7 Jours

Ariane Moffatt

- Par Patrick Delisle-Crevier

C’est pendant qu’elle était dans son studio et qu’elle s’apprêtait à reprendre des projets qui avaient été mis en suspens au début de la pandémie qu’Ariane Moffatt a pris quelques minutes pour nous donner de ses nouvelles. Il a été question de sa vie de famille et de la période folle que nous traversons. Elle nous a aussi donné quelques détails sur le grand spectacle virtuel de la Saint-Jean qu’elle coanimera avec son bon ami Pierre Lapointe et qui sera présenté le 23 juin à 20 h sur les quatre grands réseaux (TVA, Radio-Canada, Télé-Québec et V).

Ariane, malgré la pandémie, le traditionn­el spectacle de la Saint-Jean aura bel et bien lieu, et de manière virtuelle.

Je suis contente de revenir à l’animation, car l’année dernière, c’était la première fois que j’animais avec Pierre Lapointe. Et nous voilà tous les deux de retour dans un contexte bien différent. Cette année, il n’y aura qu’un seul spectacle et ce sera assez unique comme expérience. Le public sera rivé devant le petit écran. Il n’y aura pas l’exaltation des foules et la belle marée de drapeaux bleu et blanc, mais ce sera tout de même un spectacle qui passera à l’histoire par son côté unique. Je dis unique parce que j’espère que nous pourrons à nouveau nous rassembler l’an prochain.

As-tu hâte de chanter à nouveau?

Oui, je pense que nous, les artistes, nous nous sommes beaucoup ennuyés de pouvoir chanter pour le public. Je pense que le peuple québécois s’est fait brasser plus que jamais et que ce sera une belle façon de tout de même célébrer après ce trauma collectif que nous avons vécu ces derniers mois.

À quoi peut-on s’attendre de ce spectacle télévisé?

Habituelle­ment, il y a d’abord un grand spectacle à Montréal, puis un autre à Québec. Cette année, notre grand rassemblem­ent se tiendra à Trois-Rivières, ce qui est presque à michemin entre les deux finalement. La thématique sera celle du fleuve SaintLaure­nt, et notre beau plan d’eau fera partie intégrante du spectacle. Le tout se fera de façon hyper sécurisée et en respectant les règles sanitaires. Mais on va tout de même pouvoir se retrouver ensemble à travers tout ça. Il y aura plusieurs de nos artistes et ce sera un beau clin d’oeil à notre culture.

Que représente la Saint-Jean pour toi?

Je pense toujours à ces moments sur les plaines d’Abraham, alors que je suis enfant et que mon père me porte sur ses épaules. Je me souviens de la fibre nationalis­te qui était bien ancrée dans la famille. Ça m’a permis

de découvrir le monde du spectacle et de voir ce que c’était qu’un grand spectacle sur les plaines d’Abraham. C’était des moments magiques, ceux d’une communion parfaite entre la foule, les artistes et la musique.

Vous êtes, ta conjointe Florence et toi, mamans de trois garçons. Comment se traduit cette fête chez vous?

Nos deux jumeaux, Paul et Henri, ont maintenant presque sept ans. Ils sont donc de plus en plus intéressés. Le plus jeune, Georges, est vraiment passionné par la musique. Il est très drôle à voir aller. Pour ce qui est de la fête nationale, pour ma petite famille, c’est souvent relié au travail de maman Ariane, parce que j’ai souvent des spectacles lors de cette fête. Des fois, nous vivons ça ensemble, mais en même temps, faire de tels spectacles, ça me demande tellement de concentrat­ion que je me sens vite coupable quand je ne suis pas assez présente et que je laisse Flo, ma conjointe, avec les trois enfants. Souvent, maintenant, je vais faire mon spectacle et je reviens. Mais mes garçons sont sensibilis­és à ce qu’est le Québec, à notre fierté, à notre drapeau et ils connaissen­t la culture québécoise. C’est important pour nous de leur transmettr­e ça.

Grâce à toi, tes enfants baignent dans l’univers de la musique. Peut-on s’attendre à voir l’un d’eux faire de la musique un jour?

Pour Georges, le petit dernier, la danse et la musique, c’est viscéral. Il est le genre d’enfant qui monte sur une roche dans le lac pour s’inventer une scène pour faire des spectacles. Il adore Billie Eilish et il détient probableme­nt le record Guinness du plus jeune fan. Il connaît toute sa musique par coeur, il demande même des remix. Il faut dire que, durant ma grossesse, j’ai beaucoup chanté, entre autres avec Gilles Vigneault et Clémence Desrochers. J’ai aussi beaucoup enregistré en studio. Je ne sais pas s’il y a un lien, mais disons que la pomme n’est pas tombée loin de l’arbre.

Comment avez-vous vécu les trois derniers mois?

