Mieux dépenser l’argent de la santé
Le ministre de la Santé Victor Boudreau et ses stratèges commencent à coûter une petite fortune aux contribuables.
Nous faisons bien sûr référence à l’ancien patron du Réseau de santé Vitalité, Rino Volpé, et à l’ex-médecin-hygiéniste en chef du NouveauBrunswick, la Dre Eilish Cleary, qui ont été congédiés dans des circonstances troubles.
Nous savons désormais combien cela a coûté au trésor public. La réponse: beaucoup d’argent.
Rino Volpé a dû se battre en cours afin d’obtenir réparation. Tout laisse croire qu’il a été congédié pour des raisons politiques. Le ministre Boudreau n’appréciait pas sa personnalité et encore moins le fait qu’il ait été embauché par les progressistes-conservateurs. Il l’a donc mis à la porte.
La Cour du Banc de la Reine a accordé à M. Volpé 525 000$, plus des intérêts ainsi que le remboursement de ses frais juridiques. En tenant compte des frais engendrés par Fredericton pour livrer cette bataille devant les tribunaux, nous pouvons présumer que plus de 1 million $ a été flambé afin de permettre au ministre de mener sa petite guérilla.
Le cas de la Dre Cleary est peut-être plus inquiétant. La médecin-hygiéniste menait une enquête sur les dangers de l’utilisation du glyphosate quand elle a été abruptement relevée de ses fonctions en décembre 2015.
Le glyphosate est un pesticide utilisé par Énergie NB et J.D. Irving. Il est donc juste de dire que Mme Cleary avait attiré l’attention de gens puissants.
Victor Boudreau a toujours nié le lien entre les deux événements. Désireux d’éviter une poursuite devant les tribunaux, il a accordé à la Dre Cleary une compensation de 720 000$. Notez que le ministre a tout fait pour garder ce montant secret. Il aura fallu un jugement de la Cour du Banc de la Reine pour que l’information soit enfin révélée.
Les dossiers Volpé et Cleary ont coûté au bas mot 1,2 million $, et sans doute beaucoup plus. Nous parlons ici de fonds qui auraient littéralement pu servir au système de santé.
Heureusement pour Victor Boudreau, il lui reste une année avant les prochaines élections pour se racheter.
Il vient de signer une nouvelle entente collective avec les médecins de la province. Celle-ci prévoit que dorénavant, 40% du salaire des médecins sera payé à l’acte, contre 60% en fonction du nombre de patients inscrits à leur clinique.
Cette annonce survient tout juste après que le salaire des médecins et des spécialistes a été rendu public. Ce n’est pas une coïncidence.
N’importe quel Néo-Brunswickois peut désormais aller sur le site web du ministère de la Santé pour y découvrir la rémunération de son médecin de famille. Certains ont probablement écarquillé les yeux de stupeur en apprenant l’ampleur des salaires versés.
La principale surprise est la disparité des émoluments de professionnels qui occupent pourtant des responsabilités semblables. Cela laisse croire que certains souhaitent voir le plus grand nombre de patients possibles (et facturer chaque fois) plutôt que soigner le plus grand nombre de patients possibles.
Du côté des spécialistes, les radiologistes et les ophtalmologistes sont sans surprise au sommet de l’échelle. Il s’agit de deux professions où il est possible d’accomplir quotidiennement plusieurs actes médicaux chèrement rétribués.
La Société médicale du Nouveau-Brunswick a senti de quel côté souffle le vent. Elle a publié une publicité dans l’Acadie Nouvelle, au début du mois, dans laquelle elle explique qu’un médecin reçoit 45,60$ pour une consultation avec un patient, 12,16$ pour l’administration d’un vaccin contre la grippe, mais 512,12$ pour une chirurgie des cataractes.
La Société médicale a même consenti à mettre sur pied un comité chargé d’examiner la rémunération de certains actes médicaux rendus plus faciles par l’avancée de la technologie.
La population est prête à payer nos spécialistes de la santé selon leur valeur. Cela signifie qu’il n’y a aucun problème, par exemple, à rémunérer grassement un chirurgien cardiaque qui consacre sa vie à sauver des vies.
Mais rendre un ophtalmologiste plusieurs fois millionnaire parce que la technologie lui permet de traiter une multitude de patients chaque jour? Rémunérer grassement un médecin de famille qui semble surtout déterminé à poinçonner quotidiennement la carte d’assurance-maladie du plus grand nombre de personnes possibles? Cela ne passe pas aussi bien.
Le ministre Boudreau l’a compris. La Société médicale du N.-B. aussi. Il leur reste à trouver le juste milieu, celui qui permettra de traiter nos spécialistes de façon équitable.
En effet, l’équilibre est précaire. Le NouveauBrunswick n’évolue pas en vase clos.
Une décision irréfléchie pourrait provoquer ou accentuer une pénurie de spécialistes. C’est sans oublier que plus de 50 000 Néo-Brunswickois n’ont pas de médecin de famille, selon la Société médicale.
La nouvelle entente entre Fredericton et les médecins est prometteuse. Elle pourrait contribuer à résoudre en partie ce problème tout en réduisant certains coûts.