Acadie Nouvelle

Trump et les accords commerciau­x nord-américains

Tout comme le Mexique, le Canada fait partie de l’Accord de libreéchan­ge nord-américain, que Donald Trump décrit comme «la pire entente commercial­e […] jamais signée dans l’histoire de ce pays.» Par contre, différent du Mexique, le Canada croit que Trump

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Les Canadiens se sont sentis fiers de leur premier ministre quand celui-ci a répondu à l’interdicti­on aux réfugiés syriens imposée par Trump dans un gazouillis: «À ceux qui fuient la persécutio­n, la terreur et la guerre, sachez que le Canada vous accueiller­a... indépendam­ment de votre foi. La diversité fait notre force. Bienvenue au Canada.» Un des passe-temps préférés des Canadiens est de se sentir moralement supérieur aux Américains. Et dans le cas actuel, c’est indiscutab­le.

Les États-Unis ont accepté 12 587 réfugiés syriens l’an dernier; le Canada, avec un neuvième de la population de son voisin, en a accepté presque 40 000. Il n’y a pourtant eu que deux attentats islamistes par des «loups solitaires» au Canada au cours du siècle actuel. Ils ont causé la mort d’une personne chacune, mais ni l’un ni l’autre des auteurs n’était un immigrant. Toutefois, des terroriste­s viennent de massacrer six musulmans canadiens à Québec, bien que les immigrants musulmans ne présentent aucun danger notable au Canada.

En réalité, les musulmans immigrant aux États-Unis ne présentent aucun danger important à ce pays non plus. La majorité des auteurs des 28 massacres majeurs perpétrés dans ce pays depuis le 11 septembre étaient des extrémiste­s de droite blancs. Et presque tous les musulmans qui furent derrière les autres massacres sont nés aux États-Unis.

Mais les «décrets» de Trump ne sont pas seulement influencés par l’ignorance et la panique: le président manipule consciemme­nt l’opinion publique. Et la réponse du Canada à l’interdicti­on aux musulmans nuit au scénario qu’il a rédigé.

Si les opposants de Trump décident de se servir de l’exemple canadien pour discrédite­r son histoire sur le danger mortel que posent les immigrants musulmans, le président américain pourrait affirmer que la politique d’immigratio­n négligente du Canada est une menace aux États-Unis et assujettir les musulmans canadiens qui cherchent à franchir la frontière à une «procédure de filtrage extrême».

Il se peut que Trump interdît à tout musulman canadien d’entrer aux États-Unis, ou qu’il exige que tout Canadien ait un visa. Ce serait un terrible inconvénie­nt pour les Canadiens et leur imposerait un coût énorme, mais Donald Trump peut essentiell­ement faire ce qu’il veut à ses voisins du nord. Alors Justin Trudeau serait sage de ne pas attirer trop l’attention sur le Canada.

Le président mexicain, Enrique Peña Nieto, a beaucoup plus d’ennuis. Il a certaineme­nt été au courant de la promesse de Trump de bâtir un «grand mur frontalier physique, attrayant, puissant et impénétrab­le au sud» pour empêcher l’entrée illégale d’immigrants mexicains, et d’exiger que le Mexique le finance. Mais, comme la majorité du monde, il ne pouvait pas croire que Trump était tout à fait sérieux.

La constructi­on du mur n’empêchera toutefois pas les 45% d’immigrants mexicains illégaux estimatifs qui arrivent très légalement par voiture, par autobus ou par avion, mais qui dépassent la date d’expiration de leur visa. La situation n’est quand même pas urgente, étant donné que la majorité des immigrants s’en vont maintenant vers le sud: depuis 2014, il y a plus de Mexicains qui retournent à domicile que de Mexicains qui arrivent aux États-Unis.

Le mur n’est qu’un symbole, une démonstrat­ion de volonté politique, mais Trump ne reviendra pas sur sa promesse. Peut-il aussi forcer le Mexique de le financer? En fait, c’est probable.

Il y a plus d’une semaine, des officiers mexicains étaient à Washington pour préparer la visite du président Peña Nieto quand Trump a publié le gazouillis suivant: «Si le Mexique n’est pas prêt à payer pour le mur absolument nécessaire, il vaudrait mieux annuler la réunion imminente.» Peña Nieto, profondéme­nt humilié, l’a effectivem­ent annulée - il n’avait pas le choix.

Mais le lendemain, les deux présidents se sont parlé au téléphone pendant une heure. La déclaratio­n commune a décrit cet appel comme «productif et constructi­f». On n’a pas révélé de détails, mais on sait qu’ils ont discuté du «déficit commercial actuel des États-Unis avec le Mexique», entre autres. La solution au déficit est probableme­nt de le «régler».

Les exportatio­ns du Mexique aux ÉtatsUnis ont atteint 271 milliards $ l’an dernier tandis que ses importatio­ns n’ont totalisé que 213 milliards $. Trump veut changer ces chiffres, et Peña Nieto doit s’y soumettre. Et quelque part dans l’entente, il y aura une clause qui permet à Trump d’affirmer que le Mexique paiera pour le mur tandis que le Mexique peut toujours le nier.

Le commerce du Canada avec les ÉtatsUnis est relativeme­nt équilibré, alors les Américains ne soumettron­t probableme­nt pas les Canadiens à de la pression intense à moins que Trudeau agace sérieuseme­nt «The Donald». Le volume des échanges commerciau­x entre les États-Unis et la Chine n’a pas trop changé, mais la Chine vend quatre fois plus aux États-Unis qu’elle n’en achète.

On ne peut pas «régler» cette situation, et on ne peut pas persuader Trump de laisser faire. Ça ne peut que mal terminer.

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Les récents décrets de Donald Trump sont loin de faire l’unanimité aux États-Unis (ici, à Los Angeles, samedi). - Associated Press: Reed Saxon
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