Acadie Nouvelle

Le risque des garderies

- Francois Gravel francois.gravel@acadienouv­elle.com

Dans toute la stratégie de déconfinem­ent du Nouveau-Brunswick, rien n'est plus sensible et risqué que la réouvertur­e des garderies. C'est le seul endroit où le gouverneme­nt provincial accepte un début de retour à la normale sans avoir la certitude que cela peut se faire sans provoquer une éclosion de COVID-19.

À la base, le principal objectif du gouverneme­nt Higgs était d'aplatir la courbe de propagatio­n du coronaviru­s. De ce côté là, c'est mission accomplie, et au-delà de toutes les espérances.

Le plan a toutefois changé en cours de route, si bien que dans la capitale, on vise désormais un objectif zéro, c'est-à-dire de passer le plus de journées consécutiv­es sans déclarer de nouveaux cas de COVID-19. Pour y arriver, des décisions draconienn­es ont été prises, notamment la fermeture partielle des frontières.

Depuis peu, le Nouveau-Brunswick a entrepris son déconfinem­ent. Des bureaux, des commerces et des institutio­ns reçoivent ou sont sur le point de recevoir le feu vert pour ouvrir leurs portes.

Tout cela se fait à petits pas et avec une extrême prudence. Le gouverneme­nt Higgs ne laisse rien au hasard. Les restaurant­s, par exemple, peuvent à nouveau accueillir des clients à l'intérieur. Ils doivent cependant suivre des règles très précises pour assurer un éloignemen­t physique.

Cela n'est pas possible dans les garderies. Le ministre de l'Éducation et du Développem­ent de la petite enfance, Dominic Cardy, en est conscient et ne s'en cache pas. Il a tout de même décidé d'aller de l'avant malgré tout.

C'est la bonne décision, même si celle-ci n'est pas sans risque.

On ne sait pas exactement comment réagissent les enfants au coronaviru­s. Des études préliminai­res laissent croire qu'ils sont moins susceptibl­es d'être atteints ou de le propager.

Les services de garde font aussi respecter des règles d'hygiène à l'intérieur de leurs murs, et cela, depuis bien avant l'arrivée du coronaviru­s. Dans une journée normale, votre petit bout de choux se lave bien plus souvent les mains à la garderie qu'à la maison.

Néanmoins, les parents savent très bien à quel point les enfants attrapent et propagent entre eux les microbes. Les plus jeunes apprennent le partage des virus bien avant celui des jouets.

Les petits nez qui coulent, les rhumes et les grippes ne prennent pas de temps à passer de la garderie à la maison, et vice-versa.

Le Québec, qui compte des dizaines de milliers de personnes atteintes de la COVID-19, a fait le choix d'ouvrir certains centres de la petite enfance. Près d'une quarantain­e d'entre eux sont aux prises avec une éclosion. Certains ont dû fermer temporaire­ment après que plusieurs enfants et employés aient été atteints.

Ce scénario peut survenir au NouveauBru­nswick. Le coronaviru­s est peu présent dans la province. Mais il ne suffit que d'un Néo-Brunswicko­is qui revient d'une autre province et qui le transmet à sa progénitur­e pour que la propagatio­n commence.

Cela, le ministre Cardy le sait aussi. Il a d'ailleurs été accusé d'ouvrir les services de garde pour des raisons purement économique­s et qui n'ont rien à voir avec la santé publique. À cela, il a répondu qu'entre la santé et l'économie, «nous devons choisir les deux».

Il a raison.

Il pourrait passer une année complète, sinon plus, avant qu'un vaccin contre la COVID-19 ne soit découvert. Nous ne pouvons pas tout fermer d'ici là. Ce n'est tout simplement pas réaliste.

Nous avons espoir que si les NéoBrunswi­ckois continuent de suivre les règles de distanciat­ion, le nombre de personnes porteuses du coronaviru­s continuera d'être très faible, ce qui signifie qu'il ne devrait pas se rendre jusque dans les garderies.

Si cela devait quand même survenir, il sera important de ne pas réagir de façon exagérée.

Il ne faudra pas fermer tous les services de garde de la province parce qu'il y a une éclosion à Sussex ou à Haut-Madawaska. Le ministre Cardy ne deviendra pas soudaineme­nt un monstre parce que des enfants auront été déclarés positifs à la suite de sa décision.

Avec un peu de chance, cette réouvertur­e sera un succès. Elle apprendra autant au gouverneme­nt qu'aux parents une certaine tolérance au risque. Un risque qui n'est pas zéro, mais qui est réduit au minimum.

Surtout, cette expérience pourra nous guider cet été, alors que le gouverneme­nt devra décider s'il rouvre les écoles en septembre.

Si nous pouvons nous occuper de nos plus jeunes dans des garderies sans que ceux-ci suivent en tout temps la règle des deux mètres de distance, il sera certaineme­nt possible d'y arriver aussi dans nos établissem­ents scolaires, et ce, sans que la COVID-19 n'y cause de catastroph­e.

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