Le silence de Renée Blanchar: une vérité nécessaire
Film coup de poing, Le silence de Renée Blanchar est une oeuvre difficile, mais nécessaire qui a reçu un bel accueil du public lors de la première au FICFA, jeudi. Enfin la vérité sort au grand jour, ont affirmé des survivants de ces abus sexuels commis par des prêtres catholiques en Acadie.
«Je me suis toujours dit avec ça, si je peux sauver un enfant dans le monde, j’ai fait mon devoir puis j’espère que ça va en sauver beaucoup», a confié Jean-Paul Melanson, en entrevue à l’issue de la projection
Celui-ci n’était qu’un jeune garçon lorsqu’il a commencé à subir les assauts sexuels du père Camille Léger, ancien curé de Cap-Pelé.
Pendant plus d’une quarantaine d’années, il confie avoir vécu avec un point dans l’estomac. À force de parler de ce qu’il a vécu, il a commencé à avoir de moins en moins mal.
«Depuis la dernière année, le point n’est plus là. Quand ils m’ont offert de faire le film, j’ai trouvé que c’était une bonne manière de parler», a exprimé Jean-Paul Melanson qui estime qu’il peut maintenant marcher la tête haute.
Il tient à ce que les gens comprennent ce qui s’est réellement passé. Présenté à guichets fermés dans deux salles du Cinéplex de
Dieppe, devant près de 150 personnes (distanciation physique oblige), et en ligne, Le silence a donné le coup d’envoi au 34e Festival international du cinéma francophone en Acadie (FICFA).
De nombreux participants du film étaient présents à la première du documentaire. Un long silence suivi par de vibrants applaudissements a salué cette oeuvre qui porte sur un sujet malheureusement encore brûlant d’actualité.
«C’est très fort, belle recherche. C’est quelque chose qu’on s’attendait à ce que ça sorte. On n’avait pas les outils pour le faire puis Renée Blanchar a été l’outil et la machine à casser notre silence. On pensait qu’on était tout seul et on n’était pas tout seul. Ce sont des sentiments que ça fait longtemps qu’on gardait en dedans qui nous envahissaient, nous rongeaient et que Renée a réussi à faire sortir au grand public», a commenté Donald Landry de Tracadie. À l’écoute des victimes
La cinéaste qui aborde le sujet avec sensibilité sans tomber dans le sensationnalisme donne la parole aux victimes et à des témoins, révélant ainsi l’étendue et l’épaisseur du silence entourant ces scandales sexuels.
«Finalement, il y a eu quelqu’un qui voulait écouter les histoires des victimes. Wow! Pour moi, Renée, j’espère qu’elle va guérir beaucoup de monde avec son film. J’aime bien mon village de Cap-Pelé. Je me suis fait pointer du doigt parce que je voulais briser le village, mais je n’ai jamais eu aucune intention comme ça. On va espérer que ça va apporter une guérison au village et que ça va arrêter les commérages parce que ceci, c’est la vérité», a affirmé Bobby Vautour, un participant du documentaire.
Victor Cormier, un survivant qui témoigne de l’horreur causée par Camille Léger, a voulu participer à ce documentaire afin d’éviter que d’autres actes de cette nature se reproduisent. Pendant longtemps, personne n’en parlait, soulève-t-il.
«C’est pour ça qu’on a fait le film et qu’on en a parlé. C’est quelque chose qui ne devrait plus se produire. Ça devrait être la fin des abus sexuels dans la religion catholique et partout dans les écoles et dans le sport.»
Malgré la gravité du sujet et la douleur qui en découle, la cinéaste propose une oeuvre porteuse d’espoir avec une signature personnelle, tant par la narration et les images que par la musique de JeanFrançois Mallet.
Renée Blanchar s’est dite honorée et privilégiée de pouvoir présenter un film en salle dans cette édition inédite du FICFA et d’ouvrir un festival en pleine pandémie mondiale. Elle a rappelé que ces hommes étaient des enfants que les autorités de l’église n’ont pas su protéger. Un pan sombre de l’histoire de l’Acadie.
La productrice Maryse Chapdelaine a ajouté que le documentaire se veut une prise de parole et une prise de conscience collective afin de réclamer au gouvernement une commission d’enquête nationale sur ces scandales sexuels de l’église.
Coproduit par Ça Tourne Productions et l’ONF, Le silence prend l’affiche dès cette fin de semaine au Cinéma du centre à Caraquet et au Cinéma Péninsule à Tracadie. Il sera aussi à l’affiche du Cinéplex de Dieppe à compter du 20 novembre. Le FICFA se poursuit jusqu’au 20 novembre. ■