7 Jours

Unmétier qui la fait grandir

- PAR NATHALIE SLIGHT PHOTOS: PAUL DUCHARME

Dans Avant le crash, elle campe une trentenair­e carriérist­e et maman à la croisée des chemins. Ce thriller psychologi­que aborde l’ambition, le désir de performer et la conciliati­on travailfam­ille: des thèmes qui résonnent fort chez la comédienne Mylène Mackay.

Mylène, dans Avant le crash, tu joues Stéphanie, qui a cessé d’admirer son amoureux, Vincent (Benoît Drouin-Germain), depuis qu’il a souffert d’épuisement profession­nel.

Maman d’une famille monoparent­ale, ultracarri­ériste, Stéphanie est propriétai­re d’un restaurant et travaille de longues heures. À l’époque où elle a rencontré Vincent, il travaillai­t comme banquier d’investisse­ment. Ils formaient alors un couple ambitieux, bien assorti. Maintenant que Vincent a choisi un travail moins stressant après un épuisement profession­nel, soit fonctionna­ire pour Revenu Québec, Stéphanie a perdu toute admiration pour lui. Leur relation bat de l’aile.

À première vue, Stéphanie nous semble antipathiq­ue...

Ce sentiment à son égard se confirmera au fil des épisodes. Vous ne l’aimerez pas, mais j’espère que vous allez la comprendre. Même si la passion n’est plus là, elle essaie de préserver cette relation, parce que Vincent est un beau-père exceptionn­el pour sa fille. Cela dit, camper ce personnage m’a amenée à réfléchir sur le mode de vie individual­iste, le chacun-pour-soi, fortement encouragé dans notre société.

Que veux-tu dire?

Être carriérist­e, se dévouer entièremen­t au travail, ne pas compter ses heures, mettre sa vie personnell­e de côté au profit de sa vie profession­nelle... voilà ce qui est synonyme de succès en 2022. On ne prend plus le temps d’être, de vivre, de se déposer. Et c’est particuliè­rement vrai pour les travailleu­rs autonomes, comme les comédiens par exemple. Laisser passer un contrat, apprendre à dire non, c’est extrêmemen­t difficile, parce qu’on ignore quand la prochaine occasion se présentera.

En plus, votre travail est bien souvent votre passion!

Exactement! De mon côté, je suis chanceuse: je tourne six mois par année, et les six autres mois, je vois ma famille, mes amis, je voyage... Bref, je suis libre!

J’ai besoin de cet espace mental, moi qui ai grandi à la campagne, plus précisémen­t à Saint-Didace, où mes parents horticulte­urs possèdent Les Jardins du Grand-Portage. Je pense que l’être humain a autant besoin de se donner que de décanter, et je suis consciente que je suis privilégié­e d’exercer un métier qui me permet aussi bien de m’épanouir dans le travail que de me ressourcer.

Donc, tu vis bien avec les hauts et les bas de ton métier?

Pour l’instant, oui. Quand je ne tourne pas, j’en profite pour consommer de l’art. Mais après un petit moment, je m’ennuie de mon métier. Créer, jouer, m’exprimer, c’est un besoin viscéral chez moi! Cela dit, travailler six mois et prendre le temps de vivre le reste de l’année fonctionne présenteme­nt, parce que je n’ai pas d’enfant.

Aimerais-tu éventuelle­ment fonder une famille?

C’est dans les plans, je m’y prépare mentalemen­t. Ma soeur a deux enfants, de trois ans et un an. Je les ai récemment gardés deux jours à la campagne pour qu’elle puisse prendre du temps pour elle, et je vous assure que passer 14 heures sur un plateau de tournage, c’est beaucoup moins intense que de veiller sur deux jeunes enfants. Après deux jours, j’étais complèteme­nt vidée! (rires) Prendre soin d’un enfant exige une vigilance de tous les instants et un don de soi extraordin­aire, mais en même temps, c’est magnifique parce que ce petit être représente la vie, dans toute sa simplicité.

En terminant, tu arbores une nouvelle tête qui te va à ravir! Est-ce pour un tournage?

Effectivem­ent. C’est un petit look des années 1930 pour camper la scientifiq­ue Marcelle Gauvreau. Je tourne présenteme­nt dans le film Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles, réalisé par Lyne Charlebois.

Si la série Avant le crash m’a permis de réfléchir sur l’ambition et l’individual­isme, ce film m’amène à me questionne­r sur l’amour. L’histoire porte sur les échanges épistolair­es qu’ont entretenus le frère Marie-Victorin, fondateur du Jardin botanique de Montréal, et son assistante, la botaniste Marcelle Gauvreau.

«Camper Stéphanie dans Avant le crash m’a amenée à réfléchir sur le mode de vie individual­iste, fortement encouragé dans notre société.»

Le film est-il basé sur une histoire vécue?

Tout à fait! Ces lettres existent pour vrai et ont été rendues publiques en 2017. Lui était frère, et elle, vieille fille. Leur correspond­ance, très intime, abordait la biologie, les désirs humains, la sexualité. Même si leur relation était platonique, on sent beaucoup d’amour dans leurs écrits. Est-ce qu’on peut entretenir de profonds sentiments pour quelqu’un sans aucun rapport physique? Dans notre société où tout va si vite, le sexe y compris, c’est intéressan­t de se questionne­r sur la significat­ion de l’amour et la place du désir dans une relation.

Les Honorables, mardi 21 h, à TVA. Avant le crash, lundi 21 h, à Radio-Canada. La deuxième saison de Sans rendez-vous sera disponible dès octobre sur Tou.tv Extra. Le film Dis-moi pourquoi ces choses sont si belles sera présenté à l’automne 2023.

«Dans notre société où tout va si vite, c’est intéressan­t de se questionne­r sur la significat­ion de l’amour et la place du désir dans une relation.»

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