Acadie Nouvelle

MAIRES ET CONSEILLER­S NE SONT PAS ASSEZ PAYÉS

Le maire de Richibucto n’obtient même pas le tiers du salaire qu’il devrait empocher

- Jean-marc Doiron jean-marc.doiron@acadienouv­elle.com @jmdoironAN

Des élus municipaux d’un peu partout dans la province étudient la possibilit­é de bonifier leur rémunérati­on. Plusieurs intervenan­ts du milieu jugent que les maires et les conseiller­s ne sont pas assez payés, ce qui nuit au recrutemen­t et à la qualité du travail.

Au Nouveau-Brunswick, les maires et les conseiller­s municipaux sont responsabl­es d’établir leur propre salaire.

Une telle formule place les élus dans une situation difficile. Dans bien des municipali­tés, le sujet est tabou, selon Frédérick Dion, directeur général de l’Associatio­n francophon­e des municipali­tés du Nouveau-Brunswick (AFMNB).

Craignant les réactions du public, plusieurs conseils municipaux évitent tout simplement la question pendant des années.

«Ils finissent par ne jamais se donner un salaire décent.»

Au cours des dernières semaines, deux municipali­tés du Nord-Ouest, notamment, ont annoncé que leurs élus bénéficier­aient d’une augmentati­on de salaire dès 2019. Cette mesure, qui visait à dédommager les élus étant donné que leur rémunérati­on est maintenant imposable, a fait l’objet de nombreuses critiques sur les médias sociaux.

Pourtant, dans certains cas, on a calculé que des élus municipaux travaillai­t à un salaire horaire de 2$ ou 3$, avance M. Dion, un niveau qu’il qualifie de «ridicule».

Certains élus perdent même de l’argent en siégeant à un conseil municipal, étant parfois forcés de prendre congé de leur emploi.

Les heures de travail consacrées à la municipali­té sont en effet très nombreuses, confirme le maire de Bouctouche, Roland Fougère.

«Parfois, je me réveille à 5h pour faire mon quart de travail normal afin d’être à l’édifice municipal à 15h pour réviser des dossiers et me renseigner sur les travaux du jour. Le soir, je suis presque toujours à des réunions de comité», explique-t-il.

La faible rémunérati­on crée un problème de recrutemen­t. Peu de jeunes profession­nels, entre autres, peuvent se permettre de prendre un tel engagement sans être adéquateme­nt compensés.

Face à leur dilemme, les municipali­tés ont demandé à l’AFMNB de concevoir un outil permettant d’établir objectivem­ent les rémunérati­ons.

L’équipe de M. Dion a donc étudié les salaires de conseils municipaux à travers le pays afin d’établir un guide de rémunérati­on. Le mois dernier, les municipali­tés membres de l’AFMNB se sont engagées à l’utiliser en révisant le salaire de leurs élus.

Le conseil municipal de Saint-André, entre autres, se penche sur la question. Le salaire du maire pourrait passer de 6760$ à 16 375$.

Le conseil municipal de Dieppe, lui, a demandé à un comité de citoyens d’évaluer les rémunérati­ons. Il a conclu que le salaire du maire devrait passer de 38 825$ à 78 000$.

BOUCTOUCHE ET RICHIBUCTO

Les municipali­tés voisines de Bouctouche (2361 habitants) et Richibucto (1266 habitants) en sont à deux étapes différente­s du processus.

L’an dernier, le conseil municipal de Bouctouche est devenu l’un des premiers du Nouveau-Brunswick à adopter la formule proposée par l’AFMNB. Avant, le maire Roland Fougère recevait un salaire annuel de 6000$, en plus d’une prime de 200$ par réunion. Au total, il touchait à environ 10 000$ par année. Aujourd’hui, il obtient la somme de 25 000$. Les primes de réunion ont été éliminées.

«Avant, ça me coûtait de l’argent pour siéger au conseil. Parfois, mon épouse me disait que j’étais fou, et je commençais à la croire. Pour l’avenir, avec les autres maires et conseiller­s qui vont venir, ça sera plus attrayant. Presque tous les maires et conseiller­s ont été élus par acclamatio­n depuis une demi-douzaine d’élections.»

À Richibucto, le maire Roger Doiron reçoit un salaire de base de 5000$, en plus d’une prime de 150$ par réunion ordinaire. Le tout lui donne environ 8000$ par an, montant qui n’a pas changé depuis de nombreuses années. Les conseiller­s municipaux reçoivent environ la moitié de cette somme. Si on tient compte de l’inflation, leur rémunérati­on relative diminue d’année en année.

Selon le guide de l’AFMNB, le maire de Richibucto n’obtient même pas le tiers du salaire qu’il devrait empocher, soit de 25 001$ à 35 250$. Les conseiller­s devraient recevoir un peu moins de la moitié de la rémunérati­on du maire.

Lors d’une réunion ordinaire, mardi dernier, le conseil était divisé sur la question.

Roger Doiron ajoute que le fait d’obtenir un salaire adéquat aurait un effet motivateur sur les membres du conseil. Ils se sentiraien­t plus redevables face à leurs responsabi­lités, selon lui.

«On est cinq membres, et trois ou quatre en faveur. L’un des membres s’oppose, puisqu’il voit son rôle au conseil comme du bénévolat. Mais au fond, ce qu’on fait est semblable à gérer une entreprise ayant un budget annuel de 2 millions $.»

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À Richibucto, le maire Roger Doiron reçoit un salaire de base de 5000$, en plus d’une prime de 150$ par réunion ordinaire. - Archives (En manchette de la page frontispic­e: Roland Fougère, maire de Bouctouche. - Archives)
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