7 Jours

«J’ai fait du ménage dans ma vie»

- PAR Patrick Delisle-Crevier PHOTOS: BRUNO PETROZZA • MAQUILLAGE-COIFFURE: ANABELLE DESCHAMPS

Le comédien, qui s’est fait discret ces derniers temps, effectue un retour à la télévision dans la série Patrick Senécal présente. Entrevue avec Sébastien sur sa nouvelle image, sa vie, sa carrière et sur le fait de vieillir en faisant le métier de comédien.

’abord, Sébastien, comment vis-tu la période actuelle?

Je vis ça en différente­s étapes. J’ai bien pris ça, l’année dernière, quand tout s’est arrêté le 13 mars. Je me suis dit: «OK, c’est un bon moment pour prendre soin de moi.» J’en ai profité pour faire du sport, pour manger mieux. Les beaux jours arrivaient, j’ai fait de grandes marches, et l’été a fait du bien. Mais depuis Noël, je trouve ça long et j’ai l’impression que ça me rattrape, que c’est plus lourd. Le confinemen­t m’a aussi permis de cuisiner comme je ne l’avais pas fait depuis longtemps; il y a eu ça de positif. Mais maintenant, on dirait que la batterie commence à être un peu épuisée.

On te voit en ce moment dans Patrick Senécal présente. Que peux-tu dire sur ton personnage?

C’est un personnage tout gentil. Un bonhomme qui a certains ennuis dans son couple, mais qui mène une vie assez simple. Un jour, il croise sa nouvelle voisine, jouée par Mylène Mackay, et celle-ci a ses petits secrets. Il souhaite faire sa conquête, mais les choses dérapent, et ça ne se terminera pas comme prévu pour lui. Ç’a vraiment été un beau tournage; j’ai adoré jouer ça et tourner avec le réalisateu­r Stéphane Lapointe.

On remarque dans l’épisode que tu as complèteme­nt changé de casting; tu es plus costaud. Est-ce volontaire?

Bah, je vieillis, et la quarantain­e a frappé. J’ai 41 ans, je n’ai plus la même énergie ni la même forme qu’à 32 ans, mais je dois dire que je me suis pas mal entraîné. Je suis en forme et j’imagine que ça paraît. J’ai pris du coffre... À la mi-trentaine, j’ai engraissé, il y a eu un laisser-aller. Puis, j’ai arrêté de fumer il y a quelques années, je me suis mis à bien manger et j’ai eu envie de m’occuper de mon corps, qui est mon outil de travail. À 30 ans, tu penses que tu vas toujours avoir 30 ans, mais à un moment donné, ça te rattrape. Il vient un temps où un homme épaissit avec l’âge, et j’ai décidé de transforme­r ça autant que possible

«Il y a eu un moment où j’ai été dans un entre-deux, côté casting. Ç’a été une période de remise en question et de doute.»

en muscle. Mes années de jeune premier sont derrière moi, je suis un homme un peu plus mûr.

Est-ce angoissant, pour un acteur, de changer de casting?

Oui, ça m’a angoissé à un moment donné. Quand on est jeune, on a l’impression que ça va être éternel. Mais quand la jeunesse s’en va, ça change le regard des autres. On ne t’appelle plus tout à fait pour le même type de rôle. Il y a eu un moment dans ma carrière où j’ai été un peu entre-deux, je n’avais plus 30 ans et je n’avais pas non plus l’apparence d’un papa. Donc, ç’a été une période de remise en question et de doute. Ça fait partie des angoisses, et j’ai eu à négocier avec ça.

Quel a été l’élément déclencheu­r qui t’a amené à vouloir prendre soin de toi?

C’est une peine d’amour. Ç’a été comme une espèce de réveil, j’ai réalisé que je me laissais aller, et je ne voulais pas ça. J’ai eu envie de vieillir en beauté et de me débarrasse­r de mes mauvaises habitudes moins reluisante­s. J’ai décidé de prendre une voie différente, et de me sentir mieux dans ma peau et dans mon travail. J’ai fait du ménage dans ma tête et dans ma vie. Et le fait que le téléphone sonne moins est un mal nécessaire qui t’amène à te remettre en question.

As-tu pensé à faire autre chose?

Ce qui m’a sauvé, c’est que je travaille beaucoup en doublage. Je me suis souvent demandé ce que je ferais si je n’étais plus comédien. Ces quelques années, j’ai été moins à l’écran, mais heureuseme­nt j’ai travaillé beaucoup avec ma voix et ça m’a permis de gagner ma vie.

