7 Jours

Quand un humoriste est aussi comédien

En revenant au Québec, il y a environ un an, Anthony Kavanagh a décidé de repartir à neuf en s’associant avec Marc-André Globensky pour qu’il développe sa carrière de comédien autant en français qu’en anglais.

-

Anthony, qu’est-ce qu’un bon agent pour toi?

L’honnêteté, la franchise et la déterminat­ion. Un artiste doit croire en lui, mais il faut une deuxième personne qui y croit aussi: son agent. Il doit aussi voir plus loin. Je suis mon propre gérant en humour, et quand j’ai rencontré Marc-André, il m’a tout de suite dit qu’on devait séparer l’image de l’humoriste de celle du comédien.

Pourquoi avoir choisi Marc-André comme agent?

AK: Quand je suis revenu au Québec, j’ai demandé à mon entourage qui étaient les bons agents à Montréal. On me nommait toujours les mêmes trois ou quatre noms, et il en faisait partie. Avant de déménager, j’avais appelé un autre agent qui m’a dit que ça prendrait trop de temps pour me ramener dans le milieu et qu’il n’avait pas ce temps-là à me consacrer. C’était honnête de sa part, mais trois semaines après, j’avais déjà quatre offres de publicité, dont les Fromages du Québec. J’ai ensuite rencontré Marc-André au restaurant une première fois, et une deuxième fois à son bureau: on a passé six heures à discuter. J’ai beaucoup ri avec lui!

Est-ce plus facile de travailler avec une vedette populaire comme Anthony?

MAG: En fait, il y a beaucoup de jeunes réalisateu­rs qui ne le connaissen­t pas comme comédien, il y en a même qui ne le connaissen­t pas du tout. Il est parti pendant 20 ans. Pour les jeunes, il est juste le gars des fromages. On a donc commencé par travailler sur le plan de l’image. On a refait des photos qui mettent plus en valeur son côté comédien. Ensuite, on se parle beaucoup. Quand un projet l’intéresse, on prend la meilleure stratégie en fonction des personnes qu’il connaît ou que je connais dans le milieu.

AK: Les jeunes réalisateu­rs me connaissen­t moins, et les plus âgés se disent que je ne vis pas ici ou que je suis un humoriste. Au Québec, il y a encore une certaine barrière entre l’humour et la comédie. Mais un humoriste sur scène joue la comédie, il incarne un personnage qui est seulement une partie de sa personnali­té.

Avais-tu un agent en France? Si oui, utilisait-il la même stratégie?

J’ai eu trois agents au fil des années, et les trois ont été franchemen­t inutiles. En France, ils ont 60 comédiens, mais ils ne s’occupent que des huit qui leur rapportent beaucoup d’argent. En plus, les producteur­s ou les réalisateu­rs vont chercher les humoristes en les contactant directemen­t, c’est plus simple. Par contre, la plus grosse réticence n’était pas que je sois humoriste, mais que je sois noir. Il y a énormément de préjugés envers les comédiens de couleur en France. Ceux qui sont au pouvoir dans le milieu vivent dans un autre temps. J’ai souvent entendu des gens me dire

«Un artiste doit croire en lui, mais il faut une deuxième personne qui y croit aussi: son agent.» — Anthony

que s’ils me prenaient, ils allaient devoir justifier pourquoi le personnage était un Noir.

MAG: C’est différent ici. Actuelleme­nt, il y a vraiment une ouverture pour les comédiens de couleur dans les différents projets qui se montent.

Comment analysez-vous la situation des comédiens actuelleme­nt au Québec?

MAG: Aujourd’hui, il y a plus de rôles offerts, car il y a plus de séries qui se montent, mais les comédiens tournent moins longtemps. Ils travaillen­t donc beaucoup moins. On doit faire de la gestion de crise, car tout le monde veut avoir la même dizaine de comédiens sur toutes les séries. Il faut jongler avec les horaires. Les tournages vont tellement vite que parfois, on voit un comédien dans plusieurs séries en même temps, mais en fait, ça fait un an qu’il n’a pas travaillé. C’est de plus en plus difficile.

«Quand un projet l’intéresse, on prend la meilleure stratégie en fonction des personnes qu’il connaît ou que je connais dans le milieu.» — Marc-André

 ??  ?? Marc-André et Anthony viennent de commencer leur collaborat­ion, et ils entretienn­ent déjà une belle complicité.
Marc-André et Anthony viennent de commencer leur collaborat­ion, et ils entretienn­ent déjà une belle complicité.
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada