Acadie Nouvelle

CHEMIN PLEIN D’EMBUCHES JUSQU’AU DIPLÔME

Chantal Pelletier n’alimente peut-être pas l’actualité et les conversati­ons au Madawaska comme peuvent le faire le Blizzard d’Edmundston, la Foire brayonne ou le Centre Jean-Daigle, mais elle mérite certaineme­nt sa petite étoile et son moment de gloire.

- sebastien.lachance@acadienouv­elle.com @SbastienLa­chan4

La résidente de Rivière-Verte a récemment appris qu’elle figure parmi les lauréats des prix de l’Alphabétis­ation 2018 du Conseil de la fédération.

Son parcours est à la fois porteur de joie, d’espoir et empreint d’une infinie tristesse.

Le récit de la seule Acadienne décorée de la sorte cette année révèle une fois de plus le côté sombre de l’intimidati­on en milieu scolaire.

Mais il est aussi synonyme de succès, de rêves réalisés et de bonheur.

Victime d’intimidati­on, Chantal Pelletier a quitté l’école à l’âge de 15 ans.

Maintenant âgée de 48 ans, elle a décidé de réaliser l’un de ses rêves, soit de retourner aux études et d’obtenir ses premiers diplômes.

Sans aucune gêne ou retenue, la mère de famille du Madawaska a fait le récit en détail à l’Acadie Nouvelle de son cheminemen­t scolaire en bas âge qui ne fut pas de tout repos.

«J’ai rapidement été intimidée à l’école. Je ne parlais pas énormément et je bégayais beaucoup à l’époque. Jusqu’à l’âge de 15 ans, ç’a été une succession de claques à la tête, de poussées, de crachats et de coups de bottes», raconte d’emblée Chantal Pelletier.

«Mon père gardait également des dindes à un certain moment, alors je me faisais aussi traiter de maudite dinde à l’école ou encore de patate pourrie. Ce n’était pas beau. Je ne marchais même pas sur le chemin principal pour aller à l’école.»

Effrayée à l’idée de retrouver ses intimidate­urs à l’école Cité des jeunes A.-M. Sormany d’Edmundston, elle a tout bonnement décidé de délaisser les salles de classe avant le début de l’année scolaire 1981-1982.

La femme se dirigera plutôt vers le marché du travail, sans diplôme d’études secondaire­s en poche.

L’expérience s’avèrera peu enrichissa­nte ou lucrative.

Une trentaine d’années plus tard, Chantal Pelletier est de retour à l’école, cette fois dans le cadre du programme communauta­ire d’apprentiss­age pour adultes, offert à Saint-Basile.

Ses efforts lui ont permis de terminer quatre niveaux d’éducation en à peine huit mois.

En septembre, il ne lui restera plus qu’à compléter des cours de mathématiq­ue et de sciences pour obtenir le diplôme si cher à ses yeux et à ceux de ses proches.

UNE FORCE ET UNE PAIX INTÉRIEURE

Chantal Pelletier tire sans doute sa force intérieure de son père, décédé il y a un peu plus d’un an.

«Mon père m’a dit un jour qu’il faudrait que je retourne sur les bancs d’école, que j’obtienne mon permis de conduire et que je fasse quelque chose de ma vie», raconte-t-elle.

«Avant son décès, je suis allée le voir à l’hôpital pour lui dire que je retournais finalement à l’école. C’est maintenant chose faite, comme mon permis de conduire que j’ai obtenu il y a environ deux semaines.»

Douce ironie, le destin aura fait en sorte de réunir Chantal Pelletier et son fils, Pascal, son voisin immédiat de classe au programme communauta­ire d’apprentiss­age pour adultes à Saint-Basile.

«Il était également victime d’intimidati­on et a lui aussi dû quitter l’école. Aujourd’hui, nous allons en classe ensemble», précise Chantal Pelletier.

La lauréate doit recevoir sa récompense de la main du premier ministre du NouveauBru­nswick, le 17 avril, à Fredericto­n.

Reste à savoir qui lui remettra un certificat, un médaillon et un chèque au montant de 300$ au printemps 2019, une question à laquelle Mme Pelletier ne peut malheureus­ement pas répondre…

Elle remettra la moitié de sa bourse à son école, assure-t-elle.

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- Gracieuset­é Chantal Pelletier (au centre) adore son expérience en classe à Saint-Basile.
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