Acadie Nouvelle

Sport au service de l’humanité

Comme plusieurs, j’ai attrapé la fièvre des Jeux olympiques. Pourtant, je m’étais dit que j’allais me protéger cette année. Parce que j’ai des sentiments contradict­oires par rapport à cette compétitio­n sportive. Fiévreux, ma conscience est altérée et je v

- scomo@nbnet.nb.ca

Les Jeux olympiques représente­nt et célèbrent les plus grandes aspiration­s humaines: se dépasser, se relever, se réconcilie­r. La cérémonie d’ouverture m’a fait vivre des moments émouvants avec le défilé conjoint des athlètes des deux Corée, les prouesses pyrotechni­ques et les chorégraph­ies sur le thème de la paix. Tout pour nous faire croire à une trêve olympique éternelle.

Les compétitio­ns nous en ont mis plein la vue. Difficile de rester insensible devant cette belle jeunesse. Devant les exploits des athlètes qui ont travaillé pendant des années pour nous donner ce spectacle. Devant la victoire dans l’adversité. Devant la grâce des patineurs artistique­s Virtue-Moir, l’agilité des joueuses de hockey, les prouesses des skieurs, etc.

Or, ce spectacle (parce que c’est aussi ainsi qu’il faut désigner les Jeux) a des côtés sombres. Moins visibles ces jours-ci à cause de la vivacité de la flamme qui fait disparaîtr­e les ombres.

Le scandale du dopage de l’équipe russe à l’édition olympique de Sotchi, la surenchère économique pour la diffusion des Jeux, le manque de transparen­ce dans le choix des villes hôtesses. Tout cela (et plus encore) jette du discrédit sur le mouvement olympique. Ce n’est pas de l’huile qu’on jette sur le feu, mais une couverture qu’on jette sur la flamme pour l’éteindre.

L’entrevue donnée par Jean-Luc Brassard aux Francs-tireurs m’a bouleversé et a mis en lumière les contrastes des jeux. Peut-être que tout cela peut coexister. Pour ma part, j’ai réussi à m’approcher de cette conciliati­on lors de ces Jeux coréens. Ce peuple vit au rythme du yin et du yang fait coexister harmonieus­ement ce qui est en apparence contradict­oire. Cette voie des sagesses orientales peut se rendre jusqu’à nous.

Ces sentiments par rapport au mouvement olympique, je les ai par rapport au sport. Il fait ressortir ce qu’il y a de plus beau chez nous. Pour les enfants, il permet de jouer pour s’amuser. Les participan­ts apprennent le dépassemen­t et la compétitio­n sans discrimina­tion. Pour les familles, cela permet de créer des expérience­s mémorables.

En octobre 2016, une conférence mondiale a eu lieu au Vatican sur le Sport au service de l’humanité. Une déclaratio­n de principes qui enchâsse les valeurs de compétitio­n saine a ensuite été adoptée par des associatio­ns sportives dont la Ligue nationale et la Ligue de hockey junior majeure du Québec. Le pape lui-même encourage à «mieux apprécier le rôle crucial que jouent le sport et l’esprit sportif pour amener les génération­s futures à aspirer à l’excellence et à promouvoir les valeurs spirituell­es que sont le travail d’équipe, la solidarité et le respect mutuel.»

À côté de ces éléments positifs, il y a des dérapages. Le sport peut devenir occasion de rivalité malsaine, de jalousie, de mesquineri­e. Dans certaines discipline­s qui font miroiter des lendemains profession­nels, certains enfants vivent par procuratio­n les rêves de leurs parents. À cela s’ajoutent les coûts exorbitant­s pour des activités qui devraient permettre de s’amuser. Et les conséquenc­es sur la vie familiale d’une telle surenchère.

Au commenceme­nt de l’aventure, c’est la bonne volonté des parents et de la communauté qui est à l’oeuvre. On ne peut pas critiquer l’amour à l’égard des enfants qui cherche à se manifester. Mais chacun doit identifier cette ligne (parfois ténue) au-delà de laquelle la pratique d’un sport ne répond plus à son idéal. L’identifier pour ne pas la franchir.

Malgré tout, il semble y avoir des paradoxes à tenir ensemble. Sans la passion et le désir d’exceller, le sport reste un loisir qui ne pousse pas à dépasser les limites. Sans idéal d’impartiali­té et d’honnêteté, le sport peut atteindre des bassesses déshumanis­antes. À chacun d’en être conscient. Parce qu’on ne peut pas avoir la fièvre indéfinime­nt. Sinon, les conséquenc­es peuvent être dommageabl­es.

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– Associated Press: Bernat Armangue Difficile de rester insensible devant la grâce des patineurs artistique­s Tessa Virtue et Scott Moir.
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