Acadie Nouvelle

Dans les profondeur­s d’un camp de réfugiés

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Le documentai­re Errance sans retour nous entraîne dans la dure réalité du camp de réfugiés le plus peuplé de la planète, celui de Kutupalong dans le sud-est du Bangladesh. Une oeuvre émouvante sur la condition humaine signée par deux cinéastes globe-trotters Mélanie Carrier et Olivier Higgins.

Mélanie Carrier et Olivier Higgins se connaissen­t depuis l’âge de 14 ans. Après des études universita­ires en biologie, ils ont entrepris une longue aventure à vélo de la Mongolie jusqu’aux Indes. C’est ainsi qu’ils ont réalisé leur tout premier documentai­re Asiemut. Ce premier projet leur a donné envie de poursuivre dans le milieu du documentai­re en réalisant des oeuvres de nature plus sociale.

Quand ils ont vu, en 2018, les images de Renaud Philippe démontrant l’ampleur de la situation au camp de Kutupalong après les événements génocidair­es qui se sont déroulés en 2017 au Myanmar (ex-Birmanie), le couple a été touché. Les médias n’en parlaient pas beaucoup. Ils ont contacté le photograph­e de Québec pour développer un projet cinématogr­aphique ensemble. Au départ, cela devait être un court métrage.

«Ça devait être quelque chose d’engagé un peu et d’essayer de faire quelque chose pour faire parler de la situation puis on est parti sur le terrain Renaud et moi. Il avait déjà rencontré des familles là-bas et un contact qui pouvait nous guider dans le camp. À partir de là, tout a découlé. Le projet de court métrage documentai­re est devenu un long métrage», a raconté en entrevue Olivier Higgins.

Ce film fait partie aussi d’une exposition multidisci­plinaire avec différents artistes présentée au Musée national des beaux-arts de Québec. Le camp de Kutupalong est habité par les Rohingyas, une des ethnies de la minorité musulmane au Myanmar. La population du camp atteint environ 700 000 réfugiés, à peu près l’équivalent de la population du Nouveau-Brunswick. Cette ethnie n’est pas reconnue par les autorités du Myanmar, donc apatride. Olivier Higgins raconte qu’ils sont ostracisés jusqu’aux événements de 2017 où il y a eu des actions coordonnée­s par les militaires et la population pour les expulser. Les Rohingyas ont fui le Myanmar en masse vers le Bangladesh et d’autres pays limitrophe­s.

UNE PRISON À CIEL OUVERT

Guidé par Kalam, jeune réfugié rohingya, les cinéastes ont filmé le quotidien et la vie des gens dans le camp à travers ses ruelles de terre et ses habitation­s de fortune. Gardé par des militaires, le camp a toutes les allures d’une prison à ciel ouvert. «Tout ce que je veux, c’est être libre», confie Kalam.

Les cinéastes sont allés à la rencontre de plusieurs familles, de femmes qui se livrent devant la caméra parfois en pleurant. Elles racontent comment elles ont vécu cette tragédie, des massacres d’enfants, de femmes et des familles décimées. Kalam qui avait d’abord fui vers l’Inde avant le génocide est venu rejoindre sa famille au camp de Kutupalong.

Les cinéastes ont passé une vingtaine de jours dans le camp pour le tournage. Ils étaient toujours surveillés.

«Ce n’est pas un film tant sur la situation des Rohingyas que sur la condition humaine. Vous le sentez plus à la fin du film. Que souhaitons-nous en tant que planète, quel choix souhaitons-nous et comment acceptonsn­ous de laisser un poids sur les épaules à des enfants qui naissent et qui n’ont rien choisi?», soulève le cinéaste.

Errance sans retour est présenté au Festival internatio­nal du cinéma francophon­e en Acadie, mardi à 19h, en salle virtuelle. Un entretien avec les réalisateu­rs suivra la projection. – SM ■

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