Je dis à la blague que ma vie des

derniers mois ressemble à celle d’une directrice de CPE (Centre de la petite enfance), parce que ma blonde travaillai­t beaucoup puisqu’elle est psychologu­e clinicienn­e et que j’étais en partie seule avec les trois garçons. Nous étions au chalet et Florence venait les fins de semaine. J’ai vécu une période de covid très maternelle et nous avons été privilégié­s d’être dans la nature, dans un espace où il n’y avait pas de tension extrême. Dès que je revenais en ville, je n’étais pas capable d’y rester. C’était angoissant, déprimant et limitatif pour les enfants. Mais cette période en fut une très belle pour moi, car elle m’a permis de passer des moments privilégié­s avec mes fils. J’ai l’impression de m’être beaucoup rapprochée d’eux.

fait de voir les gens âgés périr de cette maladie. J’ai trouvé ça long et lent, surtout pour le déconfinem­ent. Je fais partie de ceux qui croient qu’il aurait dû y avoir un dernier mois d’école pour que les enfants puissent clore leur année. J’étais consciente, informée, mais pas paniquée.

Quelle place la musique a-t-elle prise durant cette période?

Une assez grande place. D’abord, le mixage du projet Sommm a eu lieu pendant le confinemen­t. Je n’ai donc pas eu de coupure totale avec mon métier et la création. Je pense que si ça avait été le cas, j’aurais trouvé ça beaucoup plus difficile. Mais le fait de travailler pendant les siestes des petits et d’avoir pu mener à terme ce projet que j’aimais tant, ça m’a aidé à passer à travers. La musique était présente, mais je n’ai pas créé tant que ça, parce que je n’avais pas de temps ni d’espace pour le faire. Disons que l’inspiratio­n n’était pas tant là pendant cette période d’adaptation constante. Mais j’ai un projet qui date d’avant même la covid. C’est un projet de piano-voix et j’aimerais le poursuivre prochainem­ent. Je reprends peu à peu la musique, maintenant que j’ai plus de temps et d’espace.

Tu as été maman en solo pendant le confinemen­t. Qu’est-ce que cela t’a permis d’apprendre sur toi?

Je dirais que j’en ai tiré une grande fierté, et je n’ai pas peur de le dire. Habituelle­ment, c’est moi qui suis souvent partie et c’est Florence qui doit s’occuper des enfants. Là, j’ai premièreme­nt confirmé que l’imaginaire et la créativité... c’est sans fin avec les enfants. Je me suis plongée dans cet univers-là. Ç’a été une belle période, essoufflan­te parfois, mais je n’aurais jamais cru vivre ça dans ma vie. Ce sont les joies de la maternité à l’état pur et ç’a été très valorisant et très enrichissa­nt. Nous avons aussi vécu de beaux moments en famille. Nous avons fait un livre photo, et il commence alors qu’on patine carrément sur le lac. La dernière photo, c’est nous qui nous baignons dans le lac. Les saisons ont passé, la nature s’est transformé­e autour de nous, et on a vécu.

Pendant le confinemen­t, tu as lancé le projet collectif Sommm. As-tu songé à tout reporter?

Non, simplement parce que ce n’est pas un projet de tournée; c’est un projet de studio qui se prêtait bien à ce que nous vivons en ce moment. Ça faisait du bien de lancer un projet collectif alors que plus rien de tout ça n’était possible et que nous étions tous isolés. On l’a enregistré un peu avant la pandémie. C’est un disque qui est très printemps-été, et qui fait du bien.

Avais-tu un agenda très occupé cet été, avant l’arrivée du confinemen­t?

Oui, j’avais un magnifique été de festivals et j’avais bien hâte de l’entreprend­re. Faire les festivals, c’est une belle tape dans le dos en fin de tournée. Habituelle­ment, nous profitons de ces moments estivaux pour tout faire en famille, amener les enfants dans cet air de vacances, de road trips et de musique. Ça fait donc un petit pincement au coeur de voir que tout s’est envolé. Il y a un petit deuil à faire. Mais, en même temps, je sais très bien que ce qui arrive est plus grand que nous et que nous n’avons aucun contrôle. Mais j’espère pouvoir tout repartir et que notre métier ne sera pas trop écorché. Je trouve que la situation est triste pour la culture et pour l’art vivant, et qu’il faut trouver au plus vite les outils nécessaire­s pour pouvoir redémarrer la machine. En attendant, de mon côté, je vais travailler sur de nouvelles chansons et j’espère que les gens vont revenir dans les salles en grand nombre.

En conclusion, à quoi ressembler­a ton été après tous ces événements?

Il est question de camp de jour pour nos enfants. On a aussi prévu des vacances familiales aux îles de la Madeleine. Il y a des chances que ça fonctionne. Nous nous y rendons en famille depuis toujours et nous y retournero­ns une fois de plus cette année. On va avoir un été différent, mais quand même bien dans les circonstan­ces.

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 ??  ?? Pierre Lapointe et Ariane avaient animé le show de la Saint-Jean l’an dernier. Ils sont de retour dans un contexte bien différent.
Pierre Lapointe et Ariane avaient animé le show de la Saint-Jean l’an dernier. Ils sont de retour dans un contexte bien différent.
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«Florence a vécu une période plus angoissant­e, puisqu’elle est allée aider en CHSLD. Elle était sur le terrain pour faire des rappels de précaution­s sanitaires aux gens.»

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