Acadie Nouvelle

Éliminer le salaire minimum permettrai­t-il de réduire le taux de chômage?

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Alors que les travailleu­rs de l’Alberta et de l’Ontario obtiendron­t au moins 15$ l’heure d’ici 2018 et 2019, l’Atlantic Institute for Market Studies nage à contre-courant en réclamant la suppressio­n du salaire minimum dans l’est du pays.

Dans un rapport publié le mois dernier, l’Atlantic Institute for Market Studies (AIMS), un think tank situé à droite de l’échiquier politique, s’attaque au salaire minimum imposé par les gouverneme­nts provinciau­x.

L’AIMS estime que certains travaux ne valent pas d’être payés au salaire minimum, qui représente une barrière au recrutemen­t de chômeurs non qualifiés, en particulie­r les jeunes.

Abolir le salaire minimum serait donc la seule façon de réduire le chômage en permettant à ceux qui n’arrivent pas à joindre le marché du travail d’y trouver une porte d’entrée.

«Beaucoup de jeunes travailleu­rs prennent des emplois à bas salaire pour accroître leurs compétence­s et gagner de l’expérience, et non pas pour gagner beaucoup d’argent. Leurs plans peuvent être contrariés par des salaires minimums élevés. Perdre ces occasions de formation peut avoir des conséquenc­es négatives à long terme sur les revenus des jeunes travailleu­rs», écrivent les auteurs du rapport.

Ils avancent qu’une augmentati­on du salaire minimum a systématiq­uement des répercussi­ons négatives sur l’emploi. Elle forcerait aussi les employeurs à réduire les sommes allouées à la formation et autres bonis destinés aux salariés.

L’institut prétend également qu’un salaire minimum plus élevé ne réduirait pas la pauvreté, car il entraînera­it une hausse des prix.

«Ce sont des marchés du travail compétitif­s et non la régulation des salaires qui empêchent les travailleu­rs d’être sous-payés», font valoir les auteurs.

Ils appellent les provinces à «réduire les barrières à l’emploi» pour favoriser la croissance économique.

Au Nouveau-Brunswick, le salaire minimum est passé de 10,65$ à 11$ l’heure le 1er avril. Il s’agissait de la troisième hausse du salaire minimum dans la province depuis décembre 2014.

En avril, le premier ministre Brian Gallant avait laissé entendre que la prochaine augmentati­on du salaire minimum pourrait avoir lieu en avril 2018 et refléterai­t le taux d’inflation.

UNE IDÉE DÉNONCÉE

La position de l’Atlantic Institute for Market Studies fait grincer des dents les organisati­ons de lutte contre la pauvreté. Selon le Front commun pour la justice sociale, une telle mesure serait un «retour en arrière» vers la société industriel­le du 19e siècle et une certaine forme d’exploitati­on.

«Un emploi au salaire minimum n’a pas pour but d’acquérir de l’expérience, mais d’assurer un salaire suffisant», insiste le regroupeme­nt dans une réponse destinée à l’AIMS.

«Certains jeunes occupent un emploi parce qu’ils n’ont pas d’aide de leur famille ou vivent une situation socioécono­mique particuliè­re. Nous ne pouvons pas présumer que les gens n’ont pas besoin de leur salaire pour survivre.»

Les recherchis­tes du Front commun soulignent que dans bien des cas, un emploi au salaire minimum se révèle être un emploi permanent plutôt qu’un tremplin vers une carrière.

Ils ajoutent qu’un salaire minimum légal suffisamme­nt élevé encourage l’employé à être productif et réduit le roulement au sein de l’entreprise, ce qui signifie moins de coûts de formation pour l’employeur.

Selon eux, un salaire minimum à 15$ de l’heure «stimulerai­t la demande et serait bénéfique aux entreprise­s».

Le Front note qu’à son niveau actuel, le salaire minimum ne permet pas aux travailleu­rs de subvenir à leurs besoins de base.

D’après le rapport de 2016 sur l’évaluation des besoins en matière de logement 73,7% des ménages du Grand Moncton ayant un faible revenu dépensaien­t plus de la moitié de leur salaire pour se loger.

L’abolition du salaire minimum forcerait donc le gouverneme­nt à fournir davantage de services pour permettre aux travailleu­rs de subsister. - SD

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