Acadie Nouvelle

Ottawa et Washington aux antipodes à la Commission de la condition de la femme

- Joanna Smith

Le premier ministre Justin Trudeau et le président américain Donald Trump ont uni leurs voix, le mois dernier, pour encourager les femmes à prendre plus de place dans le marché du travail, mais le contraste entre leurs gouverneme­nts sur les autres enjeux féminins apparaît maintenant au grand jour aux Nations unies.

Le gouverneme­nt libéral a envoyé une équipe imposante à New York pour participer à une réunion annuelle de la Commission de la condition de la femme des Nations unies et y faire la promotion des programmes canadiens, dont l’investisse­ment de 650 millions $ sur trois ans pour des projets liés à la santé sexuelle et reproducti­ve.

De son côté, le départemen­t d’État américain en a fait sourciller plusieurs cette semaine lorsqu’il a annoncé qu’il invitait deux représenta­ntes de groupes conservate­urs qui sont notamment opposés à l’avortement ou fermés à la diversité sexuelle. Il s’agit de Lisa Correnti, viceprésid­ente générale du Center for Family and Human Rights et de Grace Melton, de l’Heritage Foundation.

«Nous sommes allées au-delà de la spéculatio­n quant à la position de l’administra­tion Trump sur le droit des femmes à l’internatio­nal», a souligné Jessica Stern, directrice générale de l’OutRight Action Internatio­nal, un organisme de défense des LGBTQ basé à New York.

Mme Stern a reconnu l’ampleur de la délégation canadienne – qui inclut des ministres fédéraux et provinciau­x, des parlementa­ires et des organisati­ons non gouverneme­ntales – ainsi que les priorités féministes claires qu’elle a amenées à la table de discussion­s.

L’organisme de Lisa Correnti s’oppose à l’avortement, ainsi qu’à l’inclusion de l’orientatio­n sexuelle et de l’identité de genre dans les politiques et les lois.

Il a aussi dénoncé la démarche de plusieurs pays – dont le Canada – qui ont décidé d’augmenter les fonds humanitair­es consacrés à la santé sexuelle et reproducti­ve des femmes afin de pallier au manque laissé par l’administra­tion Trump, qui a interdit le versement de fonds à des organisati­ons qui effectuent ou qui parlent d’avortement.

La Southern Poverty Law Center inclut aussi l’organisati­on dans sa liste de groupes haineux pour ses idées anti-LGBTQ.

L’Heritage Foundation, un groupe de réflexion conservate­ur, a pour sa part déjà dit que toute loi antidiscri­minatoire visant à protéger la communauté LGBTQ devrait aussi protéger ceux qui ne croient pas aux identités transgenre­s ou aux mariages de conjoints de même sexe.

Mme Melton a souvent critiqué l’implicatio­n de «féministes radicales» dans la Commission de la condition de la femme des Nations unies.

Aucun des groupes n’a répondu à une demande d’entrevue de La Presse canadienne.

Les organisati­ons faisant la promotion des droits des femmes et de la communauté LGBTQ étaient furieuses.

«Je crois que c’est un peu une claque au visage pour tout ce processus», a déploré Helen Kennedy, de l’organisme de défense des LGBTQ Egale Canada.

Alex Wellstead, porte-parole de la ministre fédérale de la Condition féminine, Maryam Monsef, qui a dirigé cette semaine la délégation canadienne à New York, a rappelé que le gouverneme­nt libéral n’avait aucun contrôle sur le choix des délégués des autres pays.

Il a toutefois souligné que Mme Monsef était là-bas pour faire de l’égalité entre les sexes une priorité «en incluant tous les groupes vulnérable­s».

La ministre albertaine de la Condition féminine, Stephanie McLean, a affirmé dans un courriel que la nouvelle avait souligné l’importance pour elle de participer à la rencontre.

La 61e session annuelle de la Commission de la condition de la femme des Nations unies se tient du 13 au 24 mars sous le thème: «L’autonomisa­tion économique des femmes dans un monde du travail en pleine évolution».

«Je crois que les Américaine­s sont probableme­nt un peu plus nerveuses que les Canadienne­s en ce moment», a-t-elle déclaré. «Il continue d’avoir des groupes, en Alberta et à l’étranger, qui ne partagent pas nos valeurs sur l’égalité des femmes. Mais c’est précisémen­t pourquoi j’ai participé à la Commission de la condition de la femme des Nations unies – pour représente­r la majorité des Albertains qui croient que lorsque les femmes sont vraiment autonomes, nos familles et nos communauté­s y gagnent», a-t-elle soutenu.

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Jessica Stern

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