de Pascale Bussières.
Aux côtés de James Hyndman et de Pascale Bussières.
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 ??  ?? Il incarne l’antipathiq­ue Richard dans Boomerang.
Il incarne l’antipathiq­ue Richard dans Boomerang.
 ??  ?? Il joue avec Isabelle Blais dans Faits divers.
Il joue avec Isabelle Blais dans Faits divers.
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