Le jour où la municipalité de Tracadie a fait l’histoire
Lundi 2 décembre 2013. Dans une salle, un groupe attend fébrilement les résultat du plébiscite concernant le regroupement du Grand Tracadie. Les résultats entrent au compte-gouttes. Puis, à 22h, le verdict tombe: le Oui l’emporte!
Les cris de joie fusent de partout. Plus de trois ans de travail viennent de se tranformer en victoire. Par la peau des fesses, certes - à peine 335 voix de majorité sur plus de 6000 votes -, mais une victoire quand même.
La Municipalité régionale du Grand Tracadie vient de naître. La grossesse a été longue et ardue. L’accouchement douloureux et déchirant. Le bébé vient juste d’ouvrir les yeux et on voudrait déjà qu’il marche. Non, qu’il court!
Gaétan Lanteigne se souvient très bien de cette soirée. Il en a pleuré, tellement la joie était intense. Et probablement de fatigue aussi.
Les dernières semaines de la campagne ont été difficiles, voire acrimonieuses. Le comité du Non avait repris du poil de la bête. Les attaques se faisaient de plus en plus virulentes. Une semaine de plus et rien ne dit qu’il n’aurait pas renversé la tendance. Pas certain que les plaies étaient totalement guéries autour de la dinde de Noël…
Le rapport Finn sur la réforme de la gouvernance locale, parue cinq ans plus tôt, avait servi de prémisse au comité Ensemble pour l’avenir. Ça et quelques autres nouvelles pas très rigolotes, comme la régionalisation des services de police dans la Péninsule acadienne, notamment.
«Le rapport Finn nous a fait comprendre que les DSL n’avaient pas leur destinée en mains. Ça été le déclencheur d’une prise de conscience qu’il fallait s’unir pour grandir. Nous n’avions aucun pouvoir décisionnel, aucun représentant autour de la table du conseil à Tracadie… Il fallait se créer une structure gouvernementale pour avancer en tant que communauté. Nous avons saisi l’occasion», se souvient celui qui était le président de ce groupe.
UNE EXCEPTION
L’événement a été historique. Le Grand Tracadie, avec ses 16 000 citoyens, avait maintenant une structure de gouvernance complète. Ç’aurait dû devenir la norme. Cinq ans plus tard, c’est encore l’exception.
Il y a bien eu quelques projets qui ont obtenu du succès à travers la province, précise Gaétan Lanteigne, mais les barrières sont encore tellement nombreuses qu’elles découragent les communautés à songer à se regrouper.
L’exemple la plus récente aux îles Lamèque, où les citoyens ont refusé par peur de voir notamment leur taux de taxe foncière monter en flèche, n’a fait que renforcer son opinion.
«C’est un projet difficile à développer car il demande énormément de ressources bénévoles. Ensemble pour l’avenir, c’était plus de 150 personnes aux compétences diversifiées. Ç’a été une victoire d’équipe. Cela a pris beaucoup de ténacité aussi. On a rapidement arrêté de compter les heures mis dans ce projet. Il fallait vraiment le vouloir. Il y avait aussi des facteurs hors de notre contrôle qui ont fait en sorte que c’était ardu. Il s’est dit beaucoup de choses négatives, qui a pris le dessus sur le positif», argumente-t-il.
LA MEILLEURE DÉCISION
Cinq ans après ce vote, Gaétan Lanteigne est persuadé que ça été la meilleure décision. Pas question de revenir en arrière, soutient-il. Et ce, malgré toutes les mauvaises nouvelles qui tombent sur le dos de Tracadie depuis plus d’un an. Làdessus, il estime qu’il faut éviter de faire un amalgame rapide entre ces mauvaises manchettes qui frappent continuellement l’administration du maire Denis Losier et le regroupement.
«Il ne faut pas mélanger les pommes avec les oranges, précise-t-il. Ce qui se passe à Tracadie concerne l’administration. Ce n’est pas en raison du regroupement. Ça prend un temps d’adaptation à ces changements qui sont historiques, faut-il le rappeler. Nous avons aujourd’hui une municipalité régionale et une force de frappe qui rejaillit sur toute la Péninsule acadienne. Ça ne fait que cinq ans, pas 20! À mon avis, le meilleur est à venir. Du moins, je l’espère.» ■