Acadie Nouvelle

La gouvernanc­e locale a peu changé depuis 2008

- Real Fradette real.fradette@acadienouv­elle.com

Jean-Guy Finn a de la patience à revendre. Il en faut quand on parle de la gouvernanc­e locale. Il y a 10 ans, il pondait un rapport qui a immédiatem­ent laissé une marque indélébile dans l’histoire de la municipali­sation du Nouveau-Brunswick. Un rapport tout à fait pertinent malgré le temps passé et le peu de réalisatio­ns concrètes, réitèret-il. Un rapport qui avait ébranlé la classe politique à l’époque et qui aurait aujourd’hui plus de mordant, s’il avait la chance de le mettre à jour.

Le document de 212 pages et contenant pas moins de 97 recommanda­tions demeure encore la parole d’évangile de la gouvernanc­e locale aujourd’hui. Toutes les organisati­ons municipale­s en font régulièrem­ent référence quand vient le temps de parler de regroupeme­nt de services.

Car le rapport Finn est loin d’être mort, même si peu de choses ont réellement changé depuis novembre 2008.

Son auteur regarde attentivem­ent ce qui se déroule à travers la province depuis la publicatio­n de cette large étude. Elle recommanda­it notamment la création de 53 municipali­tés et 12 centres de services régionaux ainsi que l’amalgamati­on de tous les districts de services locaux, des entités proposées par le rapport Byrne de 1963 et créées en 1967 dans la foulée de Chances égales pour tous du gouverneme­nt libéral de Louis J. Robichaud.

Le spécialist­e est-il déçu de voir son travail amasser de la poussière sur une tablette quelconque du ministère des Gouverneme­nts locaux à Fredericto­n? Non, rétorque-t-il. Car les choses vont bouger à un moment donné, évalue-t-il. Et plus tôt que tard, prévoit-il, compte tenu des problèmes récurrents liés au manque de municipali­sation.

«Ce n’est pas le scénario que j’avais envisagé, commente M. Finn en voyant les minces changement­s structurel­s apportés depuis 10 ans. Oui, il y a bien des commission­s de services régionaux en place, mais je les voyais se former après la pleine municipali­sation et elles gèrent des services qui étaient déjà régionalis­és (collecte des ordure et l’urbanisme). On a vu aussi quelques fusions municipale­s en deux ou trois communauté­s rurales, mais c’est à peu près tout. Je ne suis pas déçu, mais il va falloir que ça se fasse un jour ou l’autre. On n’aura pas le choix.»

«IL FAUT ALLER PLUS LOIN»

À son avis, la situation actuelle de la province en terme de gestion de la gouvernanc­e locale ne répond plus à sa réalité démographi­que et économique. C’était le cas en 2008 et ça l’est encore davantage maintenant, pointe-il.

Dans les années 1960, la création des DSL convenait à une communauté constituée de petits villages isolés et de quelques villes. Aujourd’hui, avec 85% de la population qui vit dans un rayon de 50 km de l’une des huit cités du Nouveau-Brunswick, il faut revoir en profondeur les structures gouverneme­ntales, précise le chercheur.

«Il faut aller plus loin. C’est pourquoi mon rapport est encore valide. J’irais même jusqu’à dire qu’il est encore plus valide qu’il y a 10 ans. Et si j’avais à le faire aujourd’hui, j’irais encore plus loin parce que les changement­s démographi­ques et économique­s se sont accélérés. Les conditions commandent d’aller plus loin», fait-il remarquer.

«NOUS APPROCHONS DU POINT DE RUPTURE»

Cet analyste de la scène municipale apprécie les pressions des regroupeme­nts auprès des gouverneme­nts successifs depuis une décennie. Cependant, il ne donne pas les mêmes félicitati­ons à Fredericto­n, qui tarde toujours à s’engager convenable­ment dans cette réforme nécessaire, déplore-t-il.

«Le gouverneme­nt a-t-il la volonté de changer les choses? Je ne sais pas. Nous voyons bien quelques indices ici et là de gens qui souhaitent un certain changement et dans 10 ans, ces transforma­tions continuero­nt dans la même direction. La demande sera tellement évidente que le gouverneme­nt n’aura plus le choix. Il repousse actuelleme­nt la chose le plus longtemps possible, mais nous approchons le point de rupture. Pour corriger la question des déficits et de la dette, il faut absolument revoir comment notre gouvernanc­e est organisée», appuie-t-il.

Jean-Guy Finn a de la patience à revendre, c’est vrai. Mais il aimerait bien - de son vivant, espère-t-il avec le sourire - que son rapport ne demeure pas que des mots remplissan­t 212 pages d’un document amassant de la poussière sur une tablette quelconque à Fredericto­n.

Mais ça, seul le temps nous le dira…

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Le rapport Finn est loin d’être mort, même si peu de choses ont réellement changé depuis novembre 2008. - Archives
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