Le Grand Moncton, plaque tournante de la médecine douce
De nombreux événements de médecine douce liés à la spiritualité se tiennent dans le Grand Moncton. L’Acadie Nouvelle a rencontré leur principal organisateur, Terry Landry. Il offre des séances de guérison par les sons. Nous en avons essayé une.
L’habit ne fait pas le moine. Terry Landry ne ressemble pas à un hippie New Age. Il porte des cheveux courts et se rase de près; regarde à travers des lunettes rectangulaires et s’habille d’un chandail noir. Son apparence est plus proche du cliché sur l’informaticien que du stéréotype sur le guérisseur chamanique. Il prétend pourtant exercer ce métier marginal à Moncton depuis cinq ans, après avoir été camionneur.
Ce passionné de musique promet de soigner ses clients par les sons. Il propose des soirées de groupes dans plusieurs villes du Nouveau-Brunswick. L’une d’elles s’appelle par exemple, «l’élévation de Kundalini – le dragon de feu nettoie le chemin». Il en organise sept dans la province, dont cinq à Moncton, rien qu’en octobre.
UN DUO DE BOLS TIBÉTAINS
Il reçoit aussi des clients lors de séances individuelles. Ses consultations se déroulent chez lui, dans une petite pièce saturée d’encens, pleine d’objets orientaux, aux murs couverts de bois et à la lumière ocre.
Dans un coin s’y trouvent un système de sonorisation puissant, une table de mixage et un micro. Au milieu, M. Landry place un matelas doux et moelleux ainsi qu’un oreiller. Il invite son client à s’y allonger sur le dos, à appliquer un masque de sommeil et à se concentrer sur ses sensations corporelles ainsi que sur sa respiration.
Sa cérémonie commence par des incantations marmonnées sur un fond sonore produit par un instrument de la famille des maracas. Il place ensuite un bol tibétain à côté de chacune des oreilles de son auditeur, produisant une alternance de deux notes métalliques et profondes. Après un moment, une clochette ajoute son tintement clair à ce duo.
UNE SOLUTION CONTRE L’ANXIÉTÉ
La pratique de M. Landry est personnelle. Il est donc impossible d’en avoir une analyse scientifique rigoureuse. Deux études publiées ces dernières années suggèrent toutefois que la méditation aidée par le son de bols tibétains permet de réduire la tension, la colère, la fatigue et la dépression. Ces articles se fondent néanmoins sur de petits échantillons de personnes (entre 40 et 70).
Une étude de 2008 publiée par Complementary Medicine Research conclut en outre que la méditation à l’aide de sons permet de se relaxer efficacement, sans délais, ni exercices particuliers. Ses auteurs ont analysé 105 patients.
Ont-ils inclus dans leur étude l’usage de gongs? Ceux de M. Landry interviennent comme les grondements de tonnerre, d’abord sourds et inquiétants de l’orage qui approche, puis éclatants comme l’éclair qui crépite.
DES PROMESSES
Le chaman autoproclamé ne promet pas la relaxation seulement, mais la guérison de traumatisme. Aucun article scientifique ne prouve que son engagement soit réalisable. Ses séances individuelles durent de 45 minutes à 1h15 et coûtent de 80 à 100$, c’est-àdire le prix d’une séance chez un psychologue, une profession réglementée qui nécessite un diplôme.
«Les gens qui sont passés par des expériences horribles ont une sensation dont ils pensent qu’ils ne pourront jamais se débarrasser, qu’elle se traduise sous forme de culpabilité, de honte, de peur ou autre, a-t-il allégué. Je reprogramme ce traumatisme pour qu’il n’ait plus de prise sur la personne, en le transformant en sagesse par exemple.»
Après les gongs, voilà que M. Landry commence à chanter et à marteler un tambour amérindien. Il fait ainsi vibrer le crâne et la cage thoracique de son client.
UNE FOI NÉCESSAIRE
Il poursuit par le son pur d’un bol de cristal dont les fréquences semblent procurer un massage cérébral. Sur l’unique note de l’instrument, M. Landry continue de vocaliser, grimpant et descendant des suites de notes mystérieuses, jusqu’à produire parfois des grognements gutturaux.
Ces sons de gorge contrastent avec le soupir que le chanteur a poussé à la question de savoir si sa pratique se fonde sur la science ou sur des croyances.
«Les deux, a-t-il lâché. La science peut expliquer ce qui se passe. Mais je crois que tu as besoin d’y croire pour que ça fonctionne.» Il a assuré ne pas agir en gourou.
«Je fais toujours en sorte de laisser mes clients aux commandes et de leur faire prendre conscience qu’ils ont les capacités de changer leurs émotions, d’être qui ils veulent, a-t-il soutenu. Je ne peux pas faire les choix pour eux.»
Une mélodie jouée à la flûte conclut sa séance. M. Landry sort son client de la torpeur dans laquelle il a réussi à le plonger. Il échange ensuite avec lui à propos de ses sensations. La relaxation est évidente. Mais qui n’en ressentirait pas après 45 minutes de concert privé allongé sur le dos, les yeux bandés?
«Durant les séances individuelles, au moins 30%, peut-être 40% des gens vont s’endormir», a même indiqué M. Landry. ■