Acadie Nouvelle

«C’est un sale temps pour le français au Canada» – Mario Beaulieu

- Mélanie Marquis

La seule unilingue francophon­e du cabinet Trudeau, Diane Lebouthill­ier, a été outrée de se faire reprocher par un député conservate­ur - un élu du Québec, de surcroît - de privilégie­r la langue française dans ses interventi­ons à la Chambre des communes.

Lors de la période de questions, mardi après-midi, celle qui suit des cours d'anglais depuis son arrivée sur la colline en 2015 a offert une réponse dans la langue de Molière à un député conservate­ur de l'Alberta.

Quand son tour de parole est venu, l'élu québécois Luc Berthold a déploré, dans la prémisse de sa question à Diane Lebouthill­ier, que «nous (les conservate­urs) on pose des questions en anglais, en français, mais on a juste des réponses en français par exemple».

La ministre a été piquée au vif, et au moment de répliquer, elle a lancé qu'elle ne serait «jamais gênée de parler français» en tant que «fière Québécoise». Dans les banquettes libérales, on s'est levé d'un bond pour l'applaudir bruyamment.

«Je voudrais faire remarquer à mon collègue qu'il y a des gens du côté des conservate­urs qui sont en poste depuis beaucoup plus longtemps que moi et qui ne parlent pas français, qui ne suivent pas de cours de français», a-t-elle réagi en mêlée de presse à sa sortie de la Chambre. «Moi au moins (...) je suis des cours d'anglais, et je continue d'essayer de pratiquer mon anglais», a argué Mme Lebouthill­ier, qui n'est toujours pas suffisamme­nt à l'aise d'accorder des entrevues en anglais en raison des «technicali­tés» liées à son rôle de ministre du Revenu.

«J'ai un souvenir assez intense lorsque (la première ministre québécoise) Pauline Marois, à un moment donné, avait essayé de parler en anglais, puis je peux vous dire qu'elle s'était fait ramasser d'aplomb par les médias», a-t-elle spécifié. La députée gaspésienn­e a réclamé des excuses, ce que Luc Berthold a assuré avoir fait à l'issue de la période des questions. «La raison pour laquelle je me suis excusé, c'est que dans l'émotion (...) peut-être que certaines personnes ont pu percevoir mes propos comme une attaque (contre) Mme Lebouthill­ier. Ce n'était pas du tout le cas», at-il assuré en mêlée de presse.

L'élu de Mégantic-L'Érable a martelé que lui-même se faisait un point d'honneur de parler français dans l'exercice de ses fonctions. «Toutes mes interventi­ons sont en français ici, toutes mes interventi­ons en comité, 99% de mes interventi­ons, sont en français», a-t-il lancé.

Luc Berthold a par ailleurs fait valoir qu'il avait formulé cette critique parce que Justin Trudeau avait accusé un peu plus tôt les conservate­urs de ne pas oser demander en anglais des questions qu'ils posaient en français (au sujet de la déclaratio­n de revenus unique au Québec).

La récriminat­ion conservatr­ice montre que «les conservate­urs prétendent être à l'écoute du Québec», mais qu'ils «ne veulent pas entendre parler français en Chambre», a déploré le bloquiste Mario Beaulieu, ajoutant que «c'est un sale temps pour le français au Canada».

En avril 2016, la ministre Lebouthill­ier s'était fait reprocher son inconfort à s'exprimer dans la langue de Shakespear­e après qu'elle eut décliné une entrevue avec la radio du service anglophone de Radio-Canada.

Cette situation avait laissé perplexes les auditeurs de l'émission As it Happens, selon le réseau, qui a publié dans la foulée de ce refus un texte intitulé «Les ministres devraient-ils parler les deux langues officielle­s?».

Cet épisode avait mené l'élue du Québec à conclure que les francophon­es étaient jugés plus sévèrement pour leur unilinguis­me. Au sein du conseil des ministres du gouverneme­nt libéral, environ la moitié des ministres sont unilingues anglophone­s. ■

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– La Presse canadienne: Adrian Wyld La ministre Diane Lebouthill­ier, qui est aussi députée de Gaspésie–Les Îles-de-laMadelein­e, lundi, à la Chambre des communes. Mme Lebouthill­ier est diplômée l’Université de Moncton.

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