Les hôteliers indépendants du N.-B. en mode survie
C’est un calme alarmant qui règne dans les hôtels et les motels du NouveauBrunswick par ces temps de restrictions. Les propriétaires s’accrochent du mieux qu’ils le peuvent en vue d’une saison «catastrophique».
Aux quatre coins de la province, les hôteliers indépendants sont en mode survie.
Alors que l’absence de touristes et la rigidité des restrictions sanitaires menacent durement la saison estivale, chacun y va de sa propre idée.
Rester ouverts ou fermer temporairement ses portes? Garder ses employés ou tenter de se débrouiller seul? S’appuyer sur les prêts gouvernementaux ou puiser dans ses propres économies?
Les propriétaires d’hébergements avec lesquels nous avons discuté, en début de semaine, ont pris différents chemins afin de minimiser leurs pertes.
Si la création d’une bulle entre les quatre provinces de l’Atlantique est bien accueillie, plusieurs soulignent qu’il s’agit d’un léger baume, la très grande majorité de leur clientèle provenant du Québec et de l’Ontario deux provinces dont les habitants ne sont pas encore admis au N.-B.
PRÉCAUTIONS ET RÉSILIENCE À CARAQUET
Au motel Bel-Air, à Caraquet, les propriétaires refusent de baisser les bras devant la COVID-19.
Mai Tran et sa mère ont récemment lancé des forfaits adaptés à la crise afin d’essayer de remplir quelques chambres actuellement désertes.
«On offre des forfaits de quarantaines pour les gens qui doivent s’isoler, par exemple, ou des forfaits pour ceux qui ont besoin d’un endroit pour travailler.»
Malgré ces initiatives, l’hôtelière ne cache pas que les affaires roulent au ralenti.
Et bien que l’aide financière proposée par le gouvernement fédéral aide à respirer un peu plus librement, Mme Tram rappelle qu’il ne s’agit pas d’une solution viable à long terme.
«Pour l’instant, l’aide gouvernementale nous suffit, mais c’est de l’argent qu’il va falloir rembourser éventuellement. On a l’impression qu’on vit un peu sur du temps emprunté.»
Contrairement à d’autres hôteliers indépendants, le motel Bel-Air a choisi de conserver ses employés habituels et de les rémunérer à l’aide de la subvention salariale d’urgence du Canada (SSUC).
«Si à l’automne tout revient à la normale, j’aurai besoin d’employés. En les maintenant sur la liste de paie, au moins je m’assure qu’ils n’iront pas voir ailleurs», a témoigné Mme Tran.
L’hôtelière précise que, dans la région de Caraquet, il est difficile de dénicher des employés à temps partiel.
Elle préfère donc faire preuve de prudence tandis qu’elle peut toujours se permettre d’assumer le 25% des salaires qui n’est pas couvert par le gouvernement.
En vue de de juillet et août, la propriétaire urge toutefois le gouvernement provincial à proposer de «vraies solutions» aux hôteliers.
«On n’a pas chialé fort depuis le début parce que le gouvernement fédéral en a fait beaucoup pour nous aider, mais c’est le temps que Fredericton nous aide aussi. La saison, c’est tout de suite, ils ne peuvent plus attendre.»
Mme Tran craint que plusieurs PME continuent à plonger dans le rouge si aucune solution n’est proposée, en empruntant de l’argent qu’ils n’arriveront pas à rendre.
UN PARI RISQUÉ À BERESFORD
Du côté du John’s Motel, à Beresford, le propriétaire Dollard Poirier indique que chaque dépense est minutieusement évaluée ces temps-ci.
«C’est difficile, mais à ce jour ça va quand même assez bien. Je fais attention», a-t-il enchaîné.
Les réservations étant encore moins nombreuses que pendant la saison hivernale, le propriétaire note qu’il a dû puiser dans les économies de l’entreprise pour maintenir le cap.
Outre l’entretien quotidien, cet argent aide à acheter les nouveaux produits nettoyants qui sont maintenant nécessaires à la sécurité des visiteurs.
«À ce jour, je n’ai pas eu besoin de l’aide gouvernementale. J’espère que ça continuera comme ça.»
En activité depuis 51 ans, le sexagénaire indique que la saison 2020 s’annonce sans doute l’une des plus difficiles.
«Si les visiteurs ne reviennent pas prochainement, on va devoir fermer nos portes cet hiver», a-t-il ajouté.
«Moi, je ne veux pas utiliser ce que j’ai sauvé pour ma retraite pour surmonter cette crise parce que je vais finir par tout perdre.»
DOUTES ET APPRÉHENSIONS À EDMUNDSTON
Sandra Marcoux, propriétaire de La Roma Motel, à Edmundston, rapporte une baisse de 90% à 95% de son achalandage habituel en raison de la fermeture des frontières.
Afin de minimiser ses dépenses, Mme Marcoux a décidé de se passer de ses six employés saisonniers pour le moment.
«J’espère qu’au début juillet, ça va commencer à bouger un peu plus...»
Elle note qu’il est irréaliste d’imaginer que les Néo-Brunswickois puissent relancer le secteur hôtelier à eux seuls.
«Dire aux gens de voyager et d’encourager le Nouveau-Brunswick, ici, à Edmundston, ça ne nous apporte pas grand-chose parce que la majorité des gens cherchent des plages, donc ce n’est pas dans notre coin qu’ils veulent voyager.»
Si les vacanciers se rendent au Madawaska pour profiter de ses attractions, ce n’est que pendant quelques jours, a-t-elle renchéri.n