Traitement potentiel contre la COVID-19: les pharmaciens veulent éviter une pénurie de Plaquenil
En raison de la demande mondiale qui risque d’exploser à la suite de la mise en place de protocoles de traitement pour la COVID-19, les stocks d’hydroxychloroquine et la chloroquine sont déjà surveillés de près au pays.
Au Québec, on a évoqué des ruptures d’approvisionnement possible de ces médicaments, notamment le Plaquenil utilisé pour stabiliser les patients souffrant d’arthrite.
Afin d’éviter cette situation, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux a autorisé temporairement les pharmaciens à suspendre les traitements de certains patients sans devoir informer leur médecin de famille ou leur médecin traitant.
De plus, on spécifie qu’en aucun temps, l’inventaire des pharmacies ne doit servir aux traitements de patients atteints de la COVID-19.
Au Nouveau-Brunswick, le gouvernement a fait un pas audacieux dans ce dossier.
Plus tôt cette semaine, il a approuvé l’utilisation de l’hydroxychloroquine comme traitement expérimental contre la COVID-19. Ici aussi, le Collège des pharmaciens a envoyé une note similaire à ses membres, car on se doute bien que ce médicament risque de connaître un élan de popularité.
Bien qu’il n’est pas en mode panique, le collège dit travailler de concert avec les autres corps médicaux afin de contrôler les émissions de ce médicament.
Pour le moment, ce dernier ne craint pas de manquer de ces médicaments. Il vient d’ailleurs tout juste d’en recevoir une commande. Est-ce que cela pourrait être appelé à changer?
«Peut-être, car là tout le monde semble penser que c’est la réponse miracle à la COVID-19, mais je crois qu’on devrait s’en tirer. Ce qui pourrait arriver, c’est que les fournisseurs instaurent des quotas aux pharmacies, donc ne donner qu’un nombre minimal de doses. Personnellement, j’ai un bon inventaire ici, pour au moins deux mois, et je vais faire tout en mon pouvoir pour que l’on puisse continuer d’honorer nos prescriptions», dit-il.
Les prescriptions de Plaquenil ne sont dorénavant renouvelées qu’un mois à la fois.
Il faut dire que son utilisation comme traitement contre la COVID-19 ne fait pas l’unanimité au sein des spécialistes en santé.
Mais qu’il soit réellement efficace ou non, la décision de certaines juridictions (notamment le Nouveau-Brunswick et les ÉtatsUnis) de lui faire confiance fait en sorte que le médicament est soudainement dans les mires de plusieurs.
Sa popularité croissante pourrait éventuellement causer des ruptures de stock à l’échelle nationale, et même mondiale. La possibilité d’assister à une pénurie d’hydroxychloroquine en raison de sa forte demande mondiale est donc réelle et n’est pas sans inquiéter ses usagers réguliers.
«Nous avons reçu beaucoup d’appels de patients inquiets qui se demandent s’ils auront ou non leur médicament au cours des mois à venir. Et on ne connaît pas la réponse. On suit la situation avec très grand intérêt», explique la Dre Siân Bevan, chef scientifique de la Société de l’arthrite du Canada.
Celle-ci confirme qu’elle n’a pas été mise au courant d’une pénurie actuelle de médicaments. Toutefois, elle estime que les inquiétudes de son organisation sont légitimes en ce sens que la demande pourrait exploser du jour au lendemain, ce qui pourrait avoir des conséquences sur ses membres.
«Nous sommes dans une situation exceptionnelle où l’on doit faire des choix. En même temps, nous ne voulons pas que nos patients qui sont stables depuis des années perdent soudainement accès à leurs médicaments et deviennent ceux qui souffriront», indique Mme Bevan.
Selon elle, les gouvernements doivent s’assurer de travailler de concert avec l’industrie pharmaceutique afin de faire en sorte que, si ce traitement se révèle être bénéfique contre la COVID-19, il y en ait suffisamment pour toutes les personnes atteintes.
«Mais aussi suffisamment pour ceux à qui il est déjà prescrit», estime-t-elle.
Un point qui pourrait d’ailleurs jouer en faveur des pharmacies canadiennes (et de leurs clients) est le fait que ces médicaments – dans leurs formes génériques – sont généralement fabriqués au pays. ■
«Ce qu’on nous a demandé jusqu’ici, c’est d’honorer les prescriptions des patients déjà en traitement, mais de surveiller de près les nouvelles prescriptions, question de vérifier que c’est nécessaire pour eux», confirme Jason Talbot, pharmacien à Kedgwick sous la bannière Familiprix.