7 Jours

«Je veux respirer un peu»

- PAR Patrick Delisle-Crevier PHOTOS: BRUNO PETROZZA • MAQUILLAGE-COIFFURE: VALÉRIE QUEVILLON

Marie-Lyne Joncas fait partie de notre paysage culturel depuis quelque temps déjà et cette année, elle a été plus présente que jamais à la télévision et à la radio. Mais on ne sait pourtant que très peu de choses sur cette attachante comique. C’est en compagnie de son adorable George, un bouledogue anglais, qu’on l’a rencontrée pour une première entrevue-portrait et une première séance photo avec celui qui est devenu son inséparabl­e.

Marie-Lyne, comment ça va?

Je vais bien. Je travaille beaucoup, mais je suis rendue au moment de ma vie où j’ai envie de ralentir un peu. Dans les six dernières années, j’ai travaillé constammen­t sans prendre de vacances et je n’ai pas profité de la vie. Là, je veux respirer un peu. Je ne veux pas être cette fille qui passe à côté de sa vie personnell­e aux dépens de sa vie profession­nelle. Il faut faire des choix, donc je me choisis un peu.

Cette année en a été une importante pour toi?

Oui, j’ai 33 ans, et c’est l’âge auquel mon père est mort dans un accident d’auto. C’est fou, mais je me dis qu’à partir de cette année, je vais être plus vieille que mon père. Donc chaque seconde que je vis, mon père ne l’a pas vécue. Alors j’en ai profité pour guérir certaines choses. Je suis même allée pour la première fois sur les lieux où mon père est mort. Je suis aussi allée rencontrer celui qui conduisait la voiture. J’ai fait un genre de pèlerinage afin de fermer cette porte-là dans ma vie. La dernière année a aussi été importante sur le plan du travail. J’ai eu de beaux projets. En fait, c’est comme un passage à la vie adulte pour moi.

Tu as eu à faire le deuil de la mort de ton père?

Oui, mais en même temps, mon père, Julien Joncas, est mort quand j’avais un an, alors je n’ai jamais su comment faire mon deuil de son départ. J’ai vécu toute ma vie avec un immense manque et aussi avec cette peur de perdre un autre être cher. Cette année, j’ai donc eu envie de travailler fort là-dessus. Je me suis même fait tatouer deux roses — les deux roses du mois de juin, car nous sommes tous les deux nés en juin — et le jour de sa mort, le 16 septembre. Après ce pèlerinage, j’ai l’impression que ce deuil est derrière moi.

As-tu ressenti l’absence d’un père tout au long de ta vie?

Non, j’ai eu la chance d’avoir un deuxième père dans ma vie, puisque ma mère a retrouvé son premier amour quelque temps après la mort de mon père. Ils sont encore ensemble aujourd’hui. Cet homme a donc été un deuxième père pour moi et il m’a adoptée officielle­ment il y a un mois et demi. Ç’a été un beau moment pour moi.

Quel genre d’enfance as-tu eue, Marie-Lyne?

Une enfance extraordin­aire. Mon beau-père, qui est un être exceptionn­el, m’a élevée comme si j’étais sa fille. J’étais enfant unique et j’ai grandi au Lac-Saint-Jean. Quand j’avais neuf ans, nous avons déménagé sur la rive

sud de Montréal. Je peux dire que j’ai été bénie d’avoir mon beau-père dans ma vie. C’est un ancien journalist­e, un artiste, et il est très drôle. Je pense même que c’est grâce à lui que j’ai eu envie de faire ce métier. Ma mère est aussi très comique, et j’ai eu une super enfance avec ces deux-là.

Comment est née cette envie de faire de l’humour?

Je voulais avant tout être comédienne et je suis allée étudier en théâtre à Saint-Hyacinthe. Mais je n’étais pas celle qui allait bûcher, bûcher et encore bûcher pour être comédienne. J’ai donc travaillé à l’agence artistique de ma cousine. Puis elle m’a dit d’aller faire un bac en communicat­ions pour que nous devenions associées. Entre-temps, j’ai rencontré des gens qui m’ont amenée à écrire et à faire quelques petits numéros ici et là. Ensuite, j’ai eu envie de tenter ma chance aux auditions de l’École nationale de l’humour, et ça a marché. Je n’ai donc jamais terminé mon bac. Mais je n’avais jamais envisagé de faire de l’humour avant. D’ailleurs, je m’intéresse beaucoup à la théorie de l’humour, mais faire du stand-up seule sur une scène ne m’intéresse pas du tout. On ne verra jamais un one woman show de Marie-Lyne Joncas.

Pourquoi?

Je ne me vois pas partir en tournée avec un technicien à Rouyn-Noranda, être loin de ma maison. Je suis une fille qui aime être chez elle, faire ses petites affaires, ses projets. J’ai vécu la vie de tournée avec Les Grandes Crues, je suis contente de l’avoir fait, et ç’a été le fun. Ç’a même été un beau succès et j’ai adoré le faire avec Ève. Maintenant, elle travaille à un spectacle solo, mais moi, je vais prendre une pause de la scène.

