UN JOYAU MENACÉ PAR ÉNERGIE EST?
Le projet d’oléoduc Énergie Est met en péril l’industrie de la pêche et du tourisme de la baie de Fundy. C’est ce qu’affirment des dirigeants de onze groupes environnementaux venus d’un bout à l’autre du Canada pour faire un tour de bateau aux abords des installations d’Irving, à Saint-Jean.
Après la publication d’un rapport accablant en août faisant état des risques du projet d’oléoduc de TransCanada, devant transporter du pétrole de l’Alberta jusqu’au NouveauBrunswick, le Conseil de conservation du N.-B. revient à la charge.
Matthew Abbott souligne que l’écosystème de la baie de Fundy est particulièrement sensible et qu’un déversement y serait dévastateur.
«Les courants marins ici sont rapides et puissants, alors il est souvent impossible de retracer les fuites et leurs impacts. Il ne faut qu’un seul accident pour que les conséquences se fassent sentir non seulement sur l’environnement, mais aussi sur l’économie de la province.»
«Les promoteurs du projet parlent constamment des emplois qui seront créés, mais pas des emplois durables - à temps plein - qui risquent d’être perdus. C’est un pari dangereux. La probabilité est qu’il y aura encore plus de fuites et de déversements dans la baie.»
Advenant la réalisation du pipeline transcanadien, 1,1 million de barils de pétrole par jour seront transportés à Saint-Jean, puis une partie sera exportée par bateau.
En plus du risque de déversements, cet approvisionnement aux raffineries Irving générera une augmentation notable de la circulation de bateaux pétroliers dans la baie de Fundy, selon les environnementalistes.
«Énergie Est apportera de 115 à 300 pétroliers ici de plus chaque année, ce qui mettra les baleines qui y habitent en danger. Les hélices des navires peuvent les blesser et perturbent leurs habitats en faisant du bruit. Il y a déjà trop de ce type de navire et nous en aurons encore plus.»
La baie de Fundy possède un écosystème particulièrement riche et sensible. En plus de la baleine franche de l’Atlantique, plusieurs espèces d’oiseaux sont à risque, dont le bécasseau maubèche, la sterne de dougall, le pluvier siffleur, l’arlequin plongeur, le râle jaune et le hibou des marais.
L’augmentation du nombre de pétroliers est aussi de mauvais augure, selon un pêcheur de homard et de pétoncle de la région.
David Thompson dit perdre beaucoup d’équipement de pêche chaque saison en raison des hélices de ces gros bateaux. our préserver son gagne-pain , il espère voir le projet Énergie Est abandonné.
«Ils passent près de bouées et coupent les cordes. Ces cages me coûtent un peu plus de 100 $ chacune, mais quand j’en perds une, je perds aussi l’identification du gouvernement qui y est attachée, et donc tout le homard que j’aurais pu attraper pour le reste de la saison. Je préfère ne pas calculer combien j’ai perdu jusqu’à présent.»
Selon Matthew Abbott, les dangers pour la pêche sont bien présents.
«Nous savons que dans l’eau salée, le bitume se transforme en boule et coule au fond de l’eau. En tant que pêcheur de homard, je me soucierais énormément de savoir qu’il y a des boules de pétrole parmi les crustacés que je cherche à vendre aux consommateurs», témoigne-t-il.
Le sentinelle de la baie de Fundy est catégorique: le jeu n’en vaut pas la chandelle.