Légionellose: vers une meilleure gestion des tours de refroidissement?
Les municipalités ou les provinces devraient-elles se munir d’un registre des tours de refroidissement à titre préventif?
L’éclosion de légionellose à Moncton a souligné l’absence de registre ou de documentation quelconque sur les tours aérorefroidissantes, cet équipement de climatisation qui est si propice au développement des bactéries.
Le Dr Yves Léger, médecin-hygiéniste de la région du sud-est, a déjà détaillé la difficulté du travail de dépistage de la bactérie étant donné l’absence d’un registre des tours de refroidissement. Il a pu compter sur l’aide d’employés de la Ville de Moncton dans son effort de dépistage.
Il a aussi affirmé avoir l’intention de recommander la mise en place d’une base de données de ce genre au terme de son enquête. Ce n’est rien de nouveau.
La chercheuse Lan Chi Nguyen Weekes, du collège La Cité d’Ottawa, a participé à bon nombre d’études sur la présence de la bactérie legionella dans les tours de refroidissement.
Elle explique que les régions n’ont tendance à prendre conscience de l’importance de surveiller les tours de refroidissement que lorsqu’une éclosion de légionellose se déclare, comme c’est actuellement le cas pour Moncton.
À Québec en 2012, plus de 180 cas de légionellose déclarés dans le centre-ville avaient entraîné 14 morts, principalement chez la population plus à risque, soit des hommes fumeurs de cinquante ans et plus.
«Il y a des directives au niveau du gouvernement fédéral, ils ont des documents qui aident à identifier les sites potentiels de contamination et sur comment les désinfecter. Il n’y a pas nécessairement quoi que ce soit dans la loi (canadienne), mais il y a des règlements très précis au Québec à la suite de l’épidémie de 2012», souligne l’experte.
Depuis ce temps-là, il existe un registre de ces appareils et la Régie du bâtiment du Québec reçoit régulièrement des mises à jour sur l’état des tours.
Ces appareils sont souvent utilisés pour assurer la climatisation d’établissements industriels. Or, la présence d’eau stagnante à une certaine température est souvent propice au développement de la bactérie legionella, et l’eau contaminée est alors vaporisée et répandue dans l’air.
La bactérie legionella peut causer une variété de problèmes de santé lorsqu’elle est inspirée sous forme de fines gouttelettes d’eau. La forme la plus grave de l’infection, la légionellose, cause des symptômes apparentés à une pneumonie et peut causer la mort dans les cas les plus extrêmes.
Lan Chi Nguyen Weekes a récemment participé à une étude des National Academies of Sciences, Medicine and Engineering, aux États-Unis, qui a fourni bon nombre de recommandations à nos voisins du sud. L’une des recommandations était la mise en place de registres des tours aérorefroidissantes.
«Nous avons fait la recommandation d’avoir un registre de ce genre. La Ville de New York, par exemple, a un tel registre, mais souvent, ça a été fait après qu’il y ait eu une épidémie. On devrait plutôt le faire de façon préventive», estime-t-elle.
Elle argumente aussi que cette façon de faire est très peu dispendieuse pour les gouvernements et les entreprises.
«[En cas d’éclosion], ça permet à l’épidémiologiste de savoir exactement ce qui se passe dans un secteur», dit-elle.
Elle souligne que le but ne serait pas nécessairement de dicter aux entreprises la façon de faire l’entretien de cet équipement, mais de s’assurer que les autorités puissent au moins garder un oeil sur les résultats d’inspections.
«Avec le règlement du Québec, [les entreprises] doivent faire des tests à intervalle régulier, et si ces tests-là ont des résultats un peu alarmants, ils en avertissent la santé publique», affirme la chercheuse. ■