Acadie Nouvelle

MES SOUVENIRS DE SID THE KID

- ROBERT LAGACÉ

Comme plusieurs d’entre vous, j’ai été vivement impression­né par la cérémonie entourant le retrait du chandail numéro 87 de Sidney Crosby, vendredi au Colisée de Rimouski.

L’organisati­on de l’Océanic a tout fait avec classe et c’était touchant de voir Sid The Kid aussi ému.

Ça m’a d’ailleurs permis de plonger dans mes vieux souvenirs.

D’abord à l’époque des Jeux d’hiver du Canada présentés à Bathurst et Campbellto­n en 2003. Crosby était le coeur et l’âme de la formation néo-écossaise. Ne doutez pas une seconde, il était déjà une attraction avant même de jouer dans la LHJMQ. Son nom était sur toutes les lèvres.

Plusieurs autres excellents joueurs se trouvaient pourtant au tournoi, à commencer par les Québécois Guillaume Latendress­e et Brent Aubin, le NéoBrunswi­ckois Luc Bourdon, ou encore le BritannoCo­lombien Gilbert Brule qui était même comparé au 87 à l’époque. Pourtant, il suffisait de le voir un court instant pour savoir qui était le meilleur. Tout le monde le savait. Peu importe l’aréna où Crosby se trouvait pendant le tournoi, c’était toujours plein. À craquer à part ça. Tous les amateurs de hockey du nord-est du NouveauBru­nswick voulaient voir le nouveau petit Mozart du hockey.

Et même si la Nouvelle-Écosse ne s’est pas retrouvée sur le podium, c’est Crosby qui avait terminé au premier des pointeurs avec 16 points, dont neuf buts, en seulement cinq parties. Il n’avait pourtant pas le loisir d’évoluer au sein de clubs paquetés comme l’Ontario et le Québec. Un an auparavant, toujours à Bathurst, Crosby avait donné un avant-goût de son immense talent en menant la formation de Dartmouth jusqu’à la finale de la coupe Air Canada, qui deviendra plus tard la coupe Telus. Encore là, il avait été le champion pointeur du tournoi midget AAA, en plus d’être choisi le joueur le plus utile. En février 2003, Doris Labonté, qui était alors le directeur général de l’Océanic, m’avait appelé deux ou trois fois pendant la semaine du tournoi masculin aux Jeux du Canada.

L’Océanic possédait cette saison-là la pire équipe de la LHJMQ et Doris Labonté ne tenait plus en place à l’idée de sélectionn­er Crosby au tout premier rang du repêchage de juin 2003.

Il m’appelait simplement pour savoir comment le surdoué de Cole Harbour s’était débrouillé pendant la journée. En fait, il voulait tout savoir sur le 87.

Hésitait-il à faire des passes à ses compagnons de trio? Comment il se comportait avec les journalist­es? Était-il patient avec les partisans qui voulaient son autographe? Etc. Et chaque fois, il me demandait si je trouvais que Crosby était aussi bon que tout le monde disait. Avec le recul, je crois que Doris Labonté se savait tellement béni de pouvoir sélectionn­er cette perle rare qu’il devait parler avec le maximum de gens pour s’assurer qu’il ne rêvait pas.

Au lieu de se pincer le matin pour croire à la venue de Crosby dans le Bas-Saint-Laurent, Doris Labonté préférait s’abreuver de témoignage­s sur le futur premier choix de juin 2003.

Les visites du 87 avec l’Océanic

Je conservera­i également toujours de beaux souvenirs des passages de Sidney Crosby avec l’Océanic au Centre régional K.-C.-Irving.

Il a marqué la première moitié des années 2000 de la LHJMQ comme personne d’autre. En 2004-2005, l’année du lockout de la LNH, la planète hockey au complet suivait le quotidien de Sid The Kid. Chaque fois qu’il s’est pointé le bout du nez à Bathurst, l’amphithéât­re a affiché complet.

C’était partout comme ça à travers la ligue. L’annonceur maison Luc Foulem annonçait

3524 spectateur­s, mais je suis convaincu que nous étions bien plus. C’était vraiment électrique quand le 87 était là.

Il nous a d’ailleurs gratifiés de très bons spectacles, surtout à sa saison recrue à 16 ans.

Le 28 septembre 2003, Crosby avait inscrit deux buts et une passe pour mener l’Océanic à un gain de 6 à 3. Il avait été choisi la première étoile du match.

Moins d’un mois plus tard, soit le 19 octobre, il enregistra­it deux filets et trois mentions d’aide dans une victoire identique de 6 à 3. Encore une fois, la première étoile lui avait été attribuée.

La saison suivante, le 3 décembre 2004, le Titan célèbre son retour au Centre régional K.-C.-Irving avec un triomphe de 5 à 4. Marc-André Côté, l’actuel entraîneur-chef des Aigles Bleues de l’Université de Moncton, avait joué les héros en enfilant le but vainqueur. Crosby, lui, s’était contenté d’une petite passe.

Il se reprendra toutefois le 18 mars 2005 en amassant deux passes dans un gain de 5 à 1.

La fiche de Crosby en quatre rencontres à Bathurst aura donc été de quatre buts et sept mentions d’aide pour 11 points.

Vraiment, les gens de Rimouski ont été extrêmemen­t chanceux de vivre de près une partie de la riche histoire de ce grand hockeyeur.

Un seul hic

Cela dit, il y a un moment pendant la cérémonie de vendredi que j’ai moins aimé.

Je crois sincèremen­t que le commissair­e Gilles Courteau a manqué de respect envers Guy Lafleur et Mario Lemieux en annonçant que le numéro 87 était désormais retiré partout dans la LHJMQ.

J’ai bien de la difficulté à croire que les 18 formations du circuit ont entériné cette décision. Attention, je ne dis pas que Sidney Crosby ne méritait pas pareil honneur. La fierté de Cole Harbour a été un élément aussi important à cette ligue que ne l’ont été Lafleur et Lemieux. Si j’avais à vous donner mon top-3 de l’histoire de cette ligue, ils seraient mes trois choix. Ce que je dis, c’est que Guy Lafleur et Mario Lemieux auraient dû recevoir ce même traitement bien avant Crosby.

Parce qu’eux aussi ont grandement marqué l’histoire de la LHJMQ. Eux aussi sont ensuite devenus à leur époque le meilleur joueur de la LNH.

Lafleur et son numéro 4 dans l’uniforme des Remparts de Québec, au début des années 1970, puis Lemieux et Sidney Crosby, le 28 septembre 2003, à Bathurst. –

Archives son numéro 66 avec les Voisins de Laval, une décennie plus tard, ont été le pain et le beurre de la LHJMQ à leur époque, comme Crosby dans la première moitié des années 2000.

Certes, Lafleur a déjà un trophée qui porte son nom (remis au joueur le plus utile des séries éliminatoi­res), mais ça n’a rien à voir avec le retrait global d’un numéro. À ce sujet, comment se fait-il que Lemieux n’ait toujours pas de trophée en son nom?

En attendant, le message que la LHJMQ vient de passer, même si ce n’était probableme­nt pas leur intention, c’est que Crosby a été plus important que Lafleur et Lemieux. Il faut avoir du front autour de la tête pour penser ainsi.

Déjà que le moment de faire une telle annonce était mal choisit, puisque Lafleur a subi en fin de semaine un quadruple pontage au coeur. Gilles Courteau et tous les dirigeants de la LHJMQ connaissai­ent pourtant depuis déjà quelques jours la condition du Grand Blond. Pourquoi n’ont-ils pas eu la délicatess­e (ou du moins la présence d’esprit) de repousser cette annonce? Rien ne pressait.

Après tout, la cérémonie de vendredi était déjà une réussite sans même le retrait global du 87 à travers la ligue.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada