TOUT N’EST PAS ROSE AU PAYS DU GAZ DE SCHISTE
Corridor Resources renonce à creuser de nouveaux puits au Nouveau-Brunswick, invoquant des «incertitudes réglementaires» occasionnées par l’obligation de la province de consulter les Premières Nations.
Dans un communiqué, l’entreprise annonce qu’elle suspend sa recherche d’investisseurs pour soutenir un projet d’exploitation du gaz de schiste de plusieurs millions de dollars.
Corridor Resources est le seul producteur en activité, et le seul à avoir déclaré publiquement son intention d’investir davantage dans la province.
La plus grande partie de sa production provient du gisement de McCully situé à Penobsquis, au nord-est de Sussex. L’entreprise s’intérese désormais à la formation du ruisseau Frederic qui pourrait contenir 180 millions de mètres cube de gaz naturel.
Dans une présentation faite aux investisseurs en décembre dernier, la société avait dévoilé son intention de creuser une douzaine de puits dans le secteur, au coût de 77 millions $. Le projet devait se concrétiser en 2021.
Tout semblait pourtant se dérouler selon leurs plans. Le gouvernement du NouveauBrunswick a annoncé, début juin, la levée partielle du moratoire sur la fracturation hydraulique dans la région de Sussex, mettant ainsi fin au moratoire adopté en 2014 par le précédent gouvernement libéral.
La fracturation hydraulique est un processus qui consiste à pomper de l’eau et des produits chimiques à haute pression pour fracturer le schiste et libérer le gaz naturel retenu par cette roche imperméable.
En juillet, les 15 chefs Mi’kmaq et Wolastoqey de la province ont réagi en prévenant officiellement le gouvernement qu’ils poursuivront leurs efforts pour protéger les terres, l’eau et les ressources du Nouveau-Brunswick. Les chefs s’engagent à faire front commun en veillant à ce que la Couronne respecte ses obligations en matière de consultation.
«Dans son discours du trône, le gouvernement Higgs s’est engagé à tenir les promesses non tenues envers les Premières Nations et à définir une nouvelle relation qui inclurait davantage de contrôle sur les terres et les ressources. La décision d’exempter secrètement le moratoire de la région de Sussex du moratoire sur la fracturation hydraulique sans aucune consultation avec les peuples autochtones a l’effet inverse et perpétue le statu quo dans les relations entre le gouvernement du Nouveau-Brunswick et les peuples autochtones», écrivent-ils.
Le ministre du Développement de l’énergie et des ressources naturelles, Mike Holland, a alors promis que les Premières Nations seront consultées avant de laisser l’industrie aller de l’avant.
Corridor Resources mentionne dans son communiqué que le gouvernement l’a informé qu’il n’était pas en mesure d’examiner les demandes de dérogation au moratoire alors qu’il engageait ce processus de consultation.
«Il est difficile de prévoir le moment où le processus de consultation sera terminé. En raison de l’incertitude réglementaire qui règne au Nouveau-Brunswick, à savoir quand et si les terres de Corridor deviendront exemptes du moratoire, Corridor a limité et limité sa capacité à commercialiser le gisement de schiste de Frederick Brook auprès de partenaires éventuels. Par conséquent, Corridor reporte la commercialisation du gisement de schiste de Frederick Brook jusqu’à ce que le moratoire pour ce qui est de nos permis et que le processus réglementaire devienne clair et cohérent avec les autres juridictions productrices de pétrole et de gaz.»
L’entreprise ajoute qu’elle continue d’identifier et d’évaluer des occasions d’investissement en dehors de la province.
«Avec un fonds de roulement d’environ 64 millions $, Corridor bénéficie d’une marge de manoeuvre considérable pour saisir les possibilités de déploiement de notre capital», souligne le PDG, Steve Moran.
Bien entendu, l’annonce n’a pas été accueillie de la même façon par tous dans la région de Sussex.
«Je trouve ça dommage, il faut que notre province réussisse à créer un environnement plus favorable aux entreprises. Je suis déçu qu’ils ne soient pas confiants d’investir. La ressource est là», regrette Stephen Moffet, un résident de Penobsquis favorable à un développement du secteur.
Je suis soulagé, mais je crois que Corridor essaie surtout de mettre la pression sur le gouvernement», estime quant à lui John Cushnie, membre du groupe Sussex Area for a Frackfree Environment.