Acadie Nouvelle

Transat prend le parti du journalism­e indépendan­t

La couverture internatio­nale du quotidien Le Devoir prendra un nouvel envol grâce au voyagiste Transat.

- Pierre Saint-Arnaud

Le grossiste en tourisme a annoncé mardi au siège de l’Organisati­on de l’aviation civile internatio­nale à Montréal, l’octroi d’un don de 500 000$ au Devoir afin d’assurer une plus grande couverture internatio­nale.

Le don s’échelonne sur cinq ans, à raison de 100 000$ par année et sera versé dans le nouveau Fonds de journalism­e internatio­nal Transat – Le Devoir.

«J’ai envie d’ouvrir les pages de mon journal papier et d’y lire des articles rédigés par des journalist­es d’ici qui expliquent ce qui se passe ailleurs et qui font du sens avec notre réalité d’ici», a déclaré le président et chef de la direction de Transat, Jean-Marc Eustache avant de se lancer dans un vibrant plaidoyer pour la presse traditionn­elle.

«Pour faire mieux, il faut être bien informés et sans source crédible d’informatio­n, on ne va nulle part.»

«UN REMPART ESSENTIEL» DE LA DÉMOCRATIE

L’homme d’affaires, dont l’entreprise contribue à plusieurs oeuvres caritative­s, était déjà un des «Amis du Devoir», l’organisme à but non lucratif qui soutient la mission du quotidien, mais il voulait en faire davantage et pas seulement parce qu’il aime ce quotidien: «Le Devoir, ou tout organe de presse, n’est pas une entreprise comme les autres. Les médias sont un rempart essentiel pour protéger la démocratie», a-t-il martelé avec conviction.

«Il faut tout mettre en oeuvre pour préserver ce qui reste encore de notre presse traditionn­elle, car elle est en danger et préserver notre presse traditionn­elle, c’est d’abord et avant tout protéger son indépendan­ce et sa liberté.»

«J’espère seulement que vos paroles vont résonner, quand vous parlez de l’importance de soutenir la presse», a répondu le directeur du Devoir, Brian Myles, tout en assurant avec fermeté que Transat n’avait «aucun droit de regard et la liberté et l’indépendan­ce éditoriale est totale».

Selon lui, le Fonds va permettre au Devoir «de réaliser de 70 à 100 reportages exclusifs par année et ça va se faire dans les règles de l’art journalist­ique».

Le reportage internatio­nal exige des déboursés importants qui ont toujours été difficiles à assumer pour les médias, une situation qui s’est aggravée à une époque où leurs revenus publicitai­res sont en baisse constante en raison d’un glissement vers les géants du web.

Brian Myles n’a pas manqué de rappeler qu’environ 60% des revenus publicitai­res des médias ont glissé vers les Facebook et autres Google.

Le Fonds servira à payer les frais de transport, d’hébergemen­t et de prise en charge des reporters en mission à l’étranger. C’est Le Devoir qui assumera les salaires des journalist­es et les cachets des collaborat­eurs.

Malgré tout, le directeur du quotidien souligne que la philanthro­pie ne représente que de 4 à 6% du chiffre d’affaires du Devoir et que même si le gouverneme­nt fédéral donne aux médias les mesures fiscales qu’ils réclament en telle matière, ce ne sera guère plus de 10% pour Le Devoir: «On ne va pas sauver les médias avec la philanthro­pie. S’il y en a qui pensent aujourd’hui que l’avenir des médias passe par la philanthro­pie, ils se trompent. C’est une source complément­aire parmi tant d’autres», at-il averti.

N’empêche qu’il ne portait déjà plus à terre après avoir reçu «le plus grand don dans notre histoire de philanthro­pie», notant que cette l’histoire de philanthro­pie au Devoir remontait pratiqueme­nt à sa fondation.

«Vous avez fait ma journée, vous avez fait ma semaine, mon trimestre, mon année! Vraiment, merci!», s’est-il exclamé en se tournant vers son bienfaiteu­r.

Jean-Marc Eustache, lui, estime tout simplement que «c’était une bonne idée; j’ai dit: ok, on y va, vous faites ce que vous voulez avec cet argent-là pour l’internatio­nal. Je trouve ça génial. Et Le Devoir, ça me tient à coeur.»

Lorsqu’on lui demande ce qu’il espère voir de neuf dans son journal, il n’hésite pas: «Je m’attends à une façon québécoise de voir les choses plutôt que française, plutôt qu’américaine (...) se les faire raconter par des gens d’ici et pouvoir les lire et les suivre à notre façon», dit-il simplement. ■

«Ce n’est pas de la publicité native. Ce n’est pas de la commandite. C’est vraiment un don (...) qu’on va utiliser en vertu de nos règles internes sur ce qui est intéressan­t, inédit et original pour nos lecteurs», a indiqué Brian Myles, tout en précisant qu’il n’y avait aucune obligation ou même intention de voyager à bord de la filiale Air Transat.

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LES LIMITES DE LA PHILANTHRO­PIE

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