7 Jours

Vincent Leclerc ENTRE L’OMBRE ET LA LUMIÈRE

Si son personnage de Séraphin sombre encore un peu plus dans la noirceur cette année, Vincent Leclerc, lui, est toujours aussi avenant et souriant. C’est avec plaisir que nous avons rencontré l’homme derrière le machiavéli­que barbu qu’il incarne.

- Par Marie-Hélène Goulet Photos: Bruno Petrozza

« Le respect des autres est quelque chose dont je suis de plus en plus conscient et que j’essaie de développer davantage.»

Vincent, quel défi vous a posé le tournage de la troisième saison des Pays d’en haut?

Essayer de se renouveler est un défi partagé par l’équipe: la relation entre Alexis et Séraphin est toujours pleine de colère et d’animosité. Alors, comment pouvait-on y apporter d’autres nuances pour la nourrir? J’ai bien senti que le stress des premières saisons était derrière moi en entamant la troisième. J’étais beaucoup plus calme et relax, et ça m’a inquiété.

Pourquoi?

Sans dire que je dois créer dans la douleur, il me faut toujours des doutes et des défis pour ne pas m’endormir sur mes lauriers. Je les ai donc trouvés grâce à une phrase clé de Donatienne, en début de saison, qui dit que Séraphin a changé depuis sa maladie. Je me suis accroché à ça, parce qu’il est clair que depuis qu’il a failli mourir, il est devenu encore plus imprévisib­le. Il s’excuse de moins en moins de ses colères et de sa violence. Ce personnage représente un vrai danger.

Est-ce difficile de jouer cette agressivit­é?

C’est un bonheur à jouer! Je n’ai pas de problème à gérer la violence de mes personnage­s si tout le monde est à l’aise sur le plateau. J’ai beaucoup étudié la noirceur des hommes grâce à mes rôles en anglais. Je garde la lumière pour ma vie personnell­e.

Si vous rencontrie­z Séraphin en chair et en os, de quoi discuterie­z-vous avec lui?

Je me méfierais énormément de lui. J’essaierais de comprendre ce qui le motive et de savoir où il se voit dans les années à venir. C’est certain que son intelligen­ce et son côté manipulate­ur m’intriguera­ient, mais certaineme­nt pas assez pour l’inviter au chalet. C’est un être qui n’a pas beaucoup de façon. Notre discussion serait un exercice cérébral. Je ne voudrais pas de lui comme ami.

Si Séraphin est sombre à ce point, c’est entre autres parce qu’il a été isolé. Son existence a fait de lui ce qu’il est. Qu’est-ce que vos parents vous ont légué pour que vous, vous soyez un être si lumineux?

Le respect des autres. C’est quelque chose dont je suis de plus en plus conscient et que j’essaie de développer davantage.

Comment développez-vous ce trait de caractère?

Je suis, entre autres, le nouveau porte-parole d’une organisati­on qui s’appelle Médecins du monde, à ne pas confondre avec Médecins sans frontière. C’est un organisme qui fait beaucoup de choses à l’étranger, mais aussi à l’échelle nationale, parce qu’il essaie d’aider les gens qui glissent dans les failles de notre système de

santé. À l’aide d’une clinique mobile, des intervenan­ts vont à la rencontre des itinérants, notamment ceux issus des communauté­s autochtone­s qui, pour des raisons évidentes, ne font pas confiance au système. Ils ont aussi une clinique pour migrants qui dessert les gens qui n’ont pas encore de cartesolei­l et leurs enfants, qui sont tributaire­s du statut de leurs parents. Je suis choyé, depuis quelques années, et si ma notoriété peut mieux faire connaître Médecins du monde, ça équilibrer­a mon karma.

L’avarice de Séraphin est maladive. Vous, quel est votre rapport avec l’argent?

J’ai un très bon rapport avec l’argent, même si j’ai des restants d’une éducation où l’on ne parlait pas de ça. Je gagne bien ma vie depuis quelques années. Je ne suis pas riche, mais j’ai la chance d’être à l’aise financière­ment. Je suis toutefois assez économe, comme le personnage. Je n’ai jamais fait de grandes folies, parce que la question n’est pas de savoir si je vais avoir des années difficiles, mais plutôt quand ça arrivera. La vie d’un artiste est faite de hauts et de bas. J’essaie donc d’être intelligen­t en ce qui concerne mes finances. Pour moi, avoir de l’argent est une façon de bien vivre et, de plus en plus, de bien faire vivre les gens autour de moi.

Quelle a été votre plus belle dépense?

C’est probableme­nt l’année d’études que je me suis offerte à Paris, quand je suis parti d’Ottawa. Je venais de travailler deux ans et demi comme comédien fonctionna­ire au Musée des civilisati­ons. J’habitais encore chez mes parents, à l’époque. C’est le cadeau le plus fou que je me suis fait, mais aussi celui qui a eu le plus d’impact sur ma vie.

Quelle influence cette année passée à Paris a eue sur vous?

Cette formation m’a sorti de ma zone de confort. Je me suis colletaill­é à de grands textes. J’ai vu du très bon théâtre et des merdes, aussi. J’ai assisté à des performanc­es d’acteurs excellents et d’autres, moins bons. Ainsi, je me suis rendu compte que le sentiment d’infériorit­é que plusieurs éprouvent, dont moi à ce moment-là, par rapport aux Européens n’avait pas de raison d’être. J’ai réalisé que même si l’on a moins d’histoire, la qualité du théâtre d’ici équivaut très certaineme­nt à celle qui existe en France. Ç’a contribué à détruire mon sentiment d’infériorit­é et à me donner confiance.

Si vous viviez à l’époque des Pays d’en haut, qu’est-ce qui vous manquerait le plus?

Le confort! J’aime le camping et je suis un assez bon gars de bois, mais c’est toujours le fun de retourner chez soi. Le fait d’être dépendant des aléas climatique­s serait difficile aussi à supporter, car notre riche société occidental­e a presque réussi à les contourner.

Qu’est-ce qui vous attend dans les prochains mois?

Je viens de décrocher un rôle dans une série québécoise sur lequel je travaille depuis janvier, dont je ne peux évidemment pas parler. Et je veux apprendre à connaître un peu plus l’organisati­on Médecins du monde, puisque notre associatio­n est récente. Ma blonde

( la comédienne Mélanie Pilon) et moi souhaitons aussi plancher sur un projet de websérie humoristiq­ue.

Comment est-ce de travailler avec Mélanie?

Nous avons déjà travaillé ensemble sur son court métrage, Assises. La différence, c’est que ce projet, c’était le sien. C’était elle le capitaine, et je lui donnais mon opinion comme à n’importe quel autre réalisateu­r. C’était parfait! Là, c’est un projet commun dans lequel il va falloir qu’on définisse nos rôles.

Et que faites-vous quand vous ne tournez pas?

Je lis, je vais au cinéma et au théâtre. Je fais du sport avec ma blonde, aussi. J’ai un bon talent pour brûler mes journées, je pense!

Les pays d’en haut, lundi 21 h, à Radio-Canada.

Pour en savoir plus sur Médecins du monde: medecinsdu­monde.ca

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Vincent et son amoureuse, la comédienne Mélanie Pilon, travaillen­t sur un projet de websérie humoristiq­ue. À suivre!
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PHOTO: BERTRAND CALMEAU
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