Higgs rappelle qui est le patron
Le premier ministre Blaine Higgs a présenté mardi son nouveau conseil des ministres. Par ses choix, il a aussi rappelé à son caucus qu’il ne tolérera plus la contestation.
Après avoir fait campagne sur la stabilité et sur son bilan, Blaine Higgs a dévoilé un Cabinet où on retrouve des nouveaux visages.
Six ministres ont été éjectés du cercle des décideurs. En comptant les départs de Greg Thompson (décédé), de Carl Urquart (parti à la retraite) et de Robert Gauvin (devenu libéral), cela signifie que plus de la moitié du conseil des ministres original d’il y a deux ans n’est déjà plus en poste.
Cela n’est pas si surprenant.
M. Higgs avait démontré en 2018 que personne n’est intouchable. Plusieurs anciens ministres dans le gouvernement progressisteconservateur de David Alward avaient été laissés sur les lignes de côté.
Maintenant majoritaire et n’étant plus à la merci des sautes d’humeur de son caucus, le premier ministre est en mesure d’imposer sa volonté. Oui, les ministres doivent être compétents. Mais surtout, ils doivent montrer une loyauté et une fidélité sans faille.
Nulle part n’est-ce aussi vrai que dans sa décision de dégommer le ministre des Affaires autochtones, Jake Stewart.
Nous n’éprouvons pas beaucoup de sympathie pour M. Stewart, qui a maintes fois exprimé son mépris pour les droits linguistiques des francophones.
Néanmoins, sa rétrogradation est une triste nouvelle pour les Autochtones.
Ils avaient trouvé en lui un champion. M. Stewart souhaitait la création d’une enquête publique sur le racisme systémique à l’égard des Autochtones au sein de la police et du système judiciaire. Son chef s’y opposait et n’a pas apprécié que son ministre brise les rangs.
Entre le sort des Autochtones et un ministre trop indépendant à son goût, Blaine Higgs a tranché. Jake Stewart retournera sur les banquettes à l’arrière.
L’expulsion du Cabinet de la ministre Andrea Anderson-Mason entre dans la même catégorie.
Cette vedette montante du parti a pourtant bien rempli son mandat qui lui avait été confié par son patron, notamment en transformant les fonds de développement du Nord en un fonds rural qui cible toute la province sauf Moncton, Saint-Jean, Fredericton et Dieppe. Mais elle a aussi contribué à le faire mal paraître en menant la charge contre le projet de loi sur la vaccination obligatoire dans les écoles.
Le message est on ne peut plus clair. La dissension ne sera plus tolérée. Les jours où Blaine Higgs devait passer l’éponge en raison de la fragilité de son gouvernement sont bel et bien terminés.
Par ailleurs, le conseil des ministres n’est pas paritaire. Il comprend six femmes et neuf hommes (en plus du premier ministre). Ce n’est pas étonnant, M. Higgs n’étant pas friand des symboles du genre.
S’il n’y a jamais eu autant de femmes ministres au Nouveau-Brunswick, plusieurs d’entre elles occupent toutefois des rôles où elles auront bien peu d’influence.
Jill Green (Transports et Infrastructures) et surtout Dorothy Shephard (Santé) seront néanmoins à surveiller.
Mme Shephard a imposé la ligne dure contre les travailleurs des foyers de soins, lors des négociations acrimonieuses pour le renouvellement de leur contrat.
M. Higgs a promis des changements dans les soins de santé. Ceux-ci pourraient être impopulaires. Mme Shephard a prouvé qu’elle saura maintenir le cap.
Tout comme Blaine Higgs, elle a participé par le passé à au moins un rassemblement antiavortement. Ne vous attendez donc pas à ce qu’elle dévie du dogme imposé par son chef et qu’elle se prononce en faveur du remboursement des avortements dans les cliniques.
Le prédécesseur de Mme Shephard à la Santé, Hugh John Flemming, passe à la Justice et à la Sécurité publique. Il ne faut pas le voir comme une punition, mais plutôt comme une faveur. M. Flemming, un avocat, souhaitait depuis longtemps obtenir la Justice.
La nouvelle du jour est la nomination de Daniel Allain au ministère des Gouvernements locaux et de la Réforme de la gouvernance locale.
La réforme municipale sera le legs le plus important de Blaine Higgs, pour le meilleur ou pour le pire. Des changements majeurs s’annoncent et M. Allain, qui connaît le milieu municipal puisqu’il était jusqu’à tout récemment maire suppléant et conseiller municipal à Dieppe, est la personne toute désignée pour les mener à bien.
Cette réforme risque de favoriser les principales villes centres, en particulier Saint-Jean, possiblement au détriment des communautés rurales. En misant sur un député de Moncton, francophone de surcroît, le premier ministre a bien joué ses cartes.
À la tête d’un gouvernement majoritaire et avec un conseil des ministres à sa main, Blaine Higgs a le champ libre pour transformer le Nouveau-Brunswick selon sa vision.