La COVID-19 a révélé les failles du système de soins de longue durée
Au Canada, 77% des décès liés à la COVID-19 auraient eu lieu dans des centres de soins de longue durée, tant et si bien qu’Ottawa songe à y instaurer des normes nationales. Une idée saluée par plusieurs experts, qui estiment que le recrutement de personnel ne suffira pas à combler les failles du système actuel.
Pour Thomas Hadjistavropoulos, professeur au département de psychologie et titulaire de la Chaire de recherche en vieillissement et santé de l’Université de Régina, il est nécessaire d’établir des normes fédérales plus élevées: «Selon moi, les soins de longue durée sont la plus grande faiblesse du réseau de santé canadien.»
La qualité des soins de longue durée est extrêmement variable de province en province, selon Thomas Hadjistavropoulos, parce que la santé est une compétence provinciale et que les soins de longue durée n’ont pas été inclus dans la Loi canadienne sur la santé, contrairement à d’autres services de santé.
«La COVID-19, explique le professeur Hadjistavropoulos, n’a pas créé les problèmes dans les systèmes de soins de longue durée . Elle en a révélé les problèmes.»
RÉCOLTER DES DONNÉES COMPARATIVES ET ÉTABLIR DES NORMES DE SOINS
Le professeur John P. Hirdes, de l’École de santé publique et des systèmes de santé de l’Université Waterloo, croit que des normes nationales en soins de longue durée devraient permettre d’obtenir des données comparatives pour évaluer la qualité des soins à travers le pays.
«Mesurer les résultats et la qualité des soins de façon cohérente serait très utile, car cela permettrait d’évaluer comment les provinces et territoires s’en sortent. Nous y sommes presque pour l’ensemble du pays, puisque toutes les provinces et tous les territoires, à l’exception du Québec, ont adopté une norme d’évaluation commune pour les soins de longue durée», qui est mise en oeuvre à travers l’Institut canadien d’information sur la santé, explique le professeur Hirdes.
Un second objectif de normes nationales serait d’établir des bases pour la prestation de services, de façon à s’assurer que tous les Canadiens aient accès aux mêmes niveaux de soins partout au pays, selon le professeur Hirdes. Une de ces normes pourrait être le niveau de personnel, soit le nombre d’employés et leurs qualifications.
D’après le professeur Hadjistavropoulos, «le système est odieusement sous-financé. C’est pourquoi il n’y a pas assez de personnel. Il y a des centres de soins de longue durée où il y a une seule infirmière sur l’étage pour s’occuper de trente patients. Ce n’est pas assez pour offrir des soins.»
La question du niveau de personnel n’est pas liée uniquement au nombre d’employés, mais aussi aux types d’employés, ajoute John Hirdes.
«Il y a un manque de personnel qualifié pour gérer la complexité médicale des résidents des centres de soins. On n’a pas que besoin de plus de préposés aux bénéficiaires, mais aussi de plus d’infirmières spécialisées en soins gériatriques.»
«C’est bien engager plus, mais on a besoin de plus d’expertise clinique pour gérer ces problèmes compliqués. Les préposés aux bénéficiaires n’ont tout simplement pas la formation pour gérer toutes les complexités auxquelles on fait face aujourd’hui dans les centres de soins de longue durée», opine John Hirdes.
De plus, le manque de personnel a des effets sur le niveau de formation: puisque le personnel est surmené, il n’y a pas de temps pour la formation continue, ce qui a un impact sur la qualité des soins, selon Thomas Hadjistavropoulos. ■