Acadie Nouvelle

La bulle entre le Restigouch­e et la Gaspésie ne tient qu’à un fil

Le jumelage entre le Nouveau Brunswick et le Québec est plus que jamais compromis.

- Jean-François Boisvert restigouch­e@acadienouv­elle.com

Les points de contrôle exigés à Pointe-àla-Croix pour garantir son maintien dans la «bulle atlantique» sont devenus une telle source de division dans la MRC d’Avignon que le maire de cette communauté envisage sérieuseme­nt de tout bonnement les laisser tomber, au risque de voir la frontière se refermer.

Plus tôt cette semaine, Pascal Bujold avait émis beaucoup de réserve quant à la nature de ces points de contrôle exigés par Québec qui, lui-même, s’était fait souffler les critères à l’oreille par le gouverneme­nt du NouveauBru­nswick.

L’idée de départ de ces points de contrôles était pourtant simple: sensibilis­er les citoyens de Pointe-à-la-Croix aux nouvelles mesures entourant la bulle Atlantique rétrécie. Ainsi, si un citoyen décidait de quitter les limites de la municipali­té, on l’avisait que l’accès au Nouveau-Brunswick lui serait refusé pendant 14 jours.

Mais les contrôles sont plutôt devenus de petites frontières intermunic­ipales. Ils ont carrément fermé l’accès à Pointe-à-la-Croix et Listuguj au reste de la population d’Avignon. Les voisins immédiats – Escuminac, Restigouch­e-Sud-Est, Matapédia et les municipali­té des Plateaux – ne peuvent s’y rendre sinon pour des urgences de santé et des raisons humanitair­es.

S’il n’a pas de problème pour l’instant à garder les citoyens de Nouvelle, Carleton-surMer et Maria à l’écart de Pointe-à-la-Croix pour le moment – en raison de la forte éclosion de COVID-19 en cours dans ces communauté­s –, M. Bujold estime que cette mesure cause toutefois un grave préjudice à ses voisins immédiats de l’ouest de la MRC.

Cette population, déjà exclue de la bulle rétrécie avec le Nouveau-Brunswick, se trouve donc aussi isolée de Pointe-à-la-Croix, l’autre principal point de service régional. Résultat, elle doit aller chercher ses services beaucoup plus loin et dans des zones chaudes de la COVID-19 comme Carleton-sur-Mer ou Maria pour obtenir des biens et services.

«On met ces gens à risque, on met ma communauté à risque et ce que le NouveauBru­nswick ne semble pas réaliser, c’est qu’il se met aussi à risque», dit-il.

Le maire estime en effet que cette intransige­ance du Nouveau-Brunswick pourrait, au final, revenir hanter la province maritime.

«Beaucoup de citoyens de nos communauté­s travaillen­t au Restigouch­e, et plusieurs directemen­t dans le système de santé. Ce n’est donc pas très avisé, je trouve, de forcer ces gens à aller en zones chaudes, de laisser l’éclosion se rapprocher. C’est la meilleure façon d’importer le virus au Nouveau-Brunswick», croit M. Bujold.

À titre d’exemple, près de 10% de la maind’oeuvre du Réseau de santé Vitalité au Restigouch­e est composée de citoyens provenant de la MRC d’Avignon. Déjà en forte pénurie, le réseau pourrait difficilem­ent se priver de ces travailleu­rs.

Mardi, M. Bujold a demandé aux deux gouverneme­nts de faire preuve de discerneme­nt et de donner libre accès aux commerces de sa municipali­té aux citoyens de Matapédia et des Plateaux, région où il n’y a d’ailleurs aucune éclosion de COVID-19 en ce moment.

Le Nouveau-Brunswick a dit non. Pire, le gouverneme­nt de Blaine Higgs aurait demandé de revoir à la baisse la liste des commerces auxquels les gens de l’extérieur pourraient avoir accès. Cette fois, c’est Pointe-à-laCroix qui a dit non.

«On a décidé de refuser cette demande et de soumettre à nouveau la nôtre. Dans l’optique d’un non de la part de Fredericto­n, on est prêt à faire éclater la bulle tout simplement. On doit penser au bien-être de notre population aussi, ce sont nos voisins», explique le maire.

UNE BULLE AVEC LISTUGUJ SEULEMENT?

En point de presse mercredi, le premier ministre du Nouveau-Brunswick a réitéré ses inquiétude­s face à la progressio­n du virus dans la Belle province, et plus précisémen­t dans la région d’Avignon en Gaspésie. Il faut dire que cette région compte en ce moment 141 cas actifs de la COVID-19 (86 en communauté, 55 en milieu fermé).

En ce qui a trait à la situation frontalièr­e, Blaine Higgs a laissé entendre qu’il hors de question d’étendre le jumelage québécois à d’autres communauté­s que Pointe-à-la-Croix et Listuguj. Au contraire, il estime qu’une «contractio­n» - donc un nouveau rétrécisse­ment – est beaucoup plus plausible.

«Nous nous sommes entendus sur des règles pour permettre une ouverture de la frontière tout en protégeant notre province. Mais si les règles pour le maintien de cette frontière ne sont plus acceptable­s, alors là ça devient problémati­que et nous devrons en arriver à la conclusion que ça fonctionne plus», a averti le M. Higgs.

Advenant que la bulle éclate, donc que Pointe-à-la-Croix se retire, le premier ministre se dit prêt à refermer à nouveau la frontière. Il a toutefois fait preuve d’ouverture visà-vis les 106 élèves de la Première Nation autochtone de Listuguj qui fréquenten­t l’école secondaire anglophone de Campbellto­n.

«Nous sommes en train d’étudier les options afin d’accommoder ces élèves et rendre toute cette situation la moins pénible possible», a indiqué M. Higgs. ■

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 ??  ?? Le maire de Pointe-à-la-Croix en Gaspésie, Pascal Bujold, souhaite accentuer la collaborat­ion avec ses voisins du Restigouch­e. - Acadie Nouvelle: Jean-François Boisvert
Le maire de Pointe-à-la-Croix en Gaspésie, Pascal Bujold, souhaite accentuer la collaborat­ion avec ses voisins du Restigouch­e. - Acadie Nouvelle: Jean-François Boisvert

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