Vivre avec Tommy Tempête
Audrey Long est la mère d’un garçon de 10 ans qui est atteint d’un trouble du spectre de l’autisme. Il est considéré comme non verbal, puisqu’il a un vocabulaire limité.
Pour Mme Long, le quotidien d’un parent avec son enfant autiste est parsemé de petits bonheurs, mais aussi de défis qui peuvent être différents des autres parents qui ne vivent pas cette situation.
«Il parle un peu plus que lorsqu’il était à la maternelle, mais ça reste assez limité. Nous sommes allés à l’urgence récemment. Ç’a été vraiment difficile, car les médecins ne comprennent pas que l’enfant ne parle pas. On a dû répéter qu’il était non verbal et qu’il ne pouvait pas expliquer sa douleur. Les médecins lui posaient des questions en attendant une réponse, mais il n’allait visiblement pas leur répondre.»
«C’est vraiment difficile de recommencer chaque fois à expliquer le diagnostic de Tommy et ses défis.»
Selon la mère de famille, la situation est plus gérable dans leur bulle familiale et même à l’école, puisqu’elle travaille dans l’établissement que fréquente son fils.
«Il a son monde autour de lui qui est habitué à ses défis et qui est capable de l’accommoder, mais dans certaines autres situations, c’est plus difficile, car il manque peut-être un peu de sensibilisation et de connaissances sur le sujet.»
L’adaptation au regard des autres en société a été un travail qui a pris quelques années, avoue Audrey Long. Elle se souvient avoir passé des moments difficiles lorsqu’elle se promenait avec son enfant dans des endroits publics.
«Je dirais que de l’âge de deux ans à sept ans, on a eu beaucoup de crises dans les magasins. Je n’ai pas assez de doigts sur les mains pour compter le nombre de fois où j’ai dû le retenir dans un centre d’achat parce qu’il voulait un jouet, ou peu importe.»
«Il y a évidemment les gens qui te regardent pendant que tu gères la crise. Les gens n’osent pas ou ne savent pas comment t’aider. Tu sens le jugement. Les premières années ont été difficiles.»
Aujourd’hui, elle se soucie un peu moins des crises de son fils et du regard des autres. Elle reconnaît toutefois que ce n’est pas le cas pour tous les parents qui sont dans une situation similaire.
«On a facilement tendance à dire que l’enfant est mal élevé, même s’il y a tellement de choses en arrière de ça. Ça peut être lourd à porter pour un parent. Dans mon cas, ça ne me dérange plus vraiment. Je m’occupe de gérer la crise et pas de ce que les autres disent ou pensent.»
Néanmoins, un parent, dont l’enfant reçoit un diagnostic d’autisme, nage la plupart du temps dans l’inconnu, estime Mme Long.
«Tu ne sais jamais ce qui va arriver, quels seront les défis. L’autisme, c’est un terme vague pour englober différentes choses. C’est pour ça que les premières années sont aussi difficiles.»
Selon elle, les stratégies à adopter diffèrent d’un cas à l’autre. Dans son cas, Audrey Long met beaucoup d’accent sur l’inclusion.
«Je veux m’assurer que le monde autour soit conscient des défis et qu’ils veulent aider Tommy.»
Dans cette optique, l’assistante en éducation est allée plus loin afin d’apporter un peu de sensibilisation, autant dans le milieu scolaire que dans la société en général.
UN LIVRE POUR ENFANT QUI PARLE D’AUTISME
Mme Long a lancé, en octobre 2021, le livre Tommy Tempête qui traite de ce sujet qu’est le spectre de l’autisme.
«Ç’a été écrit ça fait presque sept ans, mais ç’a été un long processus avant que ce soit publié. Tommy allait commencer la maternelle à l’époque et il n’y avait pas vraiment de livre pour discuter de ça avec les autres élèves en milieu scolaire. Les enfants et les enseignants ne savaient pas nécessairement comment aborder le sujet alors c’est dans cette optique que j’ai écrit
Tommy Tempête», raconte la femme originaire de Cap-Rouge au Québec, mais qui habite dans la région de Fredericton depuis maintenant plus de 10 ans.
Grande fervente de l’inclusion, Mme Long a ressenti le besoin de faire cette démarche pour permettre de faciliter cette inclusion des enfants dans leur environnement scolaire.
«Des fois, on n’ose pas expliquer les choses d’une façon, car on a peur de ne pas utiliser les bons mots. Oui, c’est un livre pour enfant, mais c’était important pour moi de faciliter la discussion à propos de l’autisme.»
Son travail a été bien accueilli, puisque tous les exemplaires de son livre ont été vendus en moins d’un mois. L’ouvrage vient d’ailleurs d’être imprimé de nouveau.
«Il y a un gros intérêt, car il n’y a pas beaucoup de livres pour enfants qui parlent d’autisme. Il y a plus de choses en anglais qu’en français, alors, trouver des ressources dans notre langue, c’est difficile.»
RÉSEAUX SOCIAUX
L’autisme engendre aussi certains stéréotypes selon la mère de famille.
«Des fois, tu parles d’autisme et ils ont des images de ce qu’ils voient à la télévision avec les émissions cultes que l’on connaît.»
«C’est pour ça qu’il est important d’en parler et de continuer à développer des ressources.»
Par contre, des outils comme les réseaux sociaux aident à mieux diffuser le message, selon Mme Long.
«Ça va paraître étrange, mais je suis impressionnée par ce que l’on voit sur Tik Tok. Il y a beaucoup de personnes autistes qui sont là-dessus qui parlent de leur état ouvertement et qui partagent leurs différentes situations.»
Tommy est lui-même devenu une sorte de vedette dans son entourage, notamment en raison du livre publié par sa mère.
«Il est convaincu d’être une star (rires). Il a fallu mettre un frein au fait qu’il signait son nom dans les livres. Il signait son nom partout. Il sait qu’il est spécial, mais il a le don de rendre les personnes autour spéciales aussi.»
«Il te fait sentir bien et le commentaire que j’ai souvent c’est qu’à la fin de ta journée avec Tommy tu as l’impression qu’il a changé ta perspective. Il te fait voir et faire les choses d’une autre façon et il t’apprend à apprécier les petites choses simples de la vie.» ■