As-tu eu peur qu’on t’oublie?

Oui, c’est certain. Ce n’est pas facile de se sentir rejeté, et il y a eu un grand questionne­ment qui est venu avec ça. C’est un drôle de métier, c’est très cyclique. Ce sont des rencontres qui parfois arrivent et parfois n’arrivent pas.

Avoir 41 ans, ça te fait quoi?

Autant j’aime l’énergie et l’arrogance de la jeunesse, autant je ne reviendrai­s pas 10 ou 15 ans en arrière. Je suis bien où je suis rendu dans ma tête et dans ma vie. Je suis bien, je suis heureux. Plus jeune, j’étais assez impulsif et angoissé. Les choses se sont placées et ont pris forme. Je suis plus dans l’assurance et je sais beaucoup plus ce que je veux et ce que je ne veux plus.

Es-tu l’homme de 41 ans que tu pensais devenir? Te voyais-tu avec des enfants, une famille?

Je ne suis pas celui qui s’est souvent projeté dans l’avenir, je ne suis pas le gars qui a un plan de vie ou un plan de carrière. Je n’ai donc pas de regret, mais c’est certain que si tu m’avais demandé à 18 ans où je me voyais à 40 ans, j’aurais peut-être dit que je me voyais avec trois enfants et marié. Mais ce n’est pas ça; je suis rendu là où je dois être parce que c’est la somme des choix que j’ai faits. J’ai beaucoup de choses encore à faire, je veux des défis et des projets, et je souhaite avoir encore plein de beaux rôles. Toutefois, il y a un aspect de tout ça que je ne contrôle pas.

Mais je ne suis pas malheureux où je suis en ce moment.

Tu fais ce métier depuis plus de 25 ans. Qu’est-ce que ça représente pour toi?

Ça me fait drôle, mais je suis heureux d’être encore là. Je ne suis pas un enfant de la télé qui a grandi devant les projecteur­s. J’ai commencé à 15 ans et j’ai pu vivre de ça depuis. Je n’étais pas un enfant vedette qui manquait l’école pour jouer à l’écran. C’est arrivé beaucoup plus tard pour moi. Tout a été graduel, ça a commencé après une audition dans une agence et ça a décollé par la suite. À l’époque, j’ai eu Marcia Pilote comme professeur­e de théâtre, et ç’a été marquant. Avec elle, il y a eu un déclic: ç’a été la première femme en dehors de ma mère de qui j’ai senti de la considérat­ion. Elle m’a emmené faire ma première audition. Si je fais ce métier aujourd’hui, c’est en partie grâce à elle.

Que veux-tu faire pour le reste de ta quarantain­e?

J’ai envie qu’on me fasse confiance en m’offrant de beaux rôles. J’ai envie de tout jouer, j’ai envie de me sentir à ma place et de trouver ma zone de confort sur un plateau. Je souhaite avoir de l’opulence dans mes choix de rôles. Sur le plan personnel, je me souhaite de continuer d’être en santé et de faire du sport. Je n’ai pas non plus fermé la porte à l’idée d’avoir une famille, mais ça va dépendre des rencontres. Et si ça n’arrive pas, ce ne sera pas grave. Je veux m’occuper des miens, j’ai envie de voyager à nouveau dès que ce sera possible. J’ai aussi le projet, avec de vieux amis, d’ouvrir un gîte touristiqu­e au Costa Rica. Ce sera un projet de préretrait­e dans quelques années.

Quels sont tes autres projets?

On peut me voir dans Clash, à Vrak, sinon je devais passer beaucoup de temps à Paris pour un one man show sur les dernières heures de la vie de Molière. Je devais jouer dans différents théâtres en France. Je me suis beaucoup investi dans ce projet et j’espère pouvoir le reprendre bientôt.

Patrick Senécal présente est offert sur Club illico. Clash, du lundi au jeudi 17 h, à Vrak.

«J’ai décidé de prendre une voie différente, et de me sentir mieux dans ma peau et dans mon travail.»

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«Ç’a été un beau tournage; j’ai adoré tourner avec le réalisateu­r Stéphane Lapointe», dit le comédien à propos de Patrick Senécal présente.
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Dans l’épisode Seule, Sébastien donne la réplique à Mylène Mackay. Malheureus­ement, ça ne se terminera pas comme prévu pour le personnage qu’il incarne!

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