Acadie Nouvelle

L’impact humain des sables bitumineux

- sylvie.mousseau@acadienouv­elle.com @SylvieMous­seau1

Film sur l’absence, Nos hommes dans

l’ouest pose un regard intimiste et sensible sur le quotidien de trois familles de la Péninsule acadienne confrontée­s à l’exil économique du conjoint. Quel impact ont ces départs et ses retours sur les familles? C’est ce que la cinéaste Renée Blanchar a voulu sonder avec sa caméra. Très attendu, le documentai­re Nos hommes

dans l’ouest donne le coup d’envoi au 31e Festival internatio­nal du cinéma francophon­e en Acadie, jeudi soir, au Théâtre Capitol à Moncton. Renée Blanchar espère que son nouveau long métrage documentai­re suscitera une réflexion à l’égard de ces hommes et de ces femmes qui s’exilent vers l’Alberta pour trouver un emploi leur permettant de vivre décemment. Si elle n’est pas en faveur de l’exploitati­on des sables bitumineux, Renée Blanchar ne veut surtout pas juger les gens qui gagnent leur vie là-bas.

«Ils le font vraiment à coup de grands sacrifices et ça, je pense que c’est peut-être ce qui m’a le plus humainemen­t interpellé dans le film. Nous avons parfois de grands idéaux écologique­s, mais quand on va sur le terrain et quand on met un visage sur ces gens qui partent et une histoire de famille, la réalité devient beaucoup plus nuancée. Ç’a peutêtre changé ma perception des gens qui travaillen­t dans l’Ouest», a déclaré la cinéaste de Caraquet.

Depuis plus de 13 ans, Christian Robert, monteur d’acier, travaille dans le nord de l’Alberta. Ce père de famille fait des allers-retours réguliers entre Rivière-à-la-truite et Fort McMurray. Nadine Losier confie que cette situation n’est pas toujours facile à vivre. Celle qui a élevé ses enfants presque toutes seule n’envisageai­t pas au départ que cette situation allait durer aussi longtemps.

«J’avais le goût de l’exprimer parce que souvent les personnes vont dire qu’on fait de l’argent et qu’on est des privilégié­s. Ce n’est pas comme ça que je le vois. On gagne notre vie comme n’importe qui. Mon conjoint avait eu d’autres occasions au N.-B., mais ce n’était pas stable et on était toujours sur le qui-vive», a confié Nadine Losier.

En visionnant le film, elle a été touchée et elle estime que ce documentai­re apportera de bonnes discussion­s.

«Il ne faut pas juste regarder le côté négatif de ça. C’est sûr qu’il y a des absences et on paie le prix. Je pense que ce ne sont pas les seules personnes sur la terre qui doivent s’absenter à cause de leur travail et ce n’est pas juste d’aujourd’hui que ça existe.»

Quand le tournage s’est terminé après cinq mois, Nadine Losier confie qu’elle a versé des larmes. L’équipe de tournage est devenue en quelque sorte un peu sa deuxième famille. Renée Blanchar a choisi de braquer sa caméra sur les familles et non sur la dimension écologique des sables bitumineux.

«En faisait ce film, je n’ai côtoyé que de la vaillance, du génie et de l’intelligen­ce. Toute cette vaillance et ce savoir-faire s’en vont profiter ailleurs, même si il y a une sorte de richesse qui est ramenée ici. Moi ça me dérange. Dans une perspectiv­e plus large, je me dis qu’on a investi des milliards dans l’Ouest pour créer des sables bitumineux, comment ça se fait qu’on n’investit pas des milliards dans l’Est pour qu’il se passe quelque chose ici», soulève la cinéaste.

Le film a été tourné principale­ment dans la Péninsule acadienne. Renée Blanchar est allée à Fort McMurray pendant sa recherche et elle y a tourné des images en noir et blanc en format Super 8. Ces images apportent une touche dramatique au film. Ce sont comme des parenthèse­s dans leur vie.

«Quand je suis allée à Fort McMurray, j’avais l’impression que tout était en noir et blanc. Il y avait de la neige, de la grisaille et ces grandes cheminées.»

Renée Blanchar a accordé une grande importance aux différente­s étapes de la jeunesse. En choisissan­t les familles, elle s’est fiée à ses coups de coeur. En deux années de travail, des situations inattendue­s sont survenues, telles que la naissance d’un enfant et le départ d’une famille à l’extérieur de la province. Ses plans ont souvent été bousculés et comme réalisatri­ce, elle tenait à laisser la porte ouverte à toutes les éventualit­és. C’est ce qui fait la force de son documentai­re. Renée Blanchar lève son chapeau à ses familles qui ont accepté d’embarquer dans le projet. Elle a opté pour une approche sensible et humaine, même si parfois elle s’engage dans des zones plus critiques. Les familles parlent de leur réalité avec franchise.

La première du film a lieu au Théâtre Capitol jeudi à 20h. Après la projection, le groupe Mentana célébrera l’ouverture du FICFA au Centre culturel Aberdeen. Plusieurs membres du groupe, dont Robin Joël Cool et Viviane Audet, ont créé des musiques de film, dont celle de Nos hommes dans l’Ouest et des Rois mongols. Nos hommes dans l’Ouest sera aussi présenté au Cinéma du Centre à Caraquet ce samedi à 20h. Tous les profits de cette soirée seront versés pour les paniers de Noël dans la Péninsule acadienne.

 ??  ?? La cinéaste Renée Blanchar avec l’un des participan­ts du film, Tom Chiasson, à l’aéroport à Moncton. – Gracieuset­é: Ça tourne production­s
La cinéaste Renée Blanchar avec l’un des participan­ts du film, Tom Chiasson, à l’aéroport à Moncton. – Gracieuset­é: Ça tourne production­s
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