7 Jours

Renee Wilkin

- PAR MICHÈLE LEMIEUX • PHOTOS: BRUNO PETROZZA MAQUILLAGE-COIFFURE: SABRINE CADIEUX

Renee Wilkin incarne ce qu’elle prône. Ouverte à la différence, elle revendique la sienne et celle de ses deux enfants métissés, Eli, neuf ans, et Marcus, sept ans. Mieux encore: la chanteuse a établi, avec le père de ses fils, un modèle familial rare qui témoigne de son ouverture. En effet, quoique séparé, le couple vit sous le même toit dans le plus grand des respects.

«Ça faisait sept ans que je n’avais pas passé un été à la maison. Ça m’a fait du bien.»

Renee, tu t’es lancée dans une trilogie de livres pour enfants qui porte sur la diversité. Quelle est la genèse de ce projet?

J’avais cette idée en tête depuis un moment déjà et j’avais une vision assez claire de mes personnage­s principaux. Ces dernières années, je n’avais pas eu beaucoup de temps pour écrire des livres… J’étais en écriture de chansons, en tournée ou à m’occuper de mes jeunes enfants. La pandémie a eu cet avantage: elle m’a permis de concrétise­r ce rêve. C’est venu d’une envie de proposer des livres qui représente­nt des enfants différents. Avec mes enfants, j’ai vite réalisé qu’ils ne se sentaient pas représenté­s dans les livres de mon enfance. Heureuseme­nt, d’autres sont sortis entre-temps et présentent mieux la diversité, mais généraleme­nt, les personnage­s se ressemblen­t tous. Je voulais des personnage­s minces et gros, de toutes les couleurs, décoiffés, différents, etc. À priori, c’est vraiment un cadeau que je voulais offrir à mes enfants.

Tes enfants ont-ils aimé?

Mes enfants ont lu Le coeur rouge et or de Nestor et en sont très fiers. Mon plus jeune se reconnaît beaucoup dans ce personnage. C’est une belle introducti­on aux stéréotype­s de genre, car Nestor veut une fête de princesse. Il a une famille aimante qui le laisse explorer toutes les avenues, mais il sent une pression à l’extérieur de la maison, où il ne peut pas être 100 % lui-même. Je pense que ça va faire du bien à plusieurs petits Nestor, ou du moins faire naître des conversati­ons. C’est un conte lumineux et heureux qui célèbre la diversité.

Tu portes le flambeau de la diversité de bien des manières. L’an dernier, tu as fait une publicatio­n sur les réseaux sociaux qui a eu un impact important. Quel bilan en fais-tu, un an plus tard?

Je constate qu’il y a plus de place qu’avant pour la diversité, sous toutes ses formes. Plus la diversité est

«À la maison, nous répétons souvent à nos enfants à quel point la différence est belle et qu’il faut la célébrer.»

représenté­e, plus il y aura de beaux changement­s. Je crois que ça devient de plus en plus normal. À travers cet événement, j’ai découvert tout plein d’alliés qui militent notamment contre la grossophob­ie. En tant que société, nous avons compris que les propos déplacés et les jugements n’ont pas leur place.

Est-ce que tu livres aussi ce combat pour tes enfants, qui sont métissés, donc différents?

Oui, dans le deuxième tome, intitulé La peau étoilée d’Anisée (à paraître prochainem­ent) je raconte l’histoire d’une petite fille métisse. Elle vit des situations qui sont très représenta­tives de ce que mes enfants vivent et reçoit des commentair­es que mes enfants reçoivent. Des gens la questionne­nt sur sa couleur de peau, touchent ses cheveux. C’est anodin, ce n’est pas fait méchamment, mais elle fait une présentati­on orale avec sa meilleure amie pour expliquer ce qui se fait ou non. C’était important pour moi d’écrire cette histoire, car mes enfants vivent souvent cette situation. Ce sont des histoires qui font du bien et que j’aurais aimé lire à mes enfants. Parfois, ils me demandent pourquoi ils n’ont pas la même couleur de peau ou de cheveux que les autres élèves dans leur classe. Dans leur tête, ça serait plus simple s’ils étaient comme tout le monde… Je leur dis toujours que leur unicité fera d’eux ce qu’ils sont et qu’en vieillissa­nt, ils seront fiers de leurs particular­ités. Durant l’enfance et l’adolescenc­e, on n’a pas envie d’être différent, mais en vieillissa­nt, on est heureux de pouvoir se démarquer.

Comment tes enfants composent-ils avec la différence? As-tu réussi à trouver les mots pour la valoriser?

Je crois avoir trouvé les bons mots, mais je ne suis pas parfaite. À la maison, nous leur répétons souvent à quel point la différence est belle et qu’il faut la célébrer. Il faut aussi s’y intéresser et comprendre la différence des autres. Je vois que mes enfants sont empathique­s devant un enfant différent, peu importe sa différence. Ils s’y intéressen­t, posent des questions et sont sans jugement. Ils voient des côtés positifs à chaque personne. C’est un processus qui est toujours en cours, mais je sens qu’ils ont une belle ouverture face à la différence.

Y a-t-il eu des moments difficiles avec tes enfants?

Oui. Maintenant qu’ils sont plus vieux, ils sont en mesure de comprendre les remarques. Ils ont été conscients des commentair­es que j’ai reçus après mon passage à Bonsoir bonsoir!. Ils ne comprenaie­nt pas pourquoi les gens faisaient des commentair­es sur mon corps alors que je leur répète que le corps n’est pas important… Parfois, je dois faire des petites mises au point et expliquer que ce n’est pas tout le monde qui voit les choses de la même manière et que, pour cette raison, maman fait ce qu’elle fait pour conscienti­ser les gens.

Comment as-tu relevé les défis de la dernière année?

Quand tout s’est arrêté, j’ai eu un vertige. L’album venait de sortir, j’avais une grosse année devant moi. J’avais de grandes aspiration­s. J’ai finalement profité de ces moments en famille. Ça faisait sept ans que je n’avais pas passé un été à la maison. Ça m’a fait du bien. Ces derniers mois, il était temps que le vent tourne! J’avais hâte de renouer avec les gens. J’ai finalement une trentaine de spectacles au programme cet été.

Tu es séparée du père de tes enfants tout en vivant sous le même toit. La pandémie a-t-elle posé des défis sur ce plan?

Non, pas du tout. Il y a bientôt trois ans que nous sommes séparés. Avant la pandémie, nous ne nous voyions pas si souvent. C’était une cohabitati­on facile. Actuelleme­nt, nous nous voyons plus, mais honnêtemen­t, nous avons une très, très bonne entente. Nous soupons en famille. L’été dernier, nous sommes partis dans un chalet tous ensemble. La pandémie n’a rien changé pour nous.

Vous expériment­ez l’amitié après l’amour?

Oui, et nous aimons nos enfants aussi fort l’un que l’autre. Nous voulons qu’ils soient heureux et ça prévaut sur tout le reste. On peut réussir sa séparation. Je sais que ce n’est pas toujours facile, que les conditions ne sont pas toujours idéales, mais quand c’est possible, c’est la meilleure situation pour les enfants.

Ça repose sur quoi, à ton avis?

Une bonne communicat­ion. Même s’il n’y a plus de relation amoureuse, on continue de communique­r et on se rend compte que ce qui importe, c’est le bien-être des enfants. Il peut y avoir des différends, mais si nous devons avoir une conversati­on, nous ne l’aurons pas devant les enfants. Nous voulons que nos enfants soient bien. Il y a du respect entre nous et je répète à qui veut l’entendre qu’il est le meilleur papa que je connaisse. Je n’ai rien à lui reprocher: c’est un papa exceptionn­el et je le respectera­i toujours, et l’inverse est aussi vrai.

Le coeur rouge et or de Nestor est publié aux Éditions Boomerang. La tournée Deux, les plus grands duos se produira tout l’été à Repentigny et à Victoriavi­lle. Pour en savoir plus sur ses autres projets: reneewilki­n.net.

«On peut réussir sa séparation. Ce n’est pas toujours facile, les conditions ne sont pas toujours idéales, mais quand c’est possible, c’est la meilleure situation pour les enfants.»

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