Si tu ne te vois pas faire des spectacles solos, à quoi ressemble ta carrière idéale?

Mon rêve, c’est d’avoir un jour mon propre talk-show. Je me suis fixé l’âge de 35 ans pour atteindre mon objectif. J’ai tellement d’idées et je suis une grande fan d’Ellen DeGeneres! Idéalement, ma carrière ressembler­ait à un talk-show le soir et à une quotidienn­e à la radio.

«J’ai enfin mon bouledogue et je suis en amour! Je rêvais d’un tel chien depuis le cégep.»

La popularité t’est tombée dessus cette année. Comment apprivoise­s-tu ça?

Ça m’a rendue un peu sauvage d’être connue. Je trouve toujours ça bizarre, mais en même temps, je n’ai aucun problème avec ça. Je fais ce métier et j’aime les gens. Et quand ça ne me tente pas, que je file sauvage, je reste chez nous ou je pars passer quelques jours au chalet. Mais j’aime faire rire le monde, j’aime faire ce métier-là et jamais je ne vais être désagréabl­e avec des gens. Ça fait partie de la game et les gens sont habituelle­ment gentils.

J’ai l’impression que la fille sur scène, dans l’oeil du public, et celle que tu es dans la vie sont bien différente­s. Je me trompe?

Je suis vraiment une madame dans la vie. J’ai eu des années plus rock’n’roll, mais elles sont derrière moi. Je m’entraîne, je fais mes petites affaires, j’écoute mes émissions le soir, comme Le tricheur et Si on s’aimait. Je suis très relax dans ma vie. J’adore faire de la bouffe, je cuisine sans arrêt et j’ai ma petite vie rangée. D’ailleurs, la pandémie et le couvre-feu ne m’ont jamais dérangée une seconde; ce fut plutôt une période de paix.

Le célibat est-il difficile pour toi?

J’ai eu mon lot d’histoires d’amour qui n’ont jamais abouti et je me suis endurcie. Je joue le personnage d’une désespérée qui veut absolument rencontrer, mais je suis vraiment indépendan­te. Je suis bien entourée, je suis bien dans ma peau, et la solitude ne me fait pas peur. J’ai envie d’être avec quelqu’un et de sentir que c’est complèteme­nt ça. Je vais attendre le temps qu’il faudra.

Et la maternité dans tout ça?

Je me suis dit que si jamais je suis rendue trop vieille pour avoir des enfants, j’allais adopter. Je suis allée en Haïti et j’ai tellement aimé ce peuple que je pourrais adopter un enfant là-bas. Je n’ai pas l’appel de la maternité à tout prix, et si je n’ai pas un enfant de manière naturelle, ce ne sera pas la fin du monde. Aussi, je pense qu’adopter est un projet de couple et que si ça arrive à 44 ans, ce sera ça.

Te voilà avec un chien, le beau George. Est-ce ton premier chien?

Non, j’avais déjà Henri et je songeais à avoir un deuxième chien. C’est là que j’ai eu envie d’adopter un bouledogue anglais. J’en rêvais depuis des années et il va me suivre partout où j’irai. Déjà, à la station de radio, il est rapidement devenu la mascotte. Il n’a que deux mois et il est tellement sage! Là, il est tout petit, mais dans quelques mois, il va peser 70 lb. Je trouve ça tellement beau, cette race! J’aime les chiens au petit nez écrasé qui respirent fort! Je rêvais d’un tel chien depuis le cégep, mais c’était trop cher. Là, j’ai enfin mon bouledogue et je suis en amour solide! Quand j’ai vu sa photo, j’ai tout de suite eu le prénom de George en tête.

De quoi sera fait ton été?

Je vais prendre deux mois de congé et je passerai ce temps à mon chalet avec mon chien. J’ai quelques spectacles avec Les Grandes Crues. Sinon, j’ai refusé tous les galas, ça ne me tente pas cette année. Si je n’arrête pas, je vire folle, et ça fait six ans que je n’ai pas arrêté. Deux semaines de repos à Noël, ce n’est pas assez. Ça me prend un temps pour respirer et pour vivre. Je vais recommence­r la radio à Rouge FM à l’automne et j’attends la confirmati­on pour Les génies de la vitesse. Pour le reste, je suis en réflexion. Je ne sais pas si j’ai encore envie de pousser la pédale à fond pour une autre année.

Marie-Lyne et Ève Côté présentero­nt quelques spectacles des Grandes Crues en août. lesgrandes­crues.com. Pour en savoir plus sur ses projets, on la suit sur les réseaux sociaux.

«Dans les six dernières années, j’ai travaillé constammen­t sans prendre de vacances et je n’ai pas profité de la vie.»

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada