Des municipalités veulent faire des eaux usées un enjeu électoral
Dans la plus grande ville du Canada, les eaux usées se déversent si souvent dans le lac Ontario que les autorités recommandent à la population d’éviter la baignade pendant au moins deux jours suivant une pluie.
À Mission, en Colombie-Britannique, un tuyau vieux de 30 ans qui achemine les eaux usées vers une usine de traitement à Abbotsford est si sale qu’on ne peut plus même pas y glisser une caméra pour tenter de vérifier son usure.
Si cette canalisation se rompt, elle déversera chaque jour 11 millions de litres d’eaux usées dans un habitat essentiel pour le saumon.
Même si les changements climatiques domineront sûrement les débats environnements d’ici le scrutin fédéral du 21 octobre, les propositions visant à empêcher le déversement de boue toxique chargée de matières fécales dans les voies navigables canadiennes seront bien accueillies, notamment par les administrations municipales préoccupées quotidiennement par cette question.
La mairesse de Mission, Pam Alexis, dit être «absolument optimiste» sur les possibilités que les eaux usées deviennent un enjeu électoral.
Les conservateurs et les verts ont promis de mettre un terme au déversement des eaux usées, même s’ils n’ont pas comment ils y parviendraient.
Le NPD prône une stratégie nationale de l’eau douce en s’appuyant sur un projet de loi d’initiative parlementaire présenté par la députée d’Essex, en Ontario, Tracey Ramsey, en avril. L’élue voulait notamment que les infrastructures liées aux eaux usées au Canada soient évaluées en fonction des changements climatiques.
Les libéraux n’ont pas encore dévoilé leurs engagements environnements. Le gouvernement Trudeau a mis de côté 2 milliards $ pour les aqueducs et le traitement des eaux usées. Depuis 2016, il a approuvé une aide totalisant 1,5 milliard $ pour 1452 projets.
Le porte-parole conservateur en matière environnementale, Ed Fast, souligne que le programme de son parti comprendra des programmes d’infrastructure.
«Tout ce que je peux dire, c’est qu’un gouvernement conservateur accordera une plus grande priorité à la résolution de ce problème extrêmement grave pour notre environnement auquel les libéraux ont contribué, a-t-il déclaré. Nous continuons à voir d’importantes quantités d’eaux usées non traitées être déversées dans nos cours d’eau et cela doit cesser. Le statu quo n’est plus acceptable.»
Selon Environnement Canada, plus d’un billion de litres d’eaux usées ont été déversées, volontairement ou pas, dans les cours d’eau de 2013 à 2017. Les données pour 2018 ne sont pas encore disponibles.
La quantité réelle est plus élevée. Même si Environnement Canada demande aux municipalités de signaler la quantité de déchets déversés dans les voies navigables, beaucoup ne le font pas.
En 2012, le gouvernement conservateur avait adopté des normes strictes pour le traitement des eaux usées qui entreront en vigueur de 2020 à 2040.
La Fédération canadienne des municipalités estime que le simple respect de ces normes nécessiterait des investissements totalisant près de 18 milliards $. Il en coûterait encore plus pour réparer les égouts municipaux afin qu’ils arrêtent de fuir lorsqu’il pleut.
La ville d’Ottawa dit que les travaux de construction d’un vaste tunnel souterrain visant à contenir les débordements d’égout dans les situations extrêmes seront terminés d’ici un an. Ce projet d’une durée de quatre ans a coûté plus de 230 millions $, et ne représente qu’une partie d’un programme devant s’étaler sur 10 ans.
En 2015, la ville de Montréal avait déversé huit milliards de litres d’eaux usées dans le fleuve Saint-Laurent à cause d’un important tuyau nécessitant des réparations. ■