SAUMON: UNE AUTRE ANNÉE DE REMISE À L’EAU
Les pêcheurs récréatifs de saumons de l’Atlantique devront se faire une raison. Il leur sera à nouveau interdit de conserver les prises pêchées dans les eaux du Nouveau-Brunswick cette saison.
Les glaces qui recouvraient la rivière Baie des Chaleurs ainsi que la Restigouche et ses tributaires viennent enfin de disparaître, au plus grand bonheur des pêcheurs.
D’ici quelques jours, ils pourront enfin jeter leur ligne à l’eau afin de taquiner le saumon noir, ces saumons qui ont passé l’hiver dans la rivière. Et d’ici la mi-mai, les premières montaisons de saumons provenant de la mer devraient commencer peu à peu à prendre la rivière d’assaut.
Mais dans un cas comme dans l’autre, les pêcheurs qui ont la main heureuse devront se résoudre à remettre leurs prises à l’eau.
Cette ligne directrice est valable pour toutes les rivières de la région du Golfe, donc le Nouveau-Brunswick, la NouvelleÉcosse et l’Île-du-Prince-Édouard. Elle inclut la Restigouche qui, pourtant, l’an dernier, a connu l’une de ses meilleures montaisons de saumons en 20 ans.
Cette mesure se retrouve dans le plan gestion pour la saison de pêche récréative au saumon de l’Atlantique concocté par le ministère de Pêches et Océans Canada (MPO). En vigueur depuis 2015, elle se veut une approche de précaution visant à protéger l’espèce.
Le ministère est d’avis que les montaisons des saumons n’ont pas atteint le nombre minimal nécessaire pour la conservation de l’espèce dans les deux bras de la rivière Miramichi pour 2017.
Sur la Restigouche, les choses sont relativement différentes. Les montaisons des saumons dans l’ensemble du bassin ont atteint 70% des besoins minimaux requis pour la conservation. D’après les dénombrements de fin de saison, l’indice des grands saumons reproducteurs en 2017 était supérieur aux besoins de conservation (135%). Mais malgré cette bonne performance, on n’y permettra aucune rétention des prises, ce qui ajoute de l’eau au moulin à ceux qui réclament une gestion plus adaptée, soit une gestion par rivière plutôt que par zone.
Parmi les adeptes de cette solution, on retrouve David LeBlanc, directeur général du Conseil de gestion du bassin versant de la Rivière Restigouche (CGBVRR). Comme bien des pêcheurs, il a accueilli les mesures du MPO avec une vive déception.
«On considère qu’avec les stocks actuels – et considérant que 98% des madeleineaux de la Restigouche sont des mâles –, on pourrait permettre une certaine rétention. Si on avait l’approche de gestion par rivière, nous pourrions prendre cette décision, choisir la quantité et la façon dont on permet la rétention. On pourrait même faire des évaluations de mi-saison afin de s’assurer que les stocks soient suffisants. Malheureusement, le MPO ne semble pas encore prêt à aller vers cette voie», indique M. LeBlanc.
Pour le DG, l’absence de rétention n’est pas sans conséquence. Depuis le début de la remise à l’eau obligatoire, il dit observer une baisse constante de l’achalandage de pêcheurs sur les sections publiques de ses rivières.
«Ce n’est pas dramatique, mais ça demeure préoccupant. Car ce que l’on prétend, c’est que cette perte se fait au profit du braconnage. Et cet impact est bien pire que de permettre une rétention», croit le gestionnaire.
Ce qui n’aide pas non plus à faire passer la pilule de la décision du MPO, c’est que le statu quo demeure en ce qui concerne la pêche sur la portion québécoise de la Restigouche. Les pêcheurs du Québec peuvent en effet conserver leurs prises puisqu’il s’agit d’une juridiction différente.
«La disparité entre les plans de gestion existe toujours. Nous avons donc une rivière frontalière avec des lois différentes. D’un côté, on peut conserver des prises, et de l’autre non. Cela créé inévitablement des conflits», estime LeBlanc, notant par contre que les quotas de rétentions québécois ont été passablement revus à la baisse.
«Le contingent de pêche annuelle de petit saumon de l’Atlantique (madeleineau) demeure à zéro pour la pêche récréative du saumon de l’Atlantique. Comme en 2017, il est obligatoire de remettre à l’eau tout saumon de l’Atlantique durant la saison de pêche à la ligne», peut-on lire dans le document du MPO.