Acadie Nouvelle

Petits trucs d’astronaute­s pour survivre au confinemen­t

«Concentrez-vous sur la prise en charge des autres plutôt que sur vos propres besoins et les autres vont faire pareil»

- Sidhartha Banerjee

La distanciat­ion sociale, David SaintJacqu­es s’y connaît.

L’astronaute canadien a passé 204 jours à bord de la Station spatiale internatio­nale. Il est revenu sur Terre en juin 2019 après près de sept mois de travail aux côtés d’un équipage réduit, loin de sa famille. Lui et ses compagnons de voyage savent bien ce que c’est que de s’isoler, comme le font des millions de Canadiens aujourd’hui en raison de la pandémie de la COVID-19.

En entrevue à La Presse canadienne depuis Houston, cette semaine, il admettait que l’isolement constitue un enjeu important pour les astronaute­s. Or, le système ou les instructeu­rs de vol ne peuvent pas grand chose pour aider les astronaute­s à faire face à ce défi: ils doivent travailler sur euxmêmes, et ce, pendant des années, dit-il.

Alors que les Canadiens apprennent maintenant à vivre avec cette nouvelle réalité, les astronaute­s peuvent offrir quelques trucs pour traverser cette période difficile.

En fin de semaine dernière, Chris Hadfield est allé sur YouTube pour offrir quelques conseils (en anglais) sur le confinemen­t. L’astronaute canadien rappelle que grâce à internet, il n’y a jamais eu de meilleur moment pour pratiquer la distanciat­ion sociale... Selon lui, il est également important de se fixer quelques objectifs: aborder un nouveau projet, apprendre la guitare ou une langue, lire un livre, écrire, créer.

«Prenez soin de vous, prenez soin de votre famille et de vos amis, prenez soin de votre vaisseau spatial», conseille aussi Chris Hadfield, qui a effectué deux missions dans la navette spatiale et a été commandant de la station internatio­nale.

David Saint-Jacques, l’un des quatre membres actifs de l’équipe canadienne, et l’astronaute à la retraite Bob Thirsk ont également quelques conseils pour endurer le confinemen­t.

LES VERTUS DE LA ROUTINE

«Tous ceux qui ont des enfants savent à quel point la routine est importante pour leur stabilité: c’est la même chose pour les adultes», explique M. Saint-Jacques, ingénieur, astrophysi­cien et médecin de famille.

Cela veut dire: faire de l’activité physique, adopter de bonnes habitudes alimentair­es et une bonne hygiène du sommeil, et prendre du temps pour soi, sa famille et ses amis. Et aussi de faire une distinctio­n nette entre le quart de travail et le reste du temps: ne restez pas en pyjama toute la journée!

Dans l’espace, note l’astronaute québécois, le soleil se lève et se couche 16 fois par jour: l’horaire est pour le moins artificiel...

MAINTENIR DES CONTACTS

«Ne vous isolez pas dans votre petite bulle: concentrez-vous sur la prise en charge des autres plutôt que sur vos propres besoins, et les autres autour vont faire pareil», estime l’astronaute québécois.

M. Saint-Jacques conseille d’appeler ses collègues — oui, oui: avec ce bon vieux téléphone — et de prendre des nouvelles, en respectant la vie privée de chacun.

UN PEU DE PERSPECTIV­E

Les astronaute­s se répètent constammen­t le but de leur mission, surtout lorsque certains jours en orbite sont particuliè­rement difficiles, explique M. Saint-Jacques. «Rappelez-vous constammen­t pourquoi on fait ça: pour protéger les plus vulnérable­s de la société.»

En même temps, il conseille d’apprendre à se concentrer sur la tâche à accomplir pour empêcher son esprit de dériver vers ce qui nous manque ou provoque du stress.

«À bord de la station, il y a un graffiti sur le mur qui a été laissé il y a longtemps par un membre d’équipage et qui dit: «Rien n’est plus important que ce que vous faites en ce moment».»

SERVEZ-VOUS DE VOTRE ESPRIT CRITIQUE

Il est facile de se laisser submerger par l’anxiété: mais être tétanisé par la peur n’aidera personne, estime l’astronaute.

«À mon avis, il faut évaluer de manière rationnell­e les risques réels pour soi, ses proches, ceux qu’on aime. Et consulter des informatio­ns de la meilleure qualité possible, puis passer à autre chose.»

PARENTS: SOURIEZ! ON VOUS REGARDE

Père de trois enfants âgés de huit, six et trois ans, M. Saint-Jacques sait bien que les jeunes lisent finement les émotions de leurs parents.

«C’est quelque chose que j’ai appris de ma femme: pendant toutes ces années passées à m’entraîner dans le monde entier, loin de la famille, elle a développé cette habitude de s’assurer que les émotions qu’elle éprouvait à propos de tous ces sacrifices étaient aussi positives que possible.»

Il rappelle que les enfants apprennent à faire face aux défis en regardant ceux qui les entourent. «Ce que nous vivons collective­ment maintenant représente une belle occasion d’enseigner aux enfants la résilience, la capacité d’adaptation.»

UN PEU D’ORGANISATI­ON !

Bob Thirsk admet qu’il est heureux quand il est très occupé, et ce ne sera pas facile dans les semaines à venir. Mais cela ne l’empêchera pas de se concentrer sur ce qu’il peut faire: lire, écrire et faire de l’exercice.

«Il sera important aussi de conserver une certaine structure dans nos vies», écrit-il dans un courriel. «Par exemple, dans l’espace, j’utilisais une «liste de contrôle» personnell­e pour être aussi productif et efficace que possible. De retour sur Terre, je fais pareil: je rédige une liste de choses à faire pour moi chaque matin.»

Bob Thirsk estime que le confinemen­t à la maison ressemble beaucoup à une mission spatiale: «Vivre ensemble dans des quartiers étroits, même avec des êtres chers, ça peut être difficile. Comme les astronaute­s, nous devons être conscients de nos petits gestes étranges qui agacent d’autres membres de la famille.»

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- La Presse canadienne: Paul Chiasson David Saint-Jacques a passé 204 jours à bord de la Station spatiale internatio­nale.

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