ZACHARY RICHARD: L’ESPOIR ET LA LUMIÈRE
Dans toute son oeuvre, Zachary Richard revendique la lumière. Que ce soit dans le désormais classique Cap Enragé, ou encore Last Kiss, Lumière dans le noir - titre qui, à lui seul, résume bien toute sa quête - ou encore dans des albums plus anciens, cet infatigable chercheur d’amour et de paix manifeste, chanson par chanson, son désir de venir à bout de la haine, du mépris, ainsi que son entêtement à se saisir de son histoire et de son identité. Dernier jalon à son parcours: Gombo, nouvel album bilingue au ton clair-obscur parsemé d’étoiles.
Symbole pertinent que Zachary Richard a choisi pour sa dernière concoction sur disque. Le gombo, soupe emblématique de la Louisiane, tire son nom de la plante dont le fruit constitue la grande part du plat. Il est aussi composé, entre autres, de saucisse, d’épices et de céleri. Un repas à la fois doux et charnu qui traduit bien un métissage gastronomique des cultures - cadienne, créole et états-unienne -, selon la définition que le chansonnier en donne dans le livret de son disque.
Métissage musical aussi, qui s’entend et qui est bien dosé dans Gombo. Entre le zydeco et le folk-roots à saveur parfois pop, Zachary Richard ose une fois de plus le mélange des genres, fruit de collaborations de tous les horizons.
«Je n’ai jamais eu de limites sur le plan musical. Je sais ce que j’aime et je me suis entouré d’amis d’un peu partout pour Gombo. Leur collaboration et leur apport dans le disque a été à tous les niveaux. Je leur ai donné beaucoup de liberté. En fait, Cap Enragé a été déterminant à cet égard, celui de laisser mes collaborateurs complètement libres de s’exprimer tout en me permettant de trouver le résultat que je cherche dans chaque chanson», souligne Zachary Richard au cours d’un entretien téléphonique avec l’Acadie Nouvelle.
Le premier extrait roots-cajun et trottant de Gombo, Catherine Catherine, lancé récemment sur les ondes et interprété en duo avec Robert Charlebois, constitue d’ailleurs un exemple de cette liberté tous azimuts que l’auteur-compositeur-interprète s’est donnée pour son dernier opus.
«Robert Charlebois est quelqu’un que j’admire; c’est un très, très grand de la chanson québécoise. Nous avons composé la chanson un peu par hasard, en 2003, en pleine canicule. Elle a dormi dans les tiroirs pendant 15 ans et quand je l’ai ressortie au cours des derniers mois, ç’a fait ‘‘boum’’. J’ai rappelé Robert et il m’a donné son accord pour qu’on l’enregistre ensemble.»
Autre duo se retrouvant dans l’album, celui avec Angélique Kidjo sur la très belle Fais
briller ta lumière, évoquant le combat d’aimer et d’être aimé. «Je n’ai jamais cherché à faire des duos à tout prix, mais quand j’ai écrit la chanson, elle était pour elle. Le combat des femmes noires qu’elle porte dans sa propre musique m’inspire beaucoup et reflète ma propre quête de lumière.»
Parmi les 15 titres que composent Gombo, plusieurs font écho à son héritage identitaire qu’il clame toujours en mode survivance et en devoir de mémoire. D’autres prennent pour symboles certaines tragédies récentes, comme celle de l’attentat terroriste au Bataclan de Paris dans Au Bal du Bataclan, texte cosigné avec Mélissa Bonin et CharlÉlie Couture. Avec ses acolytes, Zachary Richard y met en scène un couple pris en plein coeur de la tragédie et qui, malgré le feu des balles, se montrent leur amour l’un envers l’autre.
«Nous nous étions donnés pour défi, CharlÉlie Couture et moi, de composer une chanson pour apprivoiser ce drame. Nous avons tous les deux joué au Bataclan, donc les attentats nous ont beaucoup touchés. La chanson symbolise le fait que, même dans la pire des situations, on peut toujours trouver l’amour.»
Quant à elle, La Ballade de l’Exclus, coécrite avec son petit-fils Émile, se veut à la fois une dénonciation de la ségrégation et du mépris dont sont victimes tant de gens pour leur handicap ou leur différence, ainsi qu’un cri d’espoir. «J’avais composé avec Émile mon album
J’aime la vie, sorti en 2013. Une expérience que nous avions tous les deux adorée et que nous voulions répéter. Un moment donné, je lui ai lancé le défi de se mettre dans la peau d’une femme noire en chaise roulante et dont un chauffeur refuse l’accès à son autobus. Ç’a donné cette chanson. C’est un cri du coeur pour tous les marginalisés», appuie Zachary Richard avec conviction.
De l’amour, de l’espoir et une conscience citoyenne qui enveloppe Gombo et font de chaque pièce, malgré leur côté sombre, des petits morceaux de lumière savoureux et apaisants. Et qui transcendent toute forme d’engagement politique, une étiquette que Zachary Richard a toujours refusée.
«Je suis avant tout un citoyen qui veut transmettre des valeurs positives. Avec les catastrophes quasi quotidiennes que nous vivons, ces valeurs sont vraiment nécessaires et on ne peut pas les acheter sur internet. Je viens justement de lire un livre, Hope in the
Darkness. L’espoir est un choix; une fois qu’on le fait, ce choix, il faut l’assumer. On peut juste avancer, choisir l’ouverture et la tolérance et nourrir sa lumière.»
Zachary Richard effectuera prochainement une tournée-lancement en solo de son album à travers le Nouveau-Brunswick. Coup de départ à Fredericton (Théâtre Richard-Poirier) le 19 octobre. S’ensuivront Memramcook (Monument-Lefebvre) le 20, Petit-Rocher (Salle multifonctionnelle le 21, Miramichi (Théâtre Gilles-Laplante) le 22, Grand-Sault (Auditorium Richelieu) le 24, et Saint-Jean (Théâtre Louis Vermeersch) le